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Culture - Lecture

« Soif », d’Amélie Nothomb, l’évangile iconoclaste d’une auteure délurée...

Il y a peut-être stupeur, mais certainement pas de tremblement dans ce roman où l’auteure se glisse dans la peau de Jésus.

Il y a de la provocation, presque du délire ou un désir irrépressible de voir autrement le christianisme, en voulant se glisser dans la peau de Jésus pour parler, en tout prosaïsme, du fils de Dieu. En s’exprimant avec un « je » intime et personnel, Amélie Nothomb a bravé tous les interdits et sauté par-dessus toute sacralité avec son vingt-huitième roman, Soif (Albin Michel – 152 pages). Jésus vu à travers la lorgnette de son humanité, selon l’auteure de Stupeur et tremblement. Il y a peut-être stupeur, mais certainement pas de tremblement…

Quoique rapidement placé en tête des ventes de la dernière rentrée littéraire, car il piquait la curiosité des lecteurs, ouvrant la brèche à une âpre polémique, mais ne bénéficiant d’aucun prix, Soif raconte les derniers instants de la crucifixion de Jésus. Ses dernières pensées avec quelques flash-back sur son douloureux chemin jusqu’au Golgotha.

Le livre s’ouvre en toute simplicité et quelque superficialité avec le jugement de Ponce Pilate et le témoignage des miraculés qui ne sont guère ni reconnaissants ni tendres envers le Rédempteur.

Avec ses chapeaux extravagants, ses lèvres vermillonnées, son teint pâle, son humour noir, son discours sur les flûtes de champagne qu’elle magnifie en toute théâtralité, Amélie Nothomb est le chouchou des plateaux télévisés. Alors venir parler sous les sunlights des souffrances du Christ à travers « son corps » avait quelque chose d’absolument… inattendu et un peu désinvolte ! Et sans nul doute provocateur !

Pour défendre Soif, un opus qui se voudrait certainement vendeur tout en sachant pertinemment qu’il y a des sujets qu’on ne touche pas impunément, citons la phrase-clé de l’ouvrage, comme un sésame à un texte à la fois léger et décevant : « Pour éprouver la soif, il faut être vivant. »

Lapalissade basique d’une philosophie de grand bazar sans conséquence. C’est justement cet aspect de vivant, de commune mortelle humanité, que la plume d’Amélie Nothomb tente de ressusciter, de transcrire.

Elle donne corps et âme à Jésus-Christ, quelques heures avant la crucifixion. L’occasion de revoir sa vie, son parcours, sa réflexion, sa méditation, son rapport à sa mère, à ses disciples et surtout l’élan d’amour qui le lie à Marie Madeleine… À travers ses sens d’humain.

Un texte qu’on reçoit avec réserve tant la puissance et l’autorité des textes sacrés et évangéliques ne peuvent être ni gommés ni rayés de l’inconscient collectif et portent ombrage à la voix pâlotte et inaudible de l’auteure de Ni d’Ève ni d’Adam.

Un texte qu’on accepte peut-être dès que l’on cautionne l’univers romanesque à l’imagination ici plus futile que fertile, et qui dépasse souvent les frontières du convenu et du conventionnel.

Reste la célèbre fluidité de l’écriture de l’écrivaine qui a dans ses tiroirs, paraît-il, plus de cent romans à être publiés. On regrette d’ailleurs qu’elle n’ait pas choisi un autre texte, plus convaincant… Car ici la mayonnaise ne prend pas et cela reste compassé et inabouti. Pour une histoire grave donnée pour presque ludique, réduite à sa plus simple expression de crayeuse esquisse.

À vouloir trop philosopher et faire l’intéressante, Amélie Nothomb abuse d’affligeants poncifs et bâcle une grande tragédie et un message divin qui fascine et trouble encore l’univers entier.

En mêlant évangiles et Marcel Proust, en décrivant à ras de pâquerettes des gestes et des paroles du Fils de Dieu, Amélie Nothomb agace plus qu’elle n’émeut, séduit ou convertit.

Restent l’humour grinçant ou pince-sans-rire dans un texte incohérent oscillant entre considérations humaines et appels divins. Un exemple de cette salade mal assaisonnée ? « Mon père a créé une drôle d’espèce : soit des salauds qui ont une opinion, soit des âmes généreuses qui ne pensent pas. » Tout est accompli, franchement, et on se demande dans quel camp se place Amélie Nothomb…



Pour mémoire

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Il y a de la provocation, presque du délire ou un désir irrépressible de voir autrement le christianisme, en voulant se glisser dans la peau de Jésus pour parler, en tout prosaïsme, du fils de Dieu. En s’exprimant avec un « je » intime et personnel, Amélie Nothomb a bravé tous les interdits et sauté par-dessus toute sacralité avec son vingt-huitième roman, Soif (Albin...

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