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À La Une - terrorisme

Allégeance au mollah Mansour : al-Zawahiri n'avait pas le choix

La déclaration du chef d'el-Qaëda est "celle d'une organisation divisée qui prête allégeance à un mouvement taliban divisé, alors qu'un EI uni et en expansion tente de recruter les partisans déçus des deux groupes".

Le numéro un d'el-Qaëda, Ayman al-Zawahiri, a fait allégeance au nouveau chef des talibans, le mollah Akhtar Mansour, dans l'espoir de consolider une influence vacillante et de s'assurer sa protection, estiment des analystes. AFP PHOTO / HO / SITE INTELLIGENCE GROUP

Le chef d'el-Qaëda, Ayman al-Zawahiri, n'avait d'autre choix que de faire allégeance au nouveau chef des talibans, le mollah Akhtar Mansour, dans l'espoir de consolider une influence vacillante et de s'assurer sa protection, estiment des analystes.

Vieillissant, contesté dans la sphère jihadiste mondiale, en recul face à l'activisme et à la puissance du groupe État islamique dirigé par le calife autoproclamé Abou Bakr al-Baghdadi, l'Égyptien al-Zawahiri a formulé jeudi ce serment, qui pourrait encore affaiblir le mouvement fondé par Oussama ben Laden.

"Il était tenu par le protocole très formel d'el-Qaëda de renouveler auprès du mollah Mansour l'allégeance qu'avait en son temps prêtée Ben Laden envers le mollah Omar" (prédécesseur du mollah Mansour, déclaré mort en juillet), explique à l'AFP Jean-Pierre Filiu, spécialiste des mouvements jihadistes à Sciences-Po Paris. "Cette allégeance n'a en soi que peu de conséquences pratiques, puisque Ben Laden n'avait même pas informé Omar des préparatifs des attentats du 11 septembre 2001. Mais elle permet une fois encore à Zawahiri de se poser en successeur respectueux de Ben Laden", ajoute-t-il. "Et elle est censée garantir la protection accordée par les talibans à la direction d'el-Qaëda des deux côtés de la frontière afghano-pakistanaise."

Pour l'analyste pakistanais Rahimullah Yusufzai, l'un des meilleurs connaisseurs de la région, "Zawahiri n'avait pas d'autre option, parce qu'el-Qaëda ne survit dans cette partie du monde que grâce au soutien des talibans". En revanche, "ils ne peuvent appuyer el-Qaëda ailleurs, en particulier au Moyen-Orient, parce qu'ils n'y sont pas présents. Je ne pense pas que cette allégeance aura une grande influence multilatérale".

Dans un univers jihadiste qui vit à l'heure de la communication instantanée et des réseaux sociaux, Ayman al-Zawahiri, 64 ans, ne s'était, jusqu'à ce message audio, pas exprimé depuis près d'un an, alors que pas un jour ne passe sans une offensive médiatique du groupe État islamique (EI) ou de ses partisans.

(Lire aussi : La mort annoncée du mollah Omar profitera-t-elle à l'État islamique ?)

 

"Menti à tout le monde"
Il lui fallait "prouver à des partisans de plus en plus sceptiques qu'il est encore vivant" estime le centre de réflexion new-yorkais Soufan Group, dans un rapport intitulé "Zawahiri parle, mais qui écoute ?".
"Une déclaration écrite n'aurait pas suffi, à cause des deux années de tromperie au cours de laquelle les proches du mollah Omar publiaient en son nom des déclarations, alors qu'il était mort (...) Prêter allégeance au mollah Mansour signifie faire allégeance à quelqu'un qui non seulement a menti sur la mort du mollah Omar mais a également publié des communiqués en son nom", ajoute le Soufan Group.

Les cyber-activistes de l'EI ont immédiatement moqué sur internet, souligne le groupe de réflexion, cette allégeance dont ils assurent qu'elle a en fait été faite aux services pakistanais de renseignements, réputés pour leurs liens plus ou moins étroits avec les taliban afghans.
"En fait", assure le rapport, "la déclaration d'al-Zawahiri est celle d'une organisation divisée qui prête allégeance à un mouvement taliban divisé, alors qu'un EI uni et en expansion tente de recruter les partisans déçus des deux groupes".

Pour l'Américaine Rita Katz, directrice de SITE, le centre américain spécialisé dans la surveillance en ligne de la mouvance jihadiste, "l'allégeance d'al-Zawahiri au mollah Mansour va compliquer et sans doute affaiblir la position d'el-Qaëda. La façon dont les talibans ont géré la mort du mollah Omar a mis en colère le mouvement jihadiste, non seulement parce qu'ils l'ont dissimulée mais aussi parce qu'ils ont continué à publier des messages signés de lui après sa mort".
"Nombreux sont ceux qui se demandent : si Zawahiri ne savait pas qu'Omar était mort, comment peut-il s'engager à travailler avec des chefs qui ont menti à tout le monde pendant deux ans ?" ajoute-t-elle.

Pour ces experts, il faut désormais suivre les franchises d'el-Qaëda dans d'autres régions, comme Aqmi au Sahel ou les Shebab somaliens. Leur décision de faire à leur tour allégeance ou pas au nouveau chef des talibans sera d'une importance vitale pour la légitimité d'al-Zawahiri, soulignent-ils.

 

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