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À La Une - Evénement

Le Liban flotte, heureux, à Rio

Venus de Jbeil, Saïda et d’autres régions, les jeunes libanais marquent leur présence aux JMJ de Rio.

Fortes d’environ 400 jeunes, les délégations libanaises aux JMJ, divisées en groupes (Saïda, Jbeil, Antélias – délégation centrale – et de petits groupes comme celui de la communauté du Chemin neuf ou des pères jésuites), ont sillonné lundi, avec des centaines de milliers d’autres groupes venus de partout, une Rio en fête avec des rassemblements bariolés à tous les coins de rue. Dans le pays de la samba, la « derbaké » a, bien entendu, su montrer aussi son savoir-faire.
L’un des points focaux des visites est la statue du Sacré-Cœur dominant la magnifique baie de Rio. C’est ainsi que le drapeau libanais a flotté au sommet du Corcovado, du nom du mont sur lequel se dresse la massive statue du Christ-Roi, symbole mondial d’un pays de 193 millions d’habitants, à 63 % catholique.

Jeunes et en short
Lancées par Jean-Paul II, les JMJ sont un moment démonstratif et contagieux de solidarité dans la foi qui répond, défi pour défi, à une perte massive, presque planétaire, du sens du sacré. Et le Liban ne fait pas exception. L’Église sait qu’elle vit en ce moment une période de l’histoire de l’humanité très particulière, avec la mondialisation des échanges et des possibilités uniques de contacts des civilisations les unes avec les autres. Au milieu de ce tohu-bohu des valeurs, les jeunes savent, eux, qu’ils doivent prendre le temps de relire leur histoire personnelle pour lui donner un sens. Pour la plupart, la bonne nouvelle est une personne, le Christ, icône de Dieu. Sachant bien qu’il faut, comme dit Benoît XVI, « d’abord parler à Dieu pour pouvoir parler de Dieu ». D’autres cherchent encore et sont là pour « s’ouvrir à la grâce ».
Il n’est pas sûr qu’ils la trouvent, dans ce pays tropical où toutes les filles sont jeunes et en short, et où parfois l’ambiance est plus celle d’un carnaval que d’une retraite spirituelle. À son départ de Rome, lundi, le pape a demandé aux médias de l’aider dans sa tâche. Avec sa finesse habituelle, il a ajouté que les JMJ « ne sont pas seulement pour les jeunes », mais pour leurs aînés. Il a ainsi subtilement rejeté cette idée d’une ségrégation des jeunes dans une culture qui leur est propre, et qui serait coupée de celle de leurs parents et des valeurs chrétiennes qui les unissent à toute l’Église.

Des anges à Bel Horizonte
Les jeunes Libanais et Libanaises qui participent aux JMJ le savent déjà, dans leur cœur. Le groupe que j’accompagne arrive d’une « mission » à Bel Horizonte, au contact des paroisses locales, qui l’a profondément marqué. Cette étape est partie intrinsèque des JMJ. Elle met les jeunes pèlerins, encadrés par des prêtres, au contact des habitants du pays où se tiennent les Journées, mais pas seulement dans la ville où les principaux événements se tiennent. Nos Libanais, eux, reviennent avec un sentiment ébloui de cinq jours d’accueil à Bel Horizonte, sous la conduite de Mgr Georges Aboujaoudé, évêque maronite de Tripoli et président du Conseil épiscopal pour l’apostolat des laïcs. Dans cette ville brésilienne, leur présence a été comparée, selon sœur Nisrine, une jeune religieuse antonine, à « celle des trois Anges venus annoncer à Abraham et Sarah la promesse d’un enfant ». C’est ainsi que le parfum de l’encens maronite s’est fait sentir dans le ciel brésilien. Dans le car qui traverse Rio, d’autres expriment leurs difficultés à rester dans le climat de recueillement trouvé à Bel Horizonte, au milieu du chahut d’une journée d’excursion où l’exubérance excessive de certains et la frénésie du shopping prennent parfois le dessus.

« Aux frontières de l’humanité »
Les jeunes sont toujours sensibles à qui leur fait confiance. C’était là l’un des points forts de Jean-Paul II. François marche sur ses traces, un peu plus paternel peut-être. Ce « pape du bout du monde » invite les jeunes, « à qui Dieu fait confiance », à aller « aux frontières de l’humanité », vers les couches humaines laissées pour compte par une civilisation matérialiste qui écrase tout sur son passage et ne fait pas de quartier.
« Allez, faites des disciples de toutes les nations », le « grand envoi » en mission du Christ à ses apôtres et disciples est le thème-clé de ces JMJ. Aller aux frontières, c’est d’abord aller au bout de sa propre zone de confort pour protéger les droits des exclus, des marginalisés, des prisonniers, pour créer un monde plus fraternel. Nous savons que la faim et la soif de justice n’attendent pas, a lancé François, accueilli lundi par la présidente brésilienne. La phrase pourrait servir d’avertissement au chef de l’État brésilien. On sait bien que l’exigence de justice et de dignité, notamment dans le domaine des transports, et les dépenses jugées excessives faites en prévision du Mondial de football et des Jeux olympiques de 2014, ont poussé dans la rue, en juin, des centaines de milliers de Brésiliens. Aux grandes causes de la justice, l’Église doit toujours répondre présent. Aller aux frontières, c’est aussi pour les jeunes aller au bout de leurs propres convictions, dans l’assurance que le Christ les y attend, et qu’il ne les décevra pas.

Rivalité entre les Églises ?
Une dernière remarque s’impose, avec l’ouverture des JMJ aujourd’hui. Quelques jours avant de renoncer à sa charge, Benoît XVI, que François a été saluer avant son départ pour Rio, s’était exprimé sur Vatican II en affirmant qu’il y avait eu deux conciles, celui des médias et celui de la foi. Le monde a perçu Vatican II « à travers les médias », a-t-il fait observer. Et alors que « le Concile des Pères se réalisait à l’intérieur de la foi », celui des journalistes « se réalisait à l’intérieur des catégories des médias d’aujourd’hui », c’est-à-dire dans une herméneutique « politique “qui voyait une” lutte de pouvoir entre les divers courants dans l’Église ».
Cette dichotomie se renouvelle aujourd’hui avec les JMJ. La presse souligne à l’envi que l’Église catholique au Brésil perd du terrain face aux Églises évangéliques. Il s’agirait cette fois d’une « lutte de pouvoir au sein du Christianisme ». Mais il faut garder à l’esprit que cette approche est anachronique et ne rend compte que très superficiellement de la réalité. Il est notoire, en effet, que les feux de paille du « télévangélisme » ne durent pas longtemps. Par ailleurs, l’Église catholique a toujours su « retenir ce qui est bon » de ce qui se passe ailleurs. Mais tout comme elle pourrait être encouragée à une pastorale moins méfiante des charismes, elle sait aussi qu’elle est gardienne d’un « dépôt », d’une tradition indispensable aux archipels des Églises évangéliques. En fait, les Églises de toutes les dénominations avancent désormais vers un « œcuménisme de convergence » qui pourrait parfois connaître des haltes, ou d’apparentes régressions, mais qui ne refera jamais plus marche arrière.

 

 

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