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Culture - Musique

Zef : Je suis né ici, au Liban, pour une raison

À 25 ans, le musicien-compositeur basé à Amchit est en train de se faire un (pré)nom dans la pop arabe. Un talent prometteur à découvrir sur Anghami et YouTube.

Zef : Je suis né ici, au Liban, pour une raison

Zef, de son vrai nom Joseph Abboud, fait partie de cette jeune génération d’artistes dont la progression est actuellement entravée par un pays qui, décidément, ne rend pas la tâche facile à son peuple. Photo DR

Si vous vous êtes promenés dans les régions de Batroun et de Jbeil ces derniers temps, et que vos pas vous ont menés dans un de ces bars de plage qui tentent tant bien que mal de survivre dans un Liban en plein effondrement, votre chemin a peut-être croisé la voix d’un jeune chanteur libanais particulièrement doué. Et si la musique est encore d’un quelconque réconfort en ces temps difficiles, pourquoi ne pas creuser un peu et tenter d’attraper un peu d’air frais ?

Zef, de son vrai nom Joseph Abboud, fait partie de cette jeune génération d’artistes dont la progression est actuellement entravée par un pays qui, décidément, ne rend pas la tâche facile à son peuple. Pourtant, son ascension est pour le moins prometteuse : ses deux premiers titres (présents sur YouTube et Anghami) Chi nhar et Sofon el-bahara ont déjà été visionnés plus de 40 000 à 130 000 fois sur YouTube. Produits par Sleiman Damien (qui a travaillé avec Haifa, Joe Achkar, ou encore Adonis), et dont les paroles ont été retravaillées avec Anthony du groupe Adonis, ces deux titres ont le potentiel de devenir de vrais hits dans le monde de la pop orientale. « Mais cette année, ça a été catastrophique à cause de la situation. Tous mes plans ont été remis en question. J’avais de grands espoirs, j’avais beaucoup de projets et de concerts, mais beaucoup ont été annulés », déplore l’artiste, qui ne baisse pas pour autant les bras : déjà un nouveau single devrait sortir en août et un album est prévu pour décembre. « Tout s’arrangera tôt ou tard. Les choses arrivent toujours si l’on maintient une constante et ferme volonté. Beaucoup de gens me demandent pourquoi je n’essaie pas de percer à l’étranger. Mais j’ai toujours pensé que je suis né ici, au Liban, pour une raison : pourquoi prendre cette créativité à l’étranger si je peux l’apporter à mon peuple, à ma région, à mon pays ? » lance-t-il.

« J’aimerais n’écrire de chansons que sous la mer quand je plonge »

Zef vit actuellement à Amchit, dans la maison familiale. Petit, il va à l’école des Saints-Cœurs de Jbeil, où il dit être un élève « calme » et « réservé », voire « timide » et sans problème. Lorsqu’il a douze ans, son grand-père décède. « Ce fut le premier grand trauma. C’est lui qui m’a tout appris, du travail du bois à la musique, il a façonné ma manière de penser et m’a transmis son amour pour la mer », se souvient-il. Juste après son décès, sa grand-mère offre une guitare à Zef et son frère : « Ce fut une libération. La musique a toujours été là, mon grand-père était très ami avec Sabah Fakhre, une légende dans la musique tarab. J’ai été élevé dans cet environnement de musique traditionnelle syrienne et mésopotamienne… » Aujourd’hui encore, et quand bien même il se dit influencé par Coldplay, les Beatles ou les Rolling Stones, Zef chante parfois dans les bars de la côte libanaise cette musique tarab que son grand-père lui a laissé en héritage.

S’il a décidé de consacrer entièrement sa vie à la musique depuis quelques années, le jeune Zef a d’abord fait une première année d’architecture à l’USEK, avant d’opter pour le graphic design. Diplômé, il travaille avec l’entreprise Graphic Trafic en tant que graphiste. « Mais les levers de soleil me manquaient. J’ai décidé que je ne travaillerai plus dans un bureau de toute ma vie. » Dès lors, Zef, autodidacte passionné, se voue entièrement à la création : en plus de la musique, il dessine sur tablette digitale, sculpte de drôles de visages à la Modigliani en cire, et plonge en apnée à la chasse à l’arbalète sous-marine. Car la mer n’est jamais loin, elle est toujours là, inspirante, dans le calme comme dans la musique. « J’aimerais n’écrire de chansons que sous la mer quand je plonge », poétise Zef. Entre 2011 et 2015, il joue régulièrement dans la rue, souvent à Jbeil. Il est alors contacté par Anghami, via Anthony du groupe Adonis, qui travaillait à l’époque en tant que producteur d’artistes pour la plate-forme musicale libanaise. « C’est Anthony qui m’a incité à écrire mes paroles en arabe pour être mieux connu dans la région », révèle le musicien.

Et il faut croire que le pari du jeune homme pourrait bien un jour se réaliser : à voir l’engouement qu’ont connu ses deux premiers titres sur internet, et les applaudissements que déclenchent chacun de ses concerts dans les cafés et les bars du Nord-Liban, qui sait si un jour Zef n’existera pas aux côtés de Mashrou’ Leila ou encore d’Adonis, comme référence de la musique pop libanaise ?

Si vous vous êtes promenés dans les régions de Batroun et de Jbeil ces derniers temps, et que vos pas vous ont menés dans un de ces bars de plage qui tentent tant bien que mal de survivre dans un Liban en plein effondrement, votre chemin a peut-être croisé la voix d’un jeune chanteur libanais particulièrement doué. Et si la musique est encore d’un quelconque réconfort en ces temps...

commentaires (2)

En vous souhaitant le meilleur. Et une belle carrière. La vie dans ce pays est un challenge. Les artistes apportent une touche de rêve, de réconfort, d'évasion. Merci à vous Zef et à eux de croire en leurs rêves.

Sybille S. Hneine

19 h 17, le 10 juillet 2020

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Commentaires (2)

  • En vous souhaitant le meilleur. Et une belle carrière. La vie dans ce pays est un challenge. Les artistes apportent une touche de rêve, de réconfort, d'évasion. Merci à vous Zef et à eux de croire en leurs rêves.

    Sybille S. Hneine

    19 h 17, le 10 juillet 2020

  • Bravo ,Zef ,vous etes riche de votre pays et de l'amour hérité ;J.P

    Petmezakis Jacqueline

    09 h 23, le 10 juillet 2020

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