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Culture - Exposition

Jamil Molaeb, amoureux transi de Jérusalem

Une trentaine d’huiles à la galerie Janine Rubeiz, petits et grands formats, comme autant de mosaïques aux détails fourmillant de vie pour évoquer « al-Qods », la plus sainte et mythique des villes...

Jamil Molaeb, « al-Qods 43 », 2018, huile sur toile, 60x50 cm.

Le béret vissé sur ses cheveux déjà blancs comme neige, le gilet sombre sur une chemise mauve, les lunettes attachées à un cordon au cou, le regard toujours vif, le verbe calme et fluide, Jamil Molaeb, à soixante-dix ans, est d’une étonnante jeunesse pleine de créativité. En plus de cette maîtrise et maturité dans les couleurs, l’expression, le mouvement des lignes, le dire pictural, griffes singulières de son talent.

Son exposition à la galerie Janine Rubeiz porte le titre d’al-Qods. Pourquoi Jérusalem ? Et l’artiste de répondre : « Depuis l’année dernière, cette ville est au cœur d’une bataille internationale. C’est le centre du monde, spirituel, politique, religieux. C’est un phare de liberté, le berceau des civilisations bien avant le christianisme et l’islam, un lieu de conflit comme si c’est une cité hagarde, un espace ouvert. Pour moi, c’est une énigme. Je sens al-Qods parce que je ne veux pas que l’Occident l’accapare, avec la partie juive… Une très belle ville assiégée par la violence. Il ne faut pas l’oublier : elle est la rencontre des civilisations arabe, égyptienne, sumérienne, cananéenne, farsi, turque, phénicienne, française, anglaise… »

Comme une lanterne magique

Molaeb avoue une admiration sans borne pour Jérusalem qu’il n’a jamais vue et dont il n’a jamais foulé le sol. « Jérusalem, c’est le jardin de Jésus, le Golgotha, le lieu des prophéties, de fraternité, d’amour, de paix et de déification de l’âme humaine. C’est une superbe et minutieuse mosaïque esthétique que j’essaye de traduire en images perceptibles et palpables. Qui groupe ciel, terre, arbres, pierres, oiseaux, animaux, êtres vivants, toutes les couleurs et toutes les architectures. Et c’est ce que je représente en tant que peintre dans mes toiles à travers un mélange de symboles, de reflets de la ville et des gens qui l’habitent… Car j’ai toujours aimé les médinas arabes. » En témoignent, effectivement, ses travaux sur Fez, Alep, Damas, Bagdad...

À travers cette exposition, Jamil Molaeb essaye de retrouver l’histoire avec une vision et des outils modernes, sans oublier qu’il est un artiste contemporain. « Comme une écriture cunéiforme ou des hiéroglyphe égyptiens, j’introduis dans ces toiles, entre dômes byzantins des églises, clochers, minarets des mosquées, croix, croissants et candélabres à sept branches, des symboles pharaoniques et sumériens ainsi que les signes du poisson, d’une lanterne et une foule d’autres objets hétéroclites et emblématiques. » Autant de représentations de l’équilibre et l’harmonie d’un univers divers et diversifié. Avec une palette de couleurs jaillie de cette terre, « l’ocre des montagnes, le vert des oliveraies, les nuances rosées des soirs qui tombent et le blanc des voiles des femmes aux grands yeux de velours et aux mains besogneuses, caressantes et généreuses… » Comme un étourdissant kaléidoscope ou une lanterne magique, les toiles renvoient toutes ces notions évoquées par l’artiste. Dans des tonalités proches du paysage levantin (ces villes couleur terre de Sienne, blanches, gris-beige) rehaussées de pointes rouge vif, jaune safran ou vert palmier, la narration est à la fois une incantation, une prière, un chant et un hymne à la vie d’une ville dont la blessure ne se cicatrise pas…

« Une ville qui pend au cou du ciel et est protégée par les cils des anges », dit Adonis avec ses mots d’une musicalité soyeuse et impalpable. Une ville autrefois repère et aujourd’hui objet de dissension, de palabres, de sophisme creux. Mais de la hauteur des monts de Judée et de ses remparts, c’est une ville unique, céleste, inaliénable, un point de mire, une forteresse inexpugnable. Elle a odeur et essence de sainteté. Et c’est tout cela, à travers un vibrato pictural, l’exposition de Jamil Molaeb. Car le peintre, dans son imaginaire, avec sa culture, sa quête du beau, son sens du témoignage, sa palette et ses pinceaux, visite cette ville pleine de clameur et bruissant de toutes les grandeurs, non en pèlerin, mais en amoureux lucide. Lucide, mais transi.

Galerie Janine Rubeiz

Raouché, imm. Majdalani.

al-Qods, de Jamil Molaeb, jusqu’au 19 novembre 2018.Tél. 01/868 290.

Le béret vissé sur ses cheveux déjà blancs comme neige, le gilet sombre sur une chemise mauve, les lunettes attachées à un cordon au cou, le regard toujours vif, le verbe calme et fluide, Jamil Molaeb, à soixante-dix ans, est d’une étonnante jeunesse pleine de créativité. En plus de cette maîtrise et maturité dans les couleurs, l’expression, le mouvement des lignes, le dire...

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Marre de Jérusalem et des lieux désignés plus sacrés que d'autres

M.E

13 h 39, le 24 septembre 2018

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Commentaires (1)

  • Marre de Jérusalem et des lieux désignés plus sacrés que d'autres

    M.E

    13 h 39, le 24 septembre 2018

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