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Pleurnicher avec Aoun

Les droits des chrétiens au Liban sont-ils réellement spoliés ? Faut-il suivre Michel Aoun sur ce registre et croire que le partenaire musulman, plus spécifiquement sunnite, triche au jeu du vivre ensemble et s'efforce toujours de rafler la mise ? Faut-il donc répondre à l'appel du général et se joindre au mouvement de protestation qu'il vient de proclamer pour faire prévaloir ces droits ?

Nombre de chrétiens libanais, qu'ils aient ou non manifesté de l'empathie pour la politique du général à un moment ou à un autre de son parcours politique sinueux, se posent aujourd'hui ces questions avec d'autant plus d'angoisse qu'ils observent combien cet Orient en flammes est devenu une terre inhospitalière pour tout le monde certes, mais encore davantage pour leurs coreligionnaires.

De là à épouser l'argumentation du chef du CPL ou plutôt, comme le dirait Tammam Salam, à se mettre à « pleurnicher » avec lui, il y a un pas que beaucoup ne franchiront pas, tant ils se méfient de cet homme dont la carrière est jalonnée de postures populistes pas toujours en harmonie les unes avec les autres, mais constamment en phase avec les sentiments de masse les plus diffus, les plus primaires, les plus ataviques.

Naturellement, il ne sert à rien de nier le relatif repli politique des chrétiens au Liban au profit des sunnites et des chiites. Mais vu sous un angle historique, ce repli ne date pas d'hier, pas même de Taëf, et n'est certainement pas le résultat de chapardages auxquels se seraient livrées les autres communautés.

Si les chrétiens sont affaiblis, c'est essentiellement qu'à la différence des deux grandes communautés musulmanes, ils ne disposent plus, depuis longtemps, d'un point d'appui extérieur duquel ils pourraient tirer leur force, les sunnites ayant dans ce sens l'Arabie saoudite (après avoir eu l'Égypte) et les chiites l'Iran, pour ne plus parler de la Syrie assadiste.

Cette absence de parrain extérieur restera hélas une faille majeure pour les chrétiens tant que le contexte libanais actuel perdurera. C'est d'ailleurs pour cette raison que les chrétiens, encore plus que les autres, ont intérêt à ce que ce contexte change, que l'État libanais parvienne à s'imposer à tout le monde et que disparaisse le besoin de chacune des composantes du pays de rechercher un point d'appui à l'étranger.

Et c'est là que le bât blesse : rien dans la politique identitaire de Michel Aoun et son soutien à un parti plus fort que l'État ne favorise l'émergence de ce Liban des citoyens qui serait le crépuscule des puissances de référence. Au contraire, sa promotion d'un système politique fondé sur le verrouillage communautaire (la loi dite orthodoxe, le référendum présidentiel, la proportionnalité de la représentation au gouvernement,...), en consacrant la culture du blocage, encourage la perpétuation de la situation actuelle si défavorable aux chrétiens.

Quant aux « pleurnicheries » aouniennes à propos du volet plus terre à terre de la question, celui qui se rapporte à la présence quantitative des chrétiens aux postes d'influence, il se heurte lui aussi à certaines réalités. Comme par exemple celle-ci : il y a quelques jours, lorsque les forces vives de la nation, représentées par le patronat, les ordres professionnels et des syndicats, se sont rassemblées au Biel pour dénoncer le « suicide » politique du Liban, on était frappé, en regardant la photo de groupe, de voir que sur la cinquantaine de personnalités réunies, il y avait une écrasante majorité de chrétiens, quelques sunnites et pas du tout de chiites.

Associations de commerçants, d'industriels et de banquiers, ordres d'avocats et de médecins,... tous sont conduits par des chrétiens, et pas nécessairement des opposants, pour certains d'entre eux, à Michel Aoun. Lorsqu'on y ajoute, entre autres, le commandant en chef de l'armée, le gouverneur de la Banque centrale, le président du Conseil supérieur de la magistrature, celui du Conseil constitutionnel ou encore celui du Conseil d'État, on constate que le repli chrétien est tout de même encore plus relatif qu'on ne le croit.

Il est pourtant vrai que sur cette liste, on ne trouve point, jusqu'ici, de gendres du général...

 

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Les droits des chrétiens au Liban sont-ils réellement spoliés ? Faut-il suivre Michel Aoun sur ce registre et croire que le partenaire musulman, plus spécifiquement sunnite, triche au jeu du vivre ensemble et s'efforce toujours de rafler la mise ? Faut-il donc répondre à l'appel du général et se joindre au mouvement de protestation qu'il vient de proclamer pour faire prévaloir ces droits...

commentaires (9)

Très fort Mr. Fayad, mais encore faut il que les gens y pensent et réfléchissent au delà de leur préjugés et au profit de la nation toute entière. J'ajoute, ce que j'ai déjà mentionné dans un commentaire précédent, que notre régime est parlementaire, donc les élus(par le peuple) choisissent le President de la chambre, le premier ministre et le President de la République. Les trois postes sont donc traités a la même enseigne a savoir le choix démocratique de celui qui présidera le poste a pourvoir. Ou est donc la spoliation des Chrétiens puisque tout cela se fait par élection et en fonction de la constitution. Si le Général avait présente sa candidature normalement et avait respecte la constitution, peut être aurait il était déjà President en fonction ou le pays aurait en aurait eu un et toutes les actions jugées anticonstitutionnelles ne l'auront pas été. Afin de parvenir au pouvoir le Général a essayé justement toutes les actions illégales et afin de s'imposer tente de pousser la crise jusqu’à la rue pour mettre plus de pression. Est ce raisonnable? Personne ne le sait. Le suivra-t-on? Pas moi en tout cas car il est aussi dangereux pour le pays que le Hezbollah. Ils sont aussi irresponsables les uns que les autres. Il est temps qu'il quitte le paysage politique, lui, et toute sa famille vu que sa politique ne pourra conduire qu'a plus de dictature et le Liban n'en supporte plus. Basta!!!

Pierre Hadjigeorgiou

11 h 35, le 07 juillet 2015

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Commentaires (9)

  • Très fort Mr. Fayad, mais encore faut il que les gens y pensent et réfléchissent au delà de leur préjugés et au profit de la nation toute entière. J'ajoute, ce que j'ai déjà mentionné dans un commentaire précédent, que notre régime est parlementaire, donc les élus(par le peuple) choisissent le President de la chambre, le premier ministre et le President de la République. Les trois postes sont donc traités a la même enseigne a savoir le choix démocratique de celui qui présidera le poste a pourvoir. Ou est donc la spoliation des Chrétiens puisque tout cela se fait par élection et en fonction de la constitution. Si le Général avait présente sa candidature normalement et avait respecte la constitution, peut être aurait il était déjà President en fonction ou le pays aurait en aurait eu un et toutes les actions jugées anticonstitutionnelles ne l'auront pas été. Afin de parvenir au pouvoir le Général a essayé justement toutes les actions illégales et afin de s'imposer tente de pousser la crise jusqu’à la rue pour mettre plus de pression. Est ce raisonnable? Personne ne le sait. Le suivra-t-on? Pas moi en tout cas car il est aussi dangereux pour le pays que le Hezbollah. Ils sont aussi irresponsables les uns que les autres. Il est temps qu'il quitte le paysage politique, lui, et toute sa famille vu que sa politique ne pourra conduire qu'a plus de dictature et le Liban n'en supporte plus. Basta!!!

    Pierre Hadjigeorgiou

    11 h 35, le 07 juillet 2015

  • NON QUE LE GÉNÉRALISSIME PARAVENTISSIME N'A PAS RAISON... IL A MILLE FOIS RAISON ! 1 - IL DEVRAIT ÊTRE LE PREMIER À LE DÉMONTRER EN PARTICIPANT À L'ÉLECTION DÉMOCRATIQUE D'UN PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE... 2 - IL Y A D'AUTRES FAçONS LÉGALES ET DÉMOCRATIQUES... DANS LE CONTEXTE Où EN EST LE PAYS... POUR ARRIVER AUX ASPIRATIONS DES COMMUNAUTÉS CHRÉTIENNES... LÉSÉES... ET LÀ IL A CERTES PLEINEMENT RAISON... DEPUIS TAËF !!!!!!!!!!!

    LA LIBRE EXPRESSION

    10 h 53, le 07 juillet 2015

  • si vous considerez monsieur Fayad que l affaiblissement des chrétiens du Liban ne date pas d hier .. , c est pire et plus grave encore s il faut rappeler que ces malheureux chretiens comptaient , il ya 2ou 3 décennies , plus de 50 pour cent de la population . Pour appendre a preserver leurs droits grignotes a travers les annees , peut etre faudra -il aller prendre quelques le lecons du cote de chez walid joumblatt le leader Druze qui continue a defendre de toutes ses griffes , sa petite communaute ..ou alors , aller pleurnicher avec le General aoun pour obtenir gain de cause ..

    Hitti arlette

    08 h 36, le 07 juillet 2015

  • L'auteur a l'air de s'y plaire de l'état actuel des choses. Tant mieux pour lui , qu'il reste confiné dans les antichambres . Dans peu de temps il sera aussi c'est content de payer la dîme.

    Chadarev

    07 h 31, le 07 juillet 2015

  • Ls chrétiens sont affaiblis .oui et sont , peut être , " tacitement " laissés pour compte . Mais ils ne seront jamais les chrétiens coptes ou irakiens relégués au 10 eme plan . Et ceci grâce aux pleurnicheries de Michel aoun .. Si Certaines plumes continueront à s' attaquer obsessionnellement au général on finira , monsieur fayad , dans la poubelle .

    Hitti arlette

    07 h 31, le 07 juillet 2015

  • Si les chrétiens n'ont plus aucun poids politique, au point qu'ils en sont réduits à être "chrétiens chiites" ou "chrétiens sunnites", c'est à cause de la criminelle "guerre d'élimination" lancée par le général contre les FL. De quoi se plaint-il donc?

    Yves Prevost

    06 h 27, le 07 juillet 2015

  • Que la Saine parole soit la meilleure et la pire des choses, on peut l'admettre. Il faut dire qu’il s’agit plutôt de formules tellement frappantes, d'expressions ou de manières de dire tellement éloquentes, qu'elles traduisent ce qu’on s’efforce d'exprimer bien mieux qu’on ne saurait le faire. Il ne faudrait s'excuser que brièvement de cette manie tant le bonheur de son utilisation est sublime ! Et pour s'absoudre de tant parler d’eux avec les mots des autres, on peut dire qu’on ne parlerait pas tant d’eux s'il y avait really quelqu'un d'autre que l’on connait aussi bien. On comprend aussi que dez-amerz-aigris soient séduits par le boSSfééér de Hârtéhrééék, i.e. par un bonhomme que le monde n'intéresserait que dans la mesure où il pourrait lui donner des informations sur sa "propre" personne. Et ils sont à l'évidence plusieurs dans ce cas parmi ces orangés niais. Ce stupide nombrilisme surdimensionné ne conduit cet individu qu’à déblatérer des prétendues performances pour espérer rester encore aujourd'hui maybe(h) dans l’actualité, comme disent ses pétulants admirateurs, puisque dans sa biographie on relève notamment la désobéissance ; mais pas celle bien sûr qui inspira Gandhi le Mahatma ; et surtout la lutte contre la Liberté car il est obligatoire, semble -t-il, de rappeler sans cesse qu'il n’est qu’un simple bigaradier farceur dévergondé…. Et comme s'il était plausible de prendre pour un humaniste épris de real démocratie, un type amer-aigri !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    06 h 20, le 07 juillet 2015

  • Vous tapez dans le mille, M Fayad. Le gendre nommé au poste voulu, "les droits des chrétiens" sont atteints et plus de pleurnicherie ni d'"explosion".

    Halim Abou Chacra

    04 h 31, le 07 juillet 2015

  • Il semble plutot que ce sont les droits du General et ceux des membres de sa famille qui sont "spolies".

    Georges Airut

    02 h 58, le 07 juillet 2015

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