Chants victorieux et parade militaire avec les équipements abandonnés par les soldats étrangers: les talibans ont célébré mercredi le premier anniversaire du retrait d'Afghanistan des forces de la coalitions, dirigées par les Etats-Unis, et leur retour au pouvoir après 20 ans de guerre.
Les habitants de la capitale ont préféré rester chez eux pour ce jour décrété férié par le régime, mais des centaines de leurs partisans se sont réunis sur la place Massoud, près de l'ancienne ambassade américaine. "Mort à l'Amérique ! Mort aux occupants ! Vive la liberté !", ont-ils scandé pendant que les officiels du régime avaient eux rendez-vous pour une cérémonie sur l'ancienne base aérienne de Bagram, centre névralgique des forces américaines pendant la guerre. "Le drapeau de l'islam flotte haut. Nous sommes heureux de vivre sous la bannière de l'islam", a déclaré à l'AFP Shah Ahmad Omari, un combattant taliban.
Le régime taliban, qui a largement imposé depuis son retour au pouvoir l'interprétation ultra-rigoriste de l'islam qui avait caractérisé son premier règne entre 1996 et 2001, avec en particulier de fortes restrictions à la liberté des femmes, n'a encore été reconnu par aucun pays. Dans les rues de la capitale les nouveaux maîtres du pays ont tendu des bannières célébrant les victoires contre trois puissances: l'Empire britannique et l'ancienne Union soviétique ont également perdu des guerres en Afghanistan. "Nous sommes heureux qu'Allah se soit débarrassé des infidèles de notre pays, et que l'Emirat islamique (les talibans) ait été établi", a assuré à l'AFP Zalmai, pharmacien à Kaboul.
Parade militaire
Dans un communiqué le gouvernement a déclaré que ce jour marquait le premier anniversaire de "la libération du pays de l'occupation américaine". "Tant de moudjahidine ("combattants du régime") ont été blessés, tant d'enfants sont devenus orphelins et tant de femmes sont devenues veuves", écrit-il. À l'aérodrome de Bagram, où une parade militaire avait été organisée par les autorités, des groupes de combattants talibans en tunique traditionnelle et portant des grenades dans le dos, ont défilé devant la foule.
Quelques minutes plus tard, des dizaines de véhicules militaires, dont des humvees, véhicules blindés américains, et des chars d'artillerie, saisis pendant la guerre ou abandonnés par les forces étrangères lors de leur retrait chaotique en août 2021, ont été exhibés. Mardi soir, des feux d'artifice avaient éclaté dans le ciel et des talibans, remplis de ferveur, avaient tiré des coups de feu en l'air et traversé la ville en klaxonnant.
Le 30 août 2021, une minute avant minuit, le dernier soldat américain s'envolait de l'aéroport de Kaboul, avec 24 heures d'avance sur la date butoir fixée par le président américain, Joe Biden, pour le retrait des troupes du pays. Leur départ a mis fin à la plus longue intervention militaire des Etats-Unis, débutée en réaction à l'attaque du 11 septembre 2001 à New York.
"Beaucoup de peine"
La guerre a coûté la vie à plus de 2.400 soldats américains et plus de 3.500 soldats des autres pays de l'OTAN, selon l'armée américaine. Des dizaines de milliers d'Afghans ont aussi péri, victimes des combats et des attentats meurtriers menés par les talibans. Deux semaines avant le retrait des troupes, les talibans avaient pris le pouvoir au cours d'une offensive éclair menée sur tout le territoire contre les anciennes forces gouvernementales.
Malgré la fierté des talibans d'avoir reconquis le pouvoir, le pays aux 38 millions d'habitants doit faire face à l'une des pires crises humanitaires au monde, selon les Nations unies. La situation n'a fait qu'empirer quand les versements de milliards de dollars d'aide étrangère, qui avaient soutenu l'économie afghane pendant des décennies, ont été soudainement interrompus après le départ américain.
Les épreuves des Afghans, en particulier des femmes, se sont accrues. Les écoles secondaires pour les filles ont été fermées dans de nombreuses provinces et les femmes exclues de nombreux emplois publics. Elles ont également reçu l'ordre de se couvrir entièrement en public, idéalement avec une burqa, le voile intégral.
"Je n'ai aucun bon souvenir de l'année écoulée. Je dois réfléchir à deux fois à ce que je vais porter avant de sortir pour éviter d'être frappée par les talibans", a déclaré Marwa Naseem, une habitante de Kaboul. "Cela me fait également beaucoup de peine que les filles ne puissent pas aller à l'école, alors que cela fait partie d'une vie normale. Les talibans utilisent la religion uniquement pour empêcher les femmes de progresser", a-t-elle déploré.
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