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Culture - Focus

Sur le ring, Dimitri Haddad vs l’appareil photo analogique

Le jeune photographe expose son travail à la galerie Art Lab jusqu'au 28 février. Au-delà des clichés, c'est une intéressante recherche personnelle, qui laisse augurer d'autres volets à venir.

«Aussitôt l’ordinateur éteint, la solitude me submerge. »

Il est jeune, Dimitri Haddad. «Mais aux âmes bien nées, la valeur n'attend point la valeur des années.» À 22 ans, il a déjà terminé des études à l'Alba, exposé deux fois à Beirut Art Fair, poursuivi un atelier de photos documentaire, avant d'entamer un master à Madrid de photo d'art. Ses travaux photographiques naissent toujours d'une démarche artistique à l'aspect social, psychologique et même philosophique. Dimitri Haddad ne s'arrête pas seulement au simple cliché beau, lisse et peaufiné. Ce qui l'intéresse, c'est l'image qu'il étudie sous tous ses angles afin de susciter des questionnements, voire une sorte de gêne, chez le spectateur. «Ce travail en marche est une rupture avec mon ancien style, puisque c'est la première fois que je tourne la caméra vers moi.»

 

Sans retouches et sans recherche esthétique ?
Tentative de créer est le nom que porte l'exposition. En entrant dans la galerie ART Lab, une chose frappe le visiteur d'emblée: la photo, de format carré, à l'instar de celle des réseaux sociaux Facebook et Instagram, est loin d'être esthétique. On y voit des visages déformés, parfois nichés au coin de la photo, des gros plans et d'autres irréguliers. Qu'a voulu exactement créer ce jeune photographe? «J'ai voulu documenter ma famille et moi-même et créer un album familial, alors que cette démarche est en passe de devenir désuète.»

 

Réel et virtuel dans les vapeurs du flou
«Le flou est volontaire, assène le photographe. Cet album familial créé à l'ère du digital sort de mon ordinateur, outil précieux que j'ai fait trôner en star devant le mur de la galerie. Une première partie du projet, exposée actuellement, porte sur ma cellule familiale. Celle avec qui je connecte quotidiennement. Résidant à l'étranger, mes relations avec ma famille se font par écran interposé, comme c'est le cas pour tant d'autres Libanais. Mais aussitôt l'ordinateur éteint, la solitude me submerge. Ce contact virtuel, engendré par le programme Skype pour combler un manque et raccourcir les distances, ne remplace pas le tactile et ne fait que renforcer le sentiment d'éloignement. »

 

L'ordinateur, ce manipulateur ?
Dimitri Haddad ne manipule rien. Les photos sont des screen-shots pris sur le vif en toute spontanéité. «Mes parents ne se rendaient pas compte que je les photographiais», dit il. «Il y a dans ce lag une partie de l'écran qui fonctionne toujours en réel et l'autre dans le passé. J'ai trié des centaines de photos et j'en ai fait un album. J'observe sans qu'on ne m'observe. D'autre part, je me suis filmé moi-même en écoutant leurs conversations.»

 

Recherche inaboutie
Si ce travail traite de deux sujets, se questionner sur le rôle de chaque membre d'une famille et sur le rôle de l'appareil photo, il y a par ailleurs un thème sous-jacent qui porte sur l'histoire de cet appareil lui-même. «L'appareil photo analogique et tout ce qu'il suppose comme archives est-il mort?» s'interroge alors l'artiste. «Pour moi, créer une image à partir d'un papier relève de la magie.» Nous portons tous nos photos sur notre téléphone mobile. S'il arrive à se perdre, cela signifie-t-il qu'on a perdu toute notre mémoire?
Une route parallèle qu'emprunte cette exposition et qui donne à réfléchir.

 

 

Il est jeune, Dimitri Haddad. «Mais aux âmes bien nées, la valeur n'attend point la valeur des années.» À 22 ans, il a déjà terminé des études à l'Alba, exposé deux fois à Beirut Art Fair, poursuivi un atelier de photos documentaire, avant d'entamer un master à Madrid de photo d'art. Ses travaux photographiques naissent toujours d'une démarche artistique à l'aspect social,...

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