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Culture - Exposition

Remettre les pendules à l’heure

L'Heure Bleue vient de s'ouvrir à l'art contemporain en lui consacrant une salle attitrée. Le clou de l'expo ? Un cercueil.

« Les Martyrs » par Alexandra Baduy.

Amour de l'art, spéculations financières ? Toujours est-il que les galeries consacrées à l'art contemporain et moderne ne cessent d'éclore dans la capitale libanaise. L'une des dernières en date est nichée dans une boutique d'objets décoratifs sis à Achrafieh, L'Heure Bleue, qui a inauguré un espace à la première exposition intitulée Beirut Mixed Feelings. L'élégante nouvelle entrée du magasin regroupe une vingtaine d'œuvres hétéroclites, tant dans le médium utilisé, la forme ou le fond. Au départ, l'exposition devait mettre en avant le talent des graffeurs libanais, puis le spectre s'est finalement élargi à la photographie, au dessin, à la peinture et à la sculpture à propos de différents sujets.

Sans but réel
La propriétaire des lieux, Elda Charaoui, avoue avoir lâché prise face au poids trop important que représente la mise en place d'une exposition. La communication avec les artistes n'aurait pas tous les jours été facile. « Ils vous disent d'abord oui, puis non, et enfin peut-être. Je n'ai pas le souffle pour ça », explique-t-elle mi-agacée, mi-résignée. Afin de mener son projet à bout, elle a donc demandé de l'aide à la jeune Yasmeen Farah, artiste talentueuse, dont les photographies se trouvent également exposées ici. À cette occasion, la galeriste a réuni d'anciennes œuvres qu'elle appréciait (trois dessins de Mouna Bassili Sehnaoui notamment), mais a également lancé des commandes spécifiques à de jeunes artistes. Elle leur a parfois imposé un matériau (du bois de tonneaux à vin pour Lora Chouery, des barils pour Georges Khoury, alias Phat2), mais le tout a été orchestré sans véritable ligne directrice, simplement pour l'expérience, par curiosité.
La collaboration entre Élie Zaarour, alias Zed, et George Tabatadze, alias Taz, aura permis de voir naître des œuvres qui plaisent particulièrement à Elda Charaoui. Surtout La barque de l'éternel retour, un cercueil dont elle a fait la commande aux artistes, considérant qu'il s'agit du « clou de l'exposition ». L'œuvre surprend, d'autant plus qu'elle trône au milieu de la salle. À l'intérieur de ce cercueil bleuté, des dizaines de poupées d'enfance que sa mère lui a offertes en revenant de « chacun de ses voyages ». « Cette œuvre est pleine de symbolisme, de mysticisme. On peut imaginer que c'est l'enfance qu'on enterre lorsqu'on passe à l'âge adulte », explique l'amatrice d'art qui se verrait bien, un jour, enterrée dans cette œuvre d'art. Si le clergé n'y voit pas d'inconvénients...

Faire-valoir
L'exposition n'ayant pas un sujet unique, le terme générique Beirut Mixed Feelings s'est donc imposé a posteriori. « Nous aimons cette ville tout en la détestant, les pires odeurs y côtoient des odeurs superbes », justifie la passionnée d'art. Les artistes Alexandra Baduy, Yasmeen Farah, Alexandre Khoury et Mohammad Ayyad Mhanna (alias MOE) proposent chacun sa vision du Liban. Un thème déjà bien exploré – et exploité – par tellement d'artistes auparavant que la nouveauté fait malheureusement défaut. Les peintures colorées de Kim Andrea Stockinger dialoguent (ou pas) avec des toiles qui placent le spectateur face à la mort, la guerre ou la solitude. À la recherche d'une certaine cohérence dans cette « makhlouta » ? Impossible. Il n'y en a pas. Beirut Mixed Feelings laisse cette impression (bleue) de talents additionnés à la va-vite sans penser leurs antagonismes et leurs relations. Le risque? Que l'art contemporain se transforme ainsi en simple faire-valoir. Il faudrait donc pour une prochaine exposition remettre les pendules à l'heure, côté thématique.
Reste que les nouveaux talents auront désormais un nouveau lieu à investir, un public plus large pourra donc les découvrir. Rien que pour cela, y faut faire le détour.

B. L.

*L'Heure Bleue, 108 rue Sursock, Achrafieh, Beyrouth. Ouvert de 11h à 18h, du lundi au samedi, jusqu'au 5 janvier 2016.

Amour de l'art, spéculations financières ? Toujours est-il que les galeries consacrées à l'art contemporain et moderne ne cessent d'éclore dans la capitale libanaise. L'une des dernières en date est nichée dans une boutique d'objets décoratifs sis à Achrafieh, L'Heure Bleue, qui a inauguré un espace à la première exposition intitulée Beirut Mixed Feelings. L'élégante nouvelle...
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