Des rumeurs précises circulent depuis quelques jours sur la possibilité d’une nouvelle guerre entre Israël et le Liban au cours de ce mois ou le suivant. Comme si la crise économique et financière ne suffisait pas, les Libanais pourraient donc subir les affres d’une nouvelle guerre dans des conditions bien plus difficiles que celles de 2006.
Ces rumeurs se basent sur des données rationnelles qui vont de la situation israélienne aux difficultés que traverse actuellement l’axe dit de la résistance et en particulier le Hezbollah.
Concernant la situation israélienne, l’expérience a montré que les dirigeants israéliens lancent en général leurs offensives militaires dans le monde arabe en période électorale américaine, parce que l’administration US est à ce moment occupée par ses affaires intérieures, ce qui leur laisse une plus grande marge de manœuvre. Ensuite, la situation interne en Israël pourrait effectivement pousser le Premier ministre Benjamin Netanyahu à lancer une offensive contre le Hezbollah au Liban pour détourner l’attention des Israéliens de la situation économique précaire et des difficultés que ce gouvernement de coalition affronte.
Sur le plan des conditions difficiles que traverse actuellement l’« axe de la résistance », il est clair que les sanctions américaines sans précédent contre l’Iran, la Syrie et le Liban commencent à porter leurs fruits et placent ces pays – ou en tout cas ceux qui dans ces pays se considèrent dans l’axe de la résistance – dans une situation particulièrement difficile par rapport à leurs populations. Ce qui pourrait justifier une fuite en avant, comme une guerre contre Israël, qui permettrait de détourner l’attention populaire des difficultés économiques, en modifiant les priorités, tout en créant une sorte d’élan national qui ferait passer au second plan les clivages politiques et la grogne populaire due à la crise économique.
Il faut ajouter à ces considérations la probable décision israélienne d’annexer une partie de la Cisjordanie et de la vallée du Jourdain ce mois-ci en principe. Si la décision est maintenue, elle ne peut que mettre en difficulté les pays arabes, et en particulier la Jordanie et le Liban, en provoquant un nouvel exode palestinien vers ces deux pays. Mais surtout elle ne peut pas être appliquée sans provoquer une réaction, ne serait-ce que de la part des organisations palestiniennes considérées comme proches de « l’axe de la résistance ». En effet, à quoi servirait cet axe si une telle décision peut être prise par les autorités israéliennes sans provoquer une réaction de la part des organisations palestiniennes et des parties qui les appuient ? Toute la crédibilité de « l’axe de la résistance » serait ainsi remise en question et si une telle décision devait être appliquée sans problème, il n’aurait pratiquement plus de raison d’être. C’est pourquoi, dans un tel contexte, il est clair que si la décision israélienne est prise et commence à être appliquée, elle provoquera certainement une nouvelle intifada palestinienne qui devrait être plus violente que les précédentes et pourrait, si les Palestiniens se trouvaient en difficulté, pousser leurs alliés à ouvrir de nouveaux fronts, au Golan ou au Liban par exemple, pour réduire la pression sur eux.
Toutes ces raisons montrent que la possibilité d’une guerre israélienne contre le Liban est sérieuse et repose sur des arguments logiques.
Mais face à ces données, il y a aussi plusieurs arguments qui écartent cette éventualité. D’abord, le rapport des forces entre les Israéliens et le Hezbollah. S’il est vrai qu’il est forcément à l’avantage de l’armée israélienne, aidée massivement par les Américains, le parti chiite a malgré tout développé ses capacités militaires de façon impressionnante au cours des dernières années. D’ailleurs, ses alliés ne se privent pas de le dire et de le prouver en parlant de plusieurs dizaines de milliers de missiles qu’il posséderait, dont les missiles de haute précision qui constituent selon des militaires israéliens « une menace existentielle » pour Israël. Sans parler des tunnels souterrains que le Hezbollah aurait creusés à la frontière et qui devraient lui permettre de combattre cette fois en « terre ennemie » et non sur son propre sol, et sans parler aussi des drones dont il est en possession. Pour cette raison, les Israéliens savent donc que toute nouvelle guerre contre le parti pro-iranien pourrait leur être très coûteuse, surtout s’ils doivent se battre sur plusieurs fronts à la fois. D’ailleurs, le Hezbollah ne se prive pas de le leur rappeler en multipliant les vidéos qui circulent sur les réseaux sociaux et qui sont conçues pour semer la peur dans les esprits des Israéliens. Il y a eu ainsi la vidéo qui montre des cibles stratégiques en Israël avec la mention : « Mission accomplie » en clôture du film et une autre qui montre un jeune combattant du Hezbollah qui se prépare à la bataille en disant en arabe et en hébreu : « Préparez-vous, nous arrivons. » Il s’agit bien sûr d’une guerre psychologique, mais elle a son effet.
Ensuite, pour « l’axe de la résistance », le fait que les Américains augmentent de façon très sévère leurs sanctions est un signe de faiblesse et non de force. Car cela signifie l’échec des autres moyens, comme la guerre, les tentatives de susciter des discordes intérieures et d’entraîner cet axe dans des affrontements avec leurs populations respectives. Pour cet axe, le recours à la guerre économique est perçu comme une solution de rechange à la possibilité d’une opération militaire, non un prélude à celle-ci.
Enfin, une nouvelle intifada palestinienne qui pourrait se transformer en affrontement plus large aura pour conséquence d’embarrasser les pays arabes dits modérés et de freiner les tentatives de normalisation de leurs relations avec Israël. C’est d’ailleurs une des raisons pour lesquelles il est question de pousser Benjamin Netanyahu à reporter sa décision concernant la Cisjordanie et la vallée du Jourdain ou de la limiter géographiquement pour éviter justement des réactions violentes de la part des Palestiniens et des Arabes en général.
Pour ces raisons, l’éclatement d’une nouvelle guerre ne semble pas imminent. Le Hezbollah, lui, se contente de dire qu’une nouvelle guerre est toujours possible car « l’agressivité fait partie intégrante de l’entité sioniste »...
"Une nouvelle guerre israélienne contre le Liban ? " Il ne peut y avoir de guerre avec Israël que si le Hezbolla la déclenche comme en 2006. Or la milice iranienne empêtrée en Syrie, en Irak, au Yemen, (et, pourquoi pas au Kamchatka ou en Patagonie, que sais-je?),et occupée également à gérer la contrebande à la frontière libano-syrienne, a actuellement d'autre chats à fouetter que se battre contre Israël.
16 h 08, le 01 juillet 2020