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Liban - Environnement

Au Liban, la société civile se mobilise contre les incinérateurs, « source d’émissions cancérigènes »

Le ministre Mohammad Machnouk a assuré que « la décharge de Naamé sera bien fermée le 17 janvier 2015 ».

De gauche à droite sur la tribune : Paul Abi Rached, Fifi Kallab, un représentant du Club de la presse et Fouad Yehia, du Rassemblement de la fermeture de la décharge de Naamé.

En prévision de la fermeture de la décharge de Naamé dans neuf mois (principale décharge du pays), la commission ministérielle chargée d'examiner l'alternative était réunie hier. Les environnementalistes craignent que le débat ne se centre sur le dernier plan directeur du ministère de l'Environnement et du Conseil du développement et de la reconstruction (CDR), datant de 2010, et préconisant l'achat d'incinérateurs pour le traitement des déchets et la production d'électricité (technique appelée « Waste to Energy »). La Coalition civile contre les incinérateurs, un grand rassemblement d'ONG, a donné hier une conférence de presse au Club de la presse pour réitérer son refus des incinérateurs, une « technologie chère et polluante », rappelant au passage que des solutions plus simples sont possibles. Elle presse les responsables de ne pas transformer cette affaire en « nouvelle source de conflit qui menace la sécurité de la société ».


De son côté, et à l'issue de la réunion de la commission ministérielle qui s'est réunie hier sous la présidence du Premier ministre Tammam Salam, le ministre de l'Environnement Mohammad Machnouk a réaffirmé que « la décharge de Naamé sera bien fermée d'ici au 17 janvier 2015, comme prévu ». Sur la réunion elle-même, il a affirmé qu'elle « a été consacrée à l'examen de rapports sur les différentes étapes par lesquelles est passé le problème de la gestion des déchets, les solutions en vue ainsi que les mesures à prendre, au niveau des décrets et des lois ». Et d'ajouter : « Il est clair que cette affaire nécessite un examen plus approfondi et la tenue de nouvelles réunions en vue de discuter des détails techniques. La commission se réunira de nouveau dans quelques jours avant que le dossier ne soit soumis au Conseil des ministres. »
Le ministre Machnouk restait injoignable hier pour répondre aux questions de L'Orient-Le Jour sur la polémique autour des incinérateurs. À noter qu'une réunion a été organisée entre le ministre et les ONG pour discuter des alternatives aux décharges et aux incinérateurs. Selon Raja Noujaim, de l'Association de protection du patrimoine libanais, « la réunion semblait positive et le ministre considère avec sérieux les arguments des ONG ».

 

Des cendres « toxiques »
Dans le communiqué lu par Fifi Kallab, de Byblos Ecologia, à l'issue de la conférence de presse des ONG, la coalition qualifie le plan fondé sur la technologie de l'incinération de « catastrophe sanitaire et écologique ». « Les incinérateurs produisent des cendres toxiques », rappelle Mme Kallab.
Et d'ajouter : « Voilà pourquoi la société civile, dans le cadre de la Coalition civile contre les incinérateurs, rejette une technologie qui produit des cendres toxiques lesquelles, dans les pays européens, sont enfouies dans des décharges spécialisées, notamment en Allemagne et en Norvège, comme on peut le lire dans le rapport de la société de consultants à laquelle l'État a fait appel. »
L'experte rappelle que l'incinération « est la solution la plus chère et la plus compliquée à entretenir, nécessitant des expertises que le Liban ne possède pas ». « La convention de Stockholm (sur les polluants organiques persistants), ratifiée par le Parlement libanais en 2002, stipule que "tous les incinérateurs de déchets sont une source essentielle de dioxine", une matière cancérigène », ajoute-t-elle.

 

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Le « niet » de deux présidents de municipalité
La solution jugée plus durable par les ONG, c'est Paul Abi Rached, président du LEM (Mouvement écologique libanais), qui en a parlé. Ce plan, qui a déjà été soumis aux responsables, se fonde sur la construction d'usines décentralisées pour le tri, le recyclage (environ 30 % des déchets), le compostage (des matières organiques, environ 60 %) et la transformation du reste des ordures en combustible dérivé des déchets (« Refuse Derived Fuel »). « Nous n'aurons ainsi même pas besoin de décharges », dit-il à L'Orient-Le Jour.
Au cours de son intervention, M. Abi Rached a assuré que le plan de la société civile nécessite moins de temps pour être mis en place (un an contre quatre pour les incinérateurs), il a besoin d'un budget plus modeste, génère des bénéfices, car les déchets y sont traités comme des ressources, crée des emplois et a plus de chances d'être accepté par les populations locales.
Sur ce dernier point, l'environnementaliste a montré deux lettres qui lui ont été envoyées par les présidents de deux municipalités de localités pressenties pour accueillir les futurs incinérateurs : celui de Jiyeh (soutenu par 17 autres municipalités de l'Iqlim el-Kharroub) et celui de Deir Ammar (soutenu par la Fédération des municipalités de Minyé). Les deux responsables locaux y affirment leur refus de l'installation d'incinérateurs chez eux.


Interrogé par L'Orient-Le Jour, Georges Azzi, président de la municipalité de Jiyeh, a réitéré son refus catégorique et assuré que « la perspective de l'installation d'un incinérateur dans la localité y provoquerait un soulèvement populaire ». Quant à Ali Matar, président de la municipalité de Zahrani, un autre site suggéré, il a également assuré qu'il rejetait totalement cette idée, et que sa municipalité recherche activement des solutions locales. « Nous avons déjà une centrale électrique dans la région, sans que l'on profite d'heures de courant supplémentaires ; pensent-ils pouvoir nous imposer une autre installation polluante? » nous a-t-il déclaré.

 

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