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Dernières Infos - Soudan

Des milliers de Soudanais anti-putsch dans la rue sous les lacrymogènes

Des manifestants anti-putsch à Khartoum, la capitale soudanaise, le 19 mai 2022. Photo REUTERS/El Tayeb Siddig/File Photo

Des milliers de manifestants scandaient jeudi "Le peuple veut la chute du général Abdel Fattah al-Burhane" sous les grenades lacrymogènes au Soudan où internet était inaccessible après huit mois d'une mobilisation anti-putsch réprimée dans le sang.

Dans les banlieues comme à Khartoum, les forces de sécurité ont tiré des salves de grenades lacrymogènes et assourdissantes, ont rapporté des journalistes de l'AFP.

Mercredi soir, déjà, alors que de petits cortèges marchaient ici et là appelant à la mobilisation jeudi, un manifestant avait été tué d'une "balle dans la poitrine" dans le nord de Khartoum, selon des médecins.

"Même si on doit tous mourir, les militaires ne nous gouverneront pas", scandait malgré tout jeudi la foule dans la banlieue nord-est de Khartoum, alors que les militants pro-démocratie avaient appelé à des manifestations monstres. Ils entendent obliger l'armée à rendre le pouvoir aux civils après le putsch militaire d'octobre qui a plongé l'un des pays les plus pauvres au monde dans le marasme politique et économique, et ce, lors d'une journée chargée de symboles pour ce grand pays d'Afrique de l'Est.

Journée symbolique

Le 30 juin marque à la fois l'anniversaire du putsch qui a porté le dictateur Omar el-Bachir au pouvoir en 1989, un coup de force alors mené main dans la main par généraux et islamistes; et des rassemblements monstres de 2019 qui avaient poussé les généraux à intégrer les civils au pouvoir après avoir écarté Béchir.

Comme à chaque appel à manifester, internet et le téléphone étaient difficiles d'accès et les forces de sécurité étaient déployées sur divers ponts et artères de Khartoum et de ses banlieues, ont constaté des journalistes de l'AFP, faisant redouter de nouvelles violences aux pro-démocratie qui comptent déjà plus de 100 morts et des milliers de blessés dans leurs rangs du fait de la répression, selon des médecins.

Après la destitution par l'armée en 2019 d'Omar el-Bachir, au pouvoir durant trois décennies, militaires et civils avaient décidé de mener le Soudan vers la démocratie ensemble. Mais le 25 octobre 2021, le chef de l'armée, le général Burhane, en a décidé autrement: il a brutalement mis fin au fragile partage du pouvoir en faisant arrêter ses partenaires civils.

En rétorsion, la communauté internationale a coupé son aide --40% du budget du Soudan-- et depuis l'économie est en chute libre: la livre soudanaise s'est effondrée, le pays est pris à la gorge par une inflation dépassant les 200% --et des manifestations contre les militaires ont lieu chaque semaine.

Jeudi, les pro-démocratie veulent "faire chuter les putschistes et empêcher toute alternative factice", affirment les Forces pour la liberté et le changement (FLC), colonne vertébrale du gouvernement limogé par le général Burhane en octobre.

Les FLC refusent le "dialogue national" proposé par l'armée et l'ONU qu'elles considèrent comme une "fausse solution politique" qui "légitime" le putsch, et posent donc comme condition préalable à toute discussion le retour au partage du pouvoir.

"La violence doit cesser"

Si les manifestations sont hebdomadaires au Soudan depuis huit mois, les militants espèrent faire de jeudi un "tremblement de terre". Face à eux, les forces de sécurité n'ont jusqu'ici pas fait usage de la violence mais, réagissant à la mort du manifestant la veille, l'émissaire de l'ONU Volker Perthes a plaidé: "la violence doit cesser".

Plusieurs ambassades ont également appelé à ce que "plus aucune vie ne soit perdue" alors que, régulièrement, les forces de sécurité tirent des salves de grenades lacrymogènes sur les cortèges et souvent, d'après les médecins, des balles réelles dans les têtes et les poitrines des contestataires.

L'ONU, l'Union africaine (UA) et l'organisation régionale est-africaine Igad, de même que Washington, continuent de maintenir la pression sur les acteurs politiques pour trouver une issue dans le pays où flotte désormais le spectre de la famine. Déjà, un tiers de la population souffre d'"insécurité alimentaire aiguë", potentiellement mortelle, et d'ici septembre, ce chiffre devrait selon l'ONU grimper et toucher un Soudanais sur deux. Début juin déjà, l'ONG Save the Children annonçait le décès lié à la faim de deux enfants au Darfour, dans l'ouest du pays.

Des milliers de manifestants scandaient jeudi "Le peuple veut la chute du général Abdel Fattah al-Burhane" sous les grenades lacrymogènes au Soudan où internet était inaccessible après huit mois d'une mobilisation anti-putsch réprimée dans le sang.
Dans les banlieues comme à Khartoum, les forces de sécurité ont tiré des salves de grenades lacrymogènes et assourdissantes, ont...