Le point de vue de...

L’Espoir

L’Espoir

D.R.

«L’espoir c’est attendre qu’un autre le fasse ! »- L’Étau de Munich

Cela est sans doute vrai, mais cette fois, les Libanais l’ont fait eux-mêmes, sans attendre qu’un sauveur ne vienne à leur rescousse. Ils ont emboîté le pas aux expatriés qui ont bravé la chaleur, les longues files d’attente et la bureaucratie anémique pour voter par milliers, et même par dizaines de milliers, triplant ainsi le nombre de suffrages exprimés à l’étranger. Les Libanais l’ont fait eux-mêmes, malgré la terrible crise économique, financière et sanitaire qui les frappe. Les Libanais se sont rendus aux urnes et ont élu 13 députés de la Thawra ! Les 13 nouveaux élus ont des allégeances politiques variées, allant de la gauche à la droite. Ils viennent de Margeyoun, de Nabatieh, de Zghorta et de Tripoli, en passant par la Békaa.

Les 13 nouveaux élus ont en partage une idée simple : « Assez ! Le temps du changement est arrivé ! » À eux 13, ils ont obtenu les votes de centaines de milliers de Libanais, résidents et expatriés, et ce malgré l’œuvre des traditionnelles machines électorales des partis politiques bien établis qui n’ont pas hésité à acheter des voix et à agiter le spectre d’une guerre confessionnelle. Malgré tout cela, les Libanais ont parcouru de longues distances et ont résisté aux pressions avec la ferme intention de voter pour le changement !

Malheureusement, l'espoir est éphémère. Il transperce les nuages noirs des jours d’hiver les plus sombres, laissant filtrer quelques rayons de soleil sur notre terre meurtrie. Et puis les nuages s’épaississent, le dollar s’envole à 37 000, le carburant est rationné et il n'y a plus de pain. Que peuvent faire alors nos 13 nouveaux élus ? Comment peuvent-ils lancer un processus de changement dans un État sclérosé et corrompu, protégé par les gardiens du statu quo, qui s’évertuent à maintenir leur emprise sur nous, aspirant au passage toute force vitale ?

Je leur demande seulement de nous montrer ce que signifie être un député, ce que signifie travailler pour le peuple libanais et protéger ses intérêts vitaux, au lieu de se mettre au service d'un zaïm. Montrez-nous cela, entretenez l’espoir pour qu’il grandisse et se multiplie, pour que les 13 deviennent 100 lors des prochaines élections !

D’abord, chaque fois qu'ils se rendront au Parlement, ils devraient soumettre des dizaines de propositions de loi, obligeant les députés et les blocs à les voter. Ainsi, ils pourront montrer aux Libanais qui sont les véritables responsables de l’obstruction, qui sont ceux qui enterrent ces lois nécessaires sous d'interminables discussions stériles en commissions, et qui sont ceux qui travaillent pour le bien commun ! Ils devraient faire cela à chaque séance ! Si leur premier projet de loi est enseveli dans un trou noir bureaucratique, les 13 nouveaux élus devraient alors en modifier quelques formulations et le resoumettre au vote. Maintenez la pression, et les fissures commenceront à apparaître.

Ensuite, chaque fois qu’une loi sera soumise au vote, les 13 nouveaux élus devraient exiger qu'il soit électronique, en utilisant un système de vote traçable. Si cela n’est pas possible, exiger au moins que le vote soit nominatif. Un vote à mains levées suivi d’un « souddik » (approuvé) crié par le président de la Chambre n’est plus acceptable. En effet, un tel vote limite délibérément la responsabilité. La responsabilité est au cœur des processus parlementaires ; sans elle, le système entier s'effondre. C'est là que réside la clé. Exigez un vote traçable, et si le président refuse, quittez la salle ! Vu la structure actuelle du Parlement, le quorum sera difficile à atteindre, et les 13 départs aboutiraient au report de la plupart des séances.

Enfin, chaque fois qu’un gardien du statu quo et de l'ancien régime fera passer une loi contre les intérêts des Libanais, sans consultations et sans envisager des amendements, la loi devrait automatiquement faire l'objet d'un appel et être renvoyée au Conseil constitutionnel. L'action législative est un processus coopératif et délibératif, surtout au Liban. Aucun accord parallèle entre quelques zaïms ne sera acceptable tant que les 13 nouveaux élus seront présents dans notre hémicycle.

La tâche qui les attend est titanesque. Ces 13 députés portent sur leurs épaules les espoirs d'une population meurtrie par des années de machination politique et de corruption, par l’explosion d’une négligence criminelle qui a tué des centaines de personnes et brisé les rêves de milliers d'autres. Ils sont les dépositaires des espoirs d’un peuple dont les moyens de subsistance sont encore manipulés par des élites économiques, financières et politiques qui font fluctuer le cours du dollar en un clin d’œil sans se soucier des conséquences. Des élites qui ont refusé une solution au sempiternel cauchemar de l'électricité parce qu'elle ne correspondait pas au partage du gâteau confessionnel et à leurs projections de profits...

Les 13 nouveaux élus ne disposent pas d’une baguette magique qui nous emmènerait vers la version utopique de notre pays à laquelle nous aspirons tous. Ils devront simplement nous montrer que l'espoir est réel et que nos efforts peuvent déclencher une vague de changement qui nettoiera nos rivages bercés par des montagnes majestueuses et des mers infinies. Ils doivent simplement nous montrer ce que signifie être un député. Ils doivent nous montrer que le changement est possible, même avec 13 députés seulement. Alors nous les suivrons et nous soutiendrons leurs efforts dans la rue, parce que nous pouvons le faire, parce que nous devons le faire !

* Le comité international a installé un système de vote ultramoderne pour le Parlement qui affiche et enregistre publiquement le vote de chaque député, pour chaque loi. Il n'a jamais été utilisé !

Traduit de l’anglais par Work With Words

«L’espoir c’est attendre qu’un autre le fasse ! »- L’Étau de MunichCela est sans doute vrai, mais cette fois, les Libanais l’ont fait eux-mêmes, sans attendre qu’un sauveur ne vienne à leur rescousse. Ils ont emboîté le pas aux expatriés qui ont bravé la chaleur, les longues files d’attente et la bureaucratie anémique pour voter par milliers, et même par dizaines de...
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