Deux lunes comme deux femmes

Vénus Khoury-Ghata vient de recevoir le prix de poésie Ganzo 2022 qui lui sera remis le 5 juin prochain lors du festival Étonnants voyageurs à Saint-Malo, ainsi que le 10 juin au Marché de la poésie à Paris. Le jury du prix Ganzo salue « une grande voix de la littérature francophone, une œuvre lyrique-baroque flamboyante au confluent de l’Orient et de l’Occident ». Femme de lettres d’expression française, née au Liban en 1937, Vénus Khoury-Ghata continue de construire une œuvre littéraire riche et distinctive. Au fil d’une cinquantaine de romans et de recueils de poésie traduits en 15 langues, elle s’impose comme une plume majeure de la littérature francophone contemporaine. Son œuvre est couronnée de nombreux prix dont le grand prix de poésie de l'Académie française en 2009 et le prix Goncourt de la poésie en 2011. Vénus Khoury-Ghata crée en 2014 un prix de poésie qui porte son nom afin de récompenser et contribuer à faire connaître la poésie écrite par les femmes. Ses deux derniers ouvrages parus en 2021 sont Éloignez-vous de ma fenêtre (Mercure de France) et Ce qui reste des hommes (Actes Sud).

Deux lunes comme deux femmes

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Deux lunes comme deux femmes d’un même village font halte dans notre vestibule

Elles connaissent notre miroir de réputation

Nous devons lire leurs intentions dans la flaque de lumière sur le dallage de la cuisine

Comprendre leur présence chez nous alors que nos voisins les harcèlent de leurs vœux

Elles sont deux comme les sourcils d’un même visage

Deux gardiennes des marées qui

Frappent nos murs à chaque équinoxe

Et font saigner la mère et le grenadier

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Elle court plus vite que le fleuve pour le surprendre à son arrivée à l’estuaire

Lui glisse sous l’aisselle une branche d’eucalyptus contre la toux

Et trois pièces en étain qui deviendront de l’or au contact du couchant

Elle lui crie entre deux vagues le nom de celui qui l’accueillera de l’autre côté de l’horizon

Reconnaissable à la fleur blanche derrière l’oreille

Et cette manière de s’asseoir sur la mer comme au bord d’un chemin