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Culture - Spectacle

Onirisme et poésie pour une danse expérimentale au masculin

Cinq hommes dansent sous le regard et la férule d'une femme. C'est le groupe germano-français « Mouvoir » chorégraphié par Stéphanie Thiersch sur les planches d'al-Madina. En préambule à la célébration du 10e anniversaire du festival Bipod, un moment de virtuosité corporelle où la ronde des machos a toutes les tendresses, les grincements et les paradoxes du monde contemporain.

La danse, un langage codé et universel... Photo Sami Ayad

Pour sa deuxième visite pour les mordus de la danse contemporaine à Beyrouth, Stephanie Thiersch, formée à l'académie des Medias Arts de Cologne, a choisi le titre de Corps étrangers pour un spectacle expérimental et iconoclaste. Avec une intrusion corsée du monde du cirque, équilibrant, avec un certain brio, grâce des mouvements, harmonie des acrobates et danger des champions des sauts à la corde.
Sur une scène au plancher blanc et presque nu, émerge un personnage échappé à une toile dalinienne. Visage enfoui dans des cordages qui pendouillent des spots au haut du plafond, jeans moulant, pied et torse nus, il a toutes les allures d'un plongeur en scaphandre, venu investiguer et explorer des lieux inconnus. Plongée tonique et surréaliste que le public accueille d'emblée comme une revigorante invitation à une fête inédite... À cette rencontre aveugle, le public se laisse emporter au gré d'une sensualité diffuse, d'une quête à tâtons, d'un défi du conformisme, d'une aventure où il fait bon s'embarquer.
Avec cinq gaillards, tous en jeans près du corps, avec tee-shirt sculptant les abdominaux et les ventres lisses (sauf pour un !), ou exhibant leur plaquette sur des peaux glabres ou velues, alliant prouesses physiques, précisions gestuelles, jongleries adroites et vitalité inépuisable, l'aventure fleure les grandes embardées des safaris impétueux ou les houleuses virées maritimes.
Peu importe le thème ou le sujet traité, tant il est vrai un peu mince et souvent peu perceptible, de cette traversée à rebondissements où l'être humain est confronté à un environnement menaçant, familier, à domestiquer, à dompter, à placer dans un contexte de confort et d'amitié.
Dans cette proximité à l'état de nature (un congénère, une plante, un animal, un objet), les danseurs déploient une amusante panoplie de grimaces, de gestes, de mouvements, de rituels, de tournoiements, de totems construits (à en perdre leur souffle et celui du spectateur) avec leur propre corps, agrippés en hauteur les uns sur les autres. Comme une tour de Pise qu'on craint à chaque instant de voir s'effondrer. C'est ce qui se fait sous les chapiteaux de cirque et c'est probablement ce corps, le premier, qui est étranger à la danse, langage encore un peu figé, codé et universel...
En une vertigineuse mais parfois longue et redondante série de tableaux, les danseurs se frôlent, se chevauchent, se vautrent, tournent, virevoltent comme des toupies et s'attrapent en une joyeuse et parfois brutale mascarade, comme des gamins pris par le collet à la frénésie des jeux.
Humour, poésie, sens du ludique, de la fantaisie, du fantasque, du fantastique et de la bizarrerie pour ce spectacle qui tord le cou aux conventions et aux pas amidonnés. Entre mecs qui s'éclatent, sous la baguette passionnée d'une chorégraphe qui n'a pas froid aux yeux, la danse reste attrayante, mais s'ajoutent et s'imbriquent, en toute subtilité, les scintillements du monde des acrobates et des gymnastes.
On retient avec plaisir ces rituels de la danse vaudoue et indienne, ainsi que ces scènes hilarantes de travestissements (avec des broutilles qui se transforment en accessoires de décoration ou de costumes. Chapeau au travail habile de Sabine Schneider). Côté musique, partition de bruitage captivante signée Emmanuelle Gibello. Du pépiement des oiseaux aux vrombissements des moteurs, en passant par les sonorités les plus insolites ou incongrues ou quelques accords de violoncelle, les danseurs ont donné corps et résonance à chaque note.
C'est dire leur immense talent à captiver la salle qu'ils ont totalement subjuguée. Un joli tour de force. Sans mollesse ni manque de virilité. Biceps et cheveux au vent, chevilles nerveuses et bras de fer, ventres rentrés et fesses cambrées, torses bombés et jambes cavalières, la danse c'est aussi pour les garçons... Un échantillon, dans une version branle-bas sous le chapiteau et sous les feux de la rampe, que les Beyrouthins ont longuement et chaleureusement applaudi.

Pour sa deuxième visite pour les mordus de la danse contemporaine à Beyrouth, Stephanie Thiersch, formée à l'académie des Medias Arts de Cologne, a choisi le titre de Corps étrangers pour un spectacle expérimental et iconoclaste. Avec une intrusion corsée du monde du cirque, équilibrant, avec un certain brio, grâce des mouvements, harmonie des acrobates et danger des champions des sauts...

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