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Culture - Rencontre

Jamil Molaeb : Je ne peins pas des fleurs, je peins l’univers

À soixante-quatorze ans, l’artiste de Bayssour continue de renouveler son pinceau. Il présente à la galerie Janine Rubeiz une nouvelle série de peintures à la thématique florale. Des bouquets par brassées qui expriment sa quête du secret frémissement du vivant.

Jamil Molaeb : Je ne peins pas des fleurs, je peins l’univers

Jamil Molaeb devant ses bouquets préférés du moment à la galerie Janine Rubeiz. Photo Michel Sayegh

Il a tout peint Jamil Molaeb. Il a tout représenté, ou presque, dans ses peintures sérielles. Les villes (Beyrouth, Jérusalem, Fès ou encore New York…), les femmes, les familles, le monde rural, les oiseaux, les horizons marins, les civilisations orientales et égyptiennes, les couleurs en abstractions… Il a même peint la révolution et l’espoir d’un peuple qui s’est soulevé un jour d’octobre 2019. Aujourd’hui, c’est vers les bouquets issus de son jardin qu’il tourne son regard. Et c’est dans les fleurs sauvages qui colorent le paysage de Bayssour, son village du Chouf, qu’il puise son inspiration. Comme un retour aux sources de la beauté, à ces éclatantes compositions de la nature qui ont bercé son enfance et développé chez lui un regard toujours tourné vers une recherche absolue d’harmonie.

Aujourd’hui, alors qu’il coule des jours calmes dans sa montagne où il s’est réfugié loin des agitations stériles de la ville, loin de ses désillusions aussi, l’artiste septuagénaire reste plus que jamais fécond.

Et c’est d’un pinceau imprégné d’une certaine spiritualité, d’une certaine vision cosmique de la nature et de l’art qu’il se lance dans une nouvelle série exclusivement florale.

Les fleurs de Jamil Molaeb dégagent une énergie particulière. Une sorte d’aura chromatique. Avec l’aimable autorisation de l’artiste et de la galerie Janine Rubeiz

Accrochées sur les cimaises de la galerie Janine Rubeiz*, les 27 huiles de cette dernière cuvée déploient, par brassées libres ou en bouquets sur des toiles de moyenne et petite dimension, des roses, des anémones, des iris, des cyclamens, des coquelicots, des marguerites, des lys, des pissenlits, des boutons d’or… Reproduites dans des combinaisons de tonalités parfois inédites mais toujours harmonieuses, ces floraisons étalées sur des fonds divers et variés – aussi bien de simples superpositions de couches de couleurs que des tracés géométriques courant sur l’ensemble de la toile – dégagent une énergie particulière. Une sorte d’aura chromatique. Devant ces peintures de Jamil Molaeb viennent immanquablement à l’esprit ces vers de Baudelaire (tirés du poème Harmonie du soir) :

« Voici venir les temps où vibrant sur sa tige/ Chaque fleur s’évapore ainsi qu’un encensoir. »

Pour mémoire

Jamil Molaeb, fils de Baïssour, dispense le bonheur de vivre...

Car sous la touche contemporaine éclatante et défragmentée, sous la joyeuse et folâtre sarabande de tiges, de corolles et de pétales, il y a de la poésie et un sens du sacré dans les coups de pinceau portés par cet artiste qui vous affirme : « Je ne peins pas des fleurs, je peins l’univers. » Un artiste dont on ne percevait pas jusque-là le regard ésotérique porté sur tout ce qui constitue le vivant. Et qui révèle au détour d’une citation tirée d’un livre de Kamal Joumblatt : « Chaque fleur que vous tenterez de déplacer fera vaciller une étoile », ou d’un aphorisme repris de Nietzsche : « L’art nous est donné pour nous empêcher de mourir de la vérité », une âme en quête des mystères de l’existence.

Une huile sur toile de la nouvelle série florale de Jamil Molaeb. Avec l’aimable autorisation de l’artiste et de la galerie Janine Rubeiz

Les fleurs, l’ultime défi

« Dans la vie, il suffit que vous portiez un regard intense sur les choses pour qu’elles libèrent leur charge de sacré. Et c’est cela que j’essaie de transcrire dans mes peintures », confie Jamil Molaeb. Lequel ajoute s’être aussi attelé à cette thématique des fleurs « parce qu’elles représentent, pour moi, l’ultime défi. Dans la plus petite fleur, il y a une multitude de couches et de couleurs qui peuvent remplir tout l’espace de la toile ». « Les plus grands maîtres se sont illustrés dans la peinture de bouquets, chacun à sa manière particulière, de Van Gogh à Aref Rayès en passant par Gauguin, Odilon Redon ou encore chez nous Omar Ounsi et Bibi Zoghbi. Comment pouvais-je y apporter ma touche personnelle ? Il fallait me confronter plus en profondeur à ce genre », révèle-t-il. « Et puis, ma mère parlait avec les plantes. Elle les considérait comme des êtres vivants qui se nourrissent de la terre, s’abreuvent d’eau et s’épanouissent sous le soleil comme les humains. Moi je peins les fleurs, ces natures vivantes, pour les immortaliser. Pour garder intacte leur beauté. Et leur aura bienfaisante sur le cœur des hommes. Car aujourd’hui plus que jamais nous avons besoin de sortir de la grisaille et de la douleur de notre quotidien. L’art est là pour nous aider. Une toile, certes, n’arrête pas la guerre, les conflits et la déliquescence, mais elle peut nous les faire oublier un peu… »

Un peu, beaucoup et même à la folie parfois pour certains devant des œuvres de ce niveau de séduction. À découvrir assurément.

*« The Flowers of Molaeb », jusqu’au 25 février à la galerie Janine Rubeiz, immeuble Majdalani, Raouché.

Il a tout peint Jamil Molaeb. Il a tout représenté, ou presque, dans ses peintures sérielles. Les villes (Beyrouth, Jérusalem, Fès ou encore New York…), les femmes, les familles, le monde rural, les oiseaux, les horizons marins, les civilisations orientales et égyptiennes, les couleurs en abstractions… Il a même peint la révolution et l’espoir d’un peuple qui s’est soulevé un...

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TRES BEAUX TABLEAUX DIGNES DE CE NOM. BRAVO ! MAIS JE N,EN VOIS PAS SUR L,UNIVERS.

LA LIBRE EXPRESSION

17 h 35, le 30 janvier 2023

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Commentaires (1)

  • TRES BEAUX TABLEAUX DIGNES DE CE NOM. BRAVO ! MAIS JE N,EN VOIS PAS SUR L,UNIVERS.

    LA LIBRE EXPRESSION

    17 h 35, le 30 janvier 2023

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