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Culture - Exposition

Oussama Baalbaki, fragments d’un discours pictural passionnel

Acryliques mais aussi trois aquarelles d'un artiste épris de lumière et de paysages. Un brin de romantisme, sans mollesse ni innocence, bien entendu, car la part sociétale dénoncée, toujours virulente, est omniprésente.

« Metaphysical Selfie » d’Oussama Baalbaki, aquarelle, 2016/2017.

Les cheveux châtains annelés en bataille jusque dans le cou, les lunettes aux verres clairs sur le nez, les yeux bleus, le jeans plus baba cool que moulant et la chemisette bleu marine aux boutons blancs sagement fermée. Oussama Baalbaki n'est pas un austère avocat mais un jeune homme mordu de peinture, et concerné par l'état d'une ville et d'un pays en décrépitude, qui a choisi d'intituler sa dernière expo « Plaidoirie pour la lumière »*.

Elle est partout, la lumière. Diffuse, captée, coruscante, irisée, aube, crépuscule, agonie ou victorieux lever du jour. L'éclairage sous tous ses angles et dans tous ses états. Surtout la lumière à travers de nombreux et variés paysages du Liban. Des teintes cuivrées au Sud aux flamboyances de Khaldé en passant par les nuits aux fenêtres en alvéoles jaunes de Zokak el-Blatt, des poudroiements de Raouché, des scintillements de Beit-Méry à l'embrasement de Broummana... Poésie sous-jacente que les toiles exsudent silencieusement, gravement, passionnément. Comme ces grains de sable qui remplissent un récipient en douceur, en toute impassible patience.

Une trentaine d'œuvres, des plus gigantesques aux formats plus ramassés (cela va de 3,4 m x 2,6 m x 0,8 m), pour étancher la soif de ces rayons insaisissables, or précieux et volatile, qu'une palette et un pinceau rendent captifs d'un espace, d'une toile, d'un cadrage, d'une prise de vue. Le furtif et l'éphémère s'installent alors confortablement dans la visière du temps.

De son quartier général et préféré, Hamra, le peintre crée avec vivacité et chaleur un portrait de rue presque intimiste. Un tableau dans le tableau que le visage de Sabah souriante, dessiné sur la façade latérale d'un immeuble par le graffeur Yazan Halwani et qu'on retrouve ici, une fois de plus, en icône. Mais il faut alors aussi évoquer ce ciel « rembranesque » avec ses nuages qui s'effilochent à travers une charge de rayonnante luminosité.

 

(Pour mémoire : L’angoisse et l’orage au détour de la quiétude du paysage libanais...)

 

Et ainsi s'égrène, avec la même teneur et le même concept, cette narration picturale qui opère en fragments somptueux, riches de nuances. Narration ruisselante de vie, nourrie de rêves et de contestation, aux couleurs souvent sombres, pourchassant des coins d'ombre afin de mieux faire dégager toute source de lumière et son irrépressible force de radiation.

Par le même biais, par-delà l'astuce et la séduction d'un esthétisme soigné et architecturé, l'artiste mène un combat pour dénoncer des routes défoncées, des carrières qui éventrent des flancs de montagne, des plantes vivaces abandonnées qui rongent le béton abîmé. Ailleurs, il met en scène un arbre pylône qui se dresse sur la ligne d'un horizon lançant ses dernières lueurs, ou trace une ombre plus effrayante que l'épouvantail qui ne fait plus peur aux oisillons... Les images se succèdent et s'enfilent sur les cimaises de la galerie Agial avec une douce violence.

Le firmament est ici un théâtre encore plus impressionnant et changeant que le fourmillement des blocs de construction qui se serrent et font un redoutable coude-à-coude. Devant l'invasion sauvage d'un urbanisme chaotique, devant cette nature presque à l'abandon, avec ces scènes agricoles entre entretien basique et maisons d'une modestie d'un autre temps, Oussama Baalbaki se livre à une rêverie lumineuse. Comme ces enfants qui s'allongent dans un pré et regardent le ciel où filent des nuages qui prennent la forme de leurs désirs. Sauf qu'ici, la rêverie est placée sous le signe de la lucidité et de la poésie.

Et en exergue, comme une enseigne lumineuse en noir et blanc, cette toile de Maïakovski (guère un hasard dans cet ensemble fort cohérent), bouche ouverte sur son lit de mort. Une toile au titre emblématique : La blessure d'un poète est une fleur... Et que serait donc la blessure d'un peintre ?

 

*AGIAL ART GALLERY
Rue Abdel Aziz, Hamra.
« Pleadings of the light » d'Oussama Baalbaki, jusqu'au 5 août 2017.

Les cheveux châtains annelés en bataille jusque dans le cou, les lunettes aux verres clairs sur le nez, les yeux bleus, le jeans plus baba cool que moulant et la chemisette bleu marine aux boutons blancs sagement fermée. Oussama Baalbaki n'est pas un austère avocat mais un jeune homme mordu de peinture, et concerné par l'état d'une ville et d'un pays en décrépitude, qui a choisi...

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