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À La Une - L’éditorial de Issa GORAIEB

Au feu !

Quoi de plus dangereux qu’un pyromane ? C’est un pyromane qui pousse le vice jusqu’à jouer à mettre le feu à sa propre maison. J’écris bien le vice et non l’inconscience, car la milice sait très bien ce qu’elle fait. Et pour le compte de qui elle se croit tenue de le faire, même si elle en mesure parfaitement les risques.

 

La fragile maison a déjà eu droit pourtant, et même plus qu’à son tour, à ce genre particulièrement cuisant de baptême du feu. Il n’est plus question cette fois, comme en 2006, d’embarquer d’autorité le pays tout entier dans une confrontation aussi inégale que dévastatrice avec Israël, lestement promue en divine victoire. Et l’on nous jure qu’il n’est pas question non plus de retourner le fusil contre les rivaux politiques de l’intérieur, comme en 2007. Du dernier et stupéfiant discours de Hassan Nasrallah, il ressort même que le meilleur moyen d’éviter la guerre civile au Liban, c’est, pour les uns et les autres, d’aller se la faire en Syrie !

 

Du moins le chef du Hezbollah a-t-il enfin joué cartes sur table et avoué ce qui fut longtemps inavouable. Ainsi, ce n’est plus pour défendre le site religieux chiite de saydé Zeinab, ou encore des localités syriennes peuplées de Libanais, qu’il envoie ses hommes combattre de l’autre côté de la frontière. C’est bel et bien par solidarité active, agissante, avec un allié qui protège les arrières de la résistance, a-t-il admis. Mais c’est aussi, a-t-il cru bon d’enchaîner, pour épargner à tous les Libanais sans discrimination un afflux sur leur territoire des hordes d’islamistes syriens. Voilà sans doute ce qui s’appelle combattre le feu par le feu...

 

Or, c’est perdre de vue que le feu peut au contraire appeler le feu, que d’ailleurs celui-ci est déjà dans la place et que toutes ces outrances ne font en réalité que l’entretenir, que l’aviver. Les affrontements quasi endémiques de Tripoli, les tirs de roquettes qui ont visé dimanche la banlieue sud de Beyrouth et la ville de Hermel, l’agression meurtrière contre une position de l’armée hier à Ersal et une foule d’autres foyers de tension en sont l’angoissante preuve. Et comme si tout cela n’était pas encore assez, voici que les rebelles syriens invoquent le droit de poursuite pour menacer de frapper le Hezbollah au cœur même de son sanctuaire libanais.


Reste à constater que tout compte fait, et bien qu’en veine de confidences, Hassan Nasrallah n’a pas tout dit . Les pertes considérables essuyées par la milice montrent clairement en effet que dans la féroce bataille de Qousseir, c’est un rôle de pointe, et non de simple auxiliaire, qui a été assigné au Hezbollah par ses patrons iraniens. Est-ce à dire que le régime de Damas est à court de chair à canon, que les unités fiables de l’armée sont sollicitées depuis trop longtemps et sur beaucoup trop de fronts, alors que sont consignées sans munitions, dans leurs casernes, celles dont la loyauté est sujette à caution?


Une chose est sûre, et l’engagement massif du Hezbollah en est lui-même l’illustration la plus éloquente : naguère joueur de premier plan sur la scène régionale, la Syrie des Assad n’est plus qu’un sanglant terrain de jeux.


Issa Goraieb
igor@lorient-lejour.com.lb

Quoi de plus dangereux qu’un pyromane ? C’est un pyromane qui pousse le vice jusqu’à jouer à mettre le feu à sa propre maison. J’écris bien le vice et non l’inconscience, car la milice sait très bien ce qu’elle fait. Et pour le compte de qui elle se croit tenue de le faire, même si elle en mesure parfaitement les risques.
 
La fragile maison a déjà eu droit pourtant, et même...

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