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Lifestyle - Paléoanthropologie

Sur la route des humains archaïques grâce à l’astronomie

Les grands changements climatiques liés à la mécanique céleste expliqueraient l’évolution des hominidés.

Sur la route des humains archaïques grâce à l’astronomie

Erectus, Heidelbergensis, Néandertal, Sapiens... Ces différentes lignées du genre Homo, parmi lesquelles seule la dernière a survécu, ont parcouru l’Afrique et l’Eurasie sur des centaines de milliers d’années, se succédant, se croisant et, parfois, se mêlant. Photo DR

Et si l’évolution humaine n’était qu’affaire de mécanique céleste ? Depuis deux millions d’années, les grands changements climatiques liés aux variations de l’orbite de la Terre ont guidé les migrations des premiers humains, selon une étude publiée dans la revue scientifique Nature.

Erectus, Heidelbergensis, Néandertal, Sapiens... Ces différentes lignées du genre Homo, parmi lesquelles seule la dernière a survécu, ont parcouru l’Afrique et l’Eurasie sur des centaines de milliers d’années, se succédant, se croisant et, parfois, se mêlant. Mais les paléontologues peinent à reconstituer la carte spatio-temporelle de ces peuplements anciens, par manque de fossiles humains. Une solution pour y pallier : fouiller dans le passé climatique. Parce qu’en modifiant les écosystèmes terrestres, le climat a forcément influencé les déplacements de populations. Mais là aussi, les données géologiques décrivant les variations environnementales (calotte polaire, sédiments lacustres, océanographiques ou de grottes...) sont très éparses.

Une étude publiée dans Nature pourrait aider à compléter le puzzle, en montrant comment, sur une très longue période de deux millions d’années, l’évolution du climat a joué sur la distribution des espèces humaines et leur dispersion à travers le monde. Tout se joue avec l’orbite de la Terre autour du Soleil, selon l’auteur principal de cette étude, le climatologue Axel Timmermann, de l’Université de Busan en Corée du Sud. Ce mouvement décrit une ellipse, dont la forme varie tous les 100 000 à 400 000 ans. Et tous les 20 000 ans environ, l’axe de la Terre par rapport à son plan orbital subit des oscillations.

Vagabonds mondiaux

Cette mécanique céleste sur le temps long joue sur le niveau de radiations solaires que notre planète reçoit, provoquant des ères glaciaires comme au Pléistocène (entre 2,6 millions d’années et il y a 10 000 ans) et des alternances de conditions environnementales sèches et humides, comme les épisodes de Sahara vert.

Le Pr Timmermann compare cette dynamique à celle d’un « pendule qui détermine in fine où trouver de la nourriture, et est donc lié à la survie d’une espèce, son adaptation à un milieu et sa migration », explique-t-il dans l’étude. Son équipe s’est appuyée sur plus de 3 000 données fossiles et archéologiques, combinées à des modélisations climatiques. Un supercalculateur a ensuite simulé la manière dont le climat réagit à l’horloge astronomique. Les chercheurs ont ensuite élaboré un modèle calculant la probabilité qu’une espèce ait pu habiter tel ou tel endroit de la planète, sur des périodes de 1 000 ans s’étalant entre 2 millions d’années et il y a 30 000 ans.

Le modèle nous transporte au début du Pléistocène inférieur, une période sèche et froide qui a succédé, il y a 2,6 millions d’années, à celle du Pliocène, plus humide et plus chaude. Elle voit des groupes africains comme Homo habilis et ergaster installés dans des milieux à « faible variabilité climatique, correspondant à une faible variabilité de l’orbite terrestre » : des sortes de « niches » d’habitat cantonné au sud et à l’est du continent africain. Ce comportement se transforme vers la fin du Pléistocène : la végétation se modifie, ouvre des « corridors » vers le nord de l’Afrique, la péninsule Arabique et l’Eurasie. Permettant à Homo erectus et Homo sapiens de devenir ces « vagabonds mondiaux », capables de s’adapter à un plus large éventail de conditions climatiques. Une flexibilité qui pourrait expliquer la survie de notre espèce, selon l’étude.

Le modèle climatique suggère aussi un rôle pivot joué par Homo heidelbergensis, un groupe humain identifié en Allemagne au début du XXe siècle, qui aurait vécu entre il y a 800 000 et 160 000 ans. Les perturbations climatiques survenues en Afrique australe il y a 300 000 à 400 000 ans auraient influencé l’évolution de sa population, qui se serait séparée en une lignée eurasienne avec Néandertal, et une autre africaine dont seraient issus les plus anciens Sapiens.

L’hypothèse devrait faire débat chez les paléontologues, très divisés sur la façon de reconstituer l’arbre phylogénétique de l’évolution humaine. « Cette étude rassemble une quantité exceptionnelle de données environnementales sur un temps long. Le modèle développé aura certainement des applications pour comprendre les mouvements humains », a commenté Antoine Balzeau, paléoanthropologue au Muséum national d’histoire naturelle (France), qui n’a pas participé aux travaux. Il est en revanche plus dubitatif sur les interprétations de l’étude sur la différenciation des espèces. Notamment parce que plusieurs d’entre elles, comme les Dénisoviens, sont exclues du modèle.

Accouchements difficiles

Par ailleurs, selon les résultats d’une autre étude basée sur une simulation numérique, il y a trois millions d’années, Lucy et ses congénères australopithèques vivaient des accouchements aussi complexes que les humains modernes, en mettant au monde des nouveau-nés particulièrement vulnérables.

Les naissances chez l’humain sont réputées difficiles, comparées à celles des autres primates. Chez les femelles chimpanzés, un accouchement est « presque un non-événement », souligne Pierre Frémondière, auteur principal de l’étude parue dans la revue scientifique Communications Biology. En cause, la forme du bassin féminin, qui rend périlleuse la sortie du fœtus humain. Seule solution pour franchir l’obstacle sans encombre: posséder un petit crâne, et donc naître un peu prématurément. La taille de son crâne, très faible au regard de sa future taille adulte, en fait un nouveau-né particulièrement « immature », incapable de survivre sans assistance. Une singularité chez les mammifères qui semble liée à l’acquisition de la bipédie: en se mettant à marcher sur deux jambes, les premiers humains auraient vu l’architecture de leur bassin se modifier et, chez les femmes, le canal d’accouchement se rétrécir.

Pour tester cette hypothèse, les scientifiques sont remontés jusqu’aux australopithèques, une espèce éteinte d’hominines (primates) ayant vécu en Afrique entre 3,2 millions d’années et 1,8 million d’années. Ce groupe très ancien de la lignée humaine, rendu célèbre par la découverte du fossile de Lucy en 1974, était majoritairement bipède, mais possédait encore un petit cerveau à l’âge adulte. « Il est presque comparable à celui d’un chimpanzé, donc on imagine des êtres primitifs, vivant des accouchements très simples », explique Pierre Frémondière, anthropologue et sage-femme enseignant à Aix-Marseille Université.

Afin de reconstituer le scénario, lui et son équipe ont eu recours à des simulations numériques, via un logiciel habituellement utilisé pour les crash-tests automobiles, mais adapté à la « biomécanique » des accouchements. Le but était de calculer le ratio entre la taille crânienne néonatale et la taille crânienne de l’adulte chez les australopithèques: un paramètre jusqu’ici inconnu, les paléontologues ne disposant que de fossiles de crânes adultes, issus de trois espèces d’australopithèques. Ils ont donc suggéré différentes tailles néonatales, correspondant à des masses de cerveau de 110 g, 145 g (proche du chimpanzé) et 180 g (proche de l’homme moderne). Résultat : seuls les cerveaux compris entre 110 et 145 g franchissaient le canal sans encombre – ce qu’on appelle un accouchement eutocique, c’est-à-dire normal. Les plus gros, eux, restaient coincés. Les auteurs de l’étude en concluent que l’immaturité à la naissance était déjà présente chez les australopithèques, et qu’elle provient bien de la bipédie.

De cette vulnérabilité, ils déduisent une nécessité de prise en charge du nourrisson pour le protéger du froid puisqu’il ne peut régler seul sa température, et des prédateurs puisqu’il est encore loin de pouvoir marcher. C’est cette pratique « d’assistance à l’accouchement qui a permis de socialiser les humains à un stade précoce ». Et mobilisé des fonctions cognitives supérieures, menant à l’augmentation de la taille du cerveau au fil de l’évolution humaine.

Source : AFP

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