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À La Une - Éclairage

Deux mois difficiles en Syrie... et au Liban

Une source diplomatique des pays du Brics estime que les deux prochains mois devraient être violents en Syrie et incertains au Liban, la scène libanaise étant directement tributaire de ce qui se passe à Damas et dans ses environs. La source diplomatique se base, dans son affirmation, sur la récente visite du chef des renseignements saoudiens et de l’homme fort de l’Arabie saoudite, l’émir Bandar ben Sultan, à Moscou. Selon cette source, cette visite a revêtu une grande importance, même si elle a quasiment abouti à un échec. Selon des rapports diplomatiques cités par cette source, l’émir saoudien a tenté, au cours de ses entretiens avec les responsables russes, dont le président Vladimir Poutine, de convaincre ses interlocuteurs de renoncer à appuyer le régime syrien. Il leur aurait ainsi expliqué que l’Arabie saoudite est en train de reprendre l’initiative dans la région du Moyen-Orient, notamment avec le changement en douceur à la tête du Qatar et la quasi-neutralisation de la diplomatie de l’émirat dans la région, qui dérangeait de plus en plus Riyad, et surtout avec le renversement du pouvoir en Égypte et la mise à l’écart du président issu de la confrérie des Frères musulmans. Autrement dit, le déclin des Frères musulmans dans l’ensemble de la région, de la Tunisie à l’Égypte, en passant par le Qatar et même en Turquie, est en faveur de l’Arabie saoudite qui tient désormais les principaux dossiers de la région. De même, le frère de l’émir Bandar est en poste en Jordanie et fait pression sur le roi Abdallah II pour le contraindre à sortir de sa neutralité vis-à-vis de la Syrie, tout comme l’émir Bandar se considère assez influent en Turquie, qui laisse passer les nouvelles armes envoyées aux rebelles syriens. Il a donc proposé aux responsables russes de renoncer à appuyer le président syrien Bachar el-Assad pour pouvoir trouver ensuite une solution qui arrangerait toutes les parties concernées et tiendrait compte des intérêts de la Russie.


Selon la source du Brics, les dirigeants russes n’auraient pas été convaincus par cette théorie, tout comme d’ailleurs les Européens n’ont pas été non plus convaincus par l’émir Bandar d’armer les rebelles syriens (avant Moscou, il s’était rendu à Berlin et dans d’autres capitales européennes), bien qu’il ait assuré que cette fois les armes n’iraient pas aux extrémistes d’el-Qaëda.


La source diplomatique du Brics estime ainsi que face à l’échec de sa tentative de rallier la Russie et l’Europe à son projet, le puissant émir Bandar aurait décidé de lancer une offensive déterminante en Syrie contre les forces du régime et il aurait annoncé que des résultats significatifs seraient visibles sur le terrain au cours des prochains mois. Il aurait donc décidé de créer un nouvel équilibre des forces sur le terrain en Syrie, en faveur de l’opposition, pour contraindre la Russie et ses alliés à sacrifier Assad dans le cadre de nouvelles négociations internationales. En même temps, l’émir Bandar souhaite mettre en difficulté l’Irak et le Hezbollah qui sont en train d’aider le régime d’Assad. D’où ses instructions aux parties libanaises avec lesquelles il est en contact pour les pousser à refuser tout gouvernement dans lequel participerait le Hezbollah, qui accorderait le tiers de blocage au 8 Mars et à ses alliés, et qui adopterait dans sa déclaration ministérielle la fameuse formule « armée-peuple-résistance ». Même si cela devait retarder la formation d’un nouveau gouvernement, favoriser la multiplication des incidents sécuritaires ou encore pousser vers la formation d’un gouvernement de fait accompli, qui constituerait un nouveau défi et une nouvelle source de problèmes pour le Liban.


La priorité pour l’émir Bandar n’est donc pas aujourd’hui le Liban et son gouvernement, en dépit des efforts déployés par le Premier ministre désigné Tammam Salam, mais la Syrie et la nécessité d’en finir avec le régime d’Assad pour ouvrir la voie à des négociations sérieuses sur l’ensemble de la région. L’émir Bandar profite aussi du fait que les États-Unis se tiennent un peu en retrait dans le dossier syrien, peu soucieux d’une guerre qui pourrait se prolonger, puisque, au final, ils seront là pour les ultimes négociations. N’étant pas en mesure de régler en leur faveur le dossier syrien, les États-Unis laissent donc faire leurs alliés, tout en considérant que cette guerre syrienne est aussi en train d’épuiser leurs rivaux, notamment la Russie et l’Iran.


Pour toutes ces raisons et dans ce contexte complexe, la source diplomatique du Brics précise qu’il faut s’attendre à des mois chauds en Syrie, avec des retombées limitées au Liban, car c’est sur le terrain syrien que se jouent les futures négociations internationales. En même temps, il faut tenir compte du changement en Iran et de la volonté affichée du nouveau président Hassan Rohani de se rendre à La Mecque pour le pèlerinage d’al-Adha, dans un signe d’ouverture évident à l’égard des dirigeants du royaume wahhabite, alors que la situation en Égypte, en dépit de l’appui déclaré de Riyad au nouveau président et de l’aide matérielle qu’elle lui a fournie, reste confuse. C’est dire que les inconnues sont encore nombreuses, et la seule certitude, c’est que c’est le terrain syrien qui décidera de l’issue des préparatifs diplomatiques en cours.

 

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