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Moyen Orient et Monde - Conflit

« Le vrai chef de la Cisjordanie, c’est le gouverneur militaire israélien »

Après trois mois de violences, la crédibilité de l'Autorité palestinienne est de plus en plus en jeu, alors que certains évoquent sa dissolution ou son effondrement et que des voix s'élèvent pour réclamer un retour à la lutte armée.

Une Palestinienne brandit le portrait de deux adolescents tués par les forces de sécurité israéliennes lors des récentes attaques à Jérusalem-Est. AFP Photo/Gali Tibbon

Trois mois après le début d'une vague de violences qui a réveillé le spectre d'une troisième intifada, l'Autorité palestinienne n'a pu ni satisfaire les revendications d'une population sans perspective d'avenir ni engranger de gains politiques et diplomatiques, estiment les experts.


En première ligne de manifestations souvent violentes et des attaques contre les Israéliens, les jeunes paient le prix le plus fort. La grande majorité des près de 140 Palestiniens tués depuis le 1er octobre avaient moins de 35 ans. « Les jeunes ne voient aucun horizon politique et subissent la crise économique et le chômage » qui touche quasiment un jeune sur deux (et plus de 27 % de la population), explique à l'AFP Ghassan Khatib, vice-président de l'université de Bir Zeit. Mais « les dirigeants sont incapables de satisfaire les demandes politiques et économiques » d'une génération qui a grandi avec les accords d'Oslo, la poursuite de la colonisation israélienne et les divisions palestiniennes. L'Autorité, mise en place avec Oslo dans l'attente d'un futur État palestinien qui semble rester bien lointain 20 ans après, perdure faute de mieux et va de mal en pis. Elle est toujours tributaire de l'aide internationale « et faible politiquement faute d'élections », poursuit M. Khatib.


Il n'y a pas eu d'élections depuis plus de 10 ans par la faute des dissensions palestiniennes. L'Autorité a été évincée de la bande de Gaza dirigée sans partage par le mouvement islamiste Hamas. La politique palestinienne « est dans une impasse et incapable de se renouveler », juge M. Khatib, ancien ministre et analyste politique. Pour M. Khatib, si l'occupation israélienne est le principal problème, il existe aussi des obstacles internes : « La crédibilité de l'Autorité est en jeu » car elle a fait le choix de l'action diplomatique et des négociations, « mais cette stratégie a échoué ».

 

« Incapable de se renouveler »
Prise de court par la mobilisation de la jeunesse, l'Autorité a d'abord laissé les foules se ruer sur les check-points militaires israéliens. Mais, « depuis que se sont multipliées les initiatives, notamment la venue du secrétaire d'État américain John Kerry, on a vu que la sécurité palestinienne interdisait désormais nos manifestations », témoigne Seif al-Islam Daghlas, du conseil étudiant de Bir Zeit. Pour autant, l'Autorité n'a rien obtenu d'une communauté internationale préoccupée par l'organisation État islamique (EI) ou la vague de migrants vers l'Europe.


Pour certains, ce qu'il faudrait aujourd'hui, c'est un électrochoc, comme la dissolution ou l'effondrement de l'Autorité. « Nous devons empêcher l'effondrement de l'Autorité palestinienne autant que possible, mais nous devons être préparés à cette éventualité », a dit lundi le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu dans une réunion à huis clos, selon le quotidien Haaretz. L'entité intérimaire « n'est plus qu'une municipalité, qui fournit des services, elle est devenue inutile », tranche Mohammad Chtayyeh, haut cadre du Fateh, le parti du président palestinien Mahmoud Abbas.

 

(Pour mémoire : Henry Laurens : « Je suis aujourd’hui d’un pessimisme total sur le conflit israélo-palestinien et la région »)

 

Déçus des négociations
Si Israël la pousse à l'abîme en imposant encore plus de restrictions, « nous ne verserons pas une larme », promet-il, « parce qu'au bout du compte, le vrai chef de la Cisjordanie, c'est le gouverneur militaire israélien ». De fait, les accords d'Oslo ont divisé les territoires occupés en trois zones. L'Autorité palestinienne ne contrôle véritablement que la zone A, seulement 17 % de la Cisjordanie.
De plus en plus de voix s'élèvent pour réclamer un retour à la lutte armée. Selon un récent sondage, deux Palestiniens sur trois pensent que l'action violente fera plus pour la cause que les négociations vieilles de près de 25 ans, note Khalil Chikaki, qui a mené cette enquête.


Ceux qui seraient tentés par l'escalade de la violence trouveront l'Autorité sur leur route. « Visiblement, les ordres donnés aux officiers (palestiniens), c'est de déterminer s'ils peuvent contenir les manifestants et les empêcher d'accéder aux points de friction ou les laisser faire. Si la situation semble incontrôlable, ils se retirent », explique M. Chikaki.
Mais cette tactique est applicable sur le territoire que contrôle l'Autorité, pas ailleurs, où heurts et attentats anti-israéliens continuent.
C'est là que la situation pourrait dégénérer, assure-t-il, « si quelqu'un commet une grosse erreur, par exemple si l'armée israélienne tue de nombreuses personnes ou si les forces de sécurité palestiniennes, démoralisées, retournent leurs armes contre les Israéliens ».

 

 

 

Trois mois après le début d'une vague de violences qui a réveillé le spectre d'une troisième intifada, l'Autorité palestinienne n'a pu ni satisfaire les revendications d'une population sans perspective d'avenir ni engranger de gains politiques et diplomatiques, estiment les experts.
En première ligne de manifestations souvent violentes et des attaques contre les Israéliens, les jeunes...

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