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Moyen Orient et Monde - Égypte / Législatives

Sissi, vedette incontournable de la campagne

Selon les experts, le Parlement qui sortira des urnes ne sera qu'une chambre d'enregistrement pour les décisions du président.

À Qena, une bourgade à 650 km au sud du Caire, une foule dense se presse pour écouter un candidat aux législatives chanter les louanges du président Abdel Fattah al-Sissi. Khaled Desouki/AFP

Une foule dense en djellabas colorées et turbans blancs se presse pour écouter un candidat chanter les louanges du président Abdel Fattah al-Sissi : à Qena, comme ailleurs en Égypte, l'issue des législatives du 17 octobre ne fait guère de doute. L'homme fort de l'Égypte devrait en effet sortir renforcé de ce scrutin qui se déroulera sur un mois et demi, jusqu'au 2 décembre. Le Parlement qui en sortira ne devrait être, selon les observateurs, qu'une chambre d'enregistrement pour les décisions de M. Sissi, qui a annihilé toute opposition depuis la destitution de son prédécesseur islamiste, Mohammad Morsi.
« Nous voulons un Parlement fort qui aide le président à accomplir ses projets pour développer le pays », tonne Moustapha Bakri sur l'estrade dressée à Qena, une bourgade à 650 km au sud du Caire. Ce journaliste de renom est candidat sous l'étiquette « Pour l'amour de l'Égypte », la principale coalition en course pour les législatives. Massés sur des chaises en fer dans une rue bordée de petits immeubles en briques rouges, des milliers de curieux, une grande majorité d'hommes, écoutent d'une oreille distraite M. Bakri et une dizaine de membres de sa liste. Venu les soutenir, Mohammad el-Tayeb, comptable de 23 ans, ne cache pas son enthousiasme quand on lui parle de M. Sissi : « Cet homme a réparé le pays. Depuis qu'il est au pouvoir, on a vu la différence ! »
Pour les experts, le futur Parlement sera dominé par des députés fidèles au président Sissi, l'ex-chef de l'armée qui a destitué en juillet 2013 Mohammad Morsi. Ce dernier était le premier président élu démocratiquement en Égypte, un an après la révolte populaire de 2011 qui renversa Hosni Moubarak, le « raïs » qui régna 30 années sur le pays le plus peuplé du monde arabe.

Sans les Frères musulmans
Un mois après la destitution de M. Morsi, policiers et soldats tuaient en quelques semaines plus de 1 400 manifestants réclamant son retour. Des dizaines de milliers de partisans de sa confrérie des Frères musulmans ont été emprisonnés depuis, et des centaines, dont M. Morsi lui-même, condamnés à mort dans des procès de masse expéditifs, dénoncés par l'Onu. Après les islamistes, le pouvoir s'est attaqué aux mouvements de la jeunesse laïque révolutionnaire de 2011, dont plusieurs figures sont derrière les barreaux. Et, en mai 2014, M. Sissi a été élu président sans coup férir. C'est dans ce même contexte que des coalitions composées exclusivement de partis pro-Sissi et des candidats « indépendants » – massivement partisans du nouveau raïs – se disputeront les 596 sièges du Parlement dans un scrutin très complexe, de liste et uninominal. Les Frères musulmans, qui avaient remporté toutes les élections après la chute de Moubarak, ont été interdits par les autorités, et les mouvements libéraux, réprimés et mal organisés, boycotteront ou seront faiblement représentés.
« Le président n'aura aucun problème avec le Parlement, car toutes les coalitions le soutiennent », affirme Mustapha Kamel al-Sayyid, professeur de sciences politiques à l'Université du Caire. « Toutes ont fait la course pour rallier les anciens membres du Parti national démocrate (PND) », la formation dissoute de Moubarak, explique-t-il. Car, sous le règne de Moubarak, marqué par des scrutins entachés de fraude, les députés du PND dominaient le Parlement en s'appuyant sur les solidarités tribales et le clientélisme.

Anciens soutiens de Moubarak
Pour l'amour de l'Égypte, qui regroupe des partis de centre-droit, des hommes d'affaires, des ex-ministres, mais aussi des anciens membres du PND, entend contrôler les deux tiers de l'Assemblée « pour que le bloc majoritaire soutienne le président », explique M. Bakri. L'autre coalition pro-Sissi qui pèse lourd est le Front égyptien, conduit par le parti d'Ahmad Chafiq, le dernier Premier ministre de Moubarak. Pour le politologue Hazem Hosni, le Parlement « ne sera pas suffisamment fort pour demander des comptes au président ou ouvrir certains dossiers sensibles, comme le rôle de l'armée dans la vie publique ou la politique étrangère. On lui laissera quelques questions marginales à discuter, pour l'occuper ».
Le parti salafiste al-Nour – qui avait soutenu l'éviction de M. Morsi – sera le seul parti islamiste en lice, mais il est ouvertement pro-Sissi. Quant aux partis laïcs et de gauche, « leurs chances sont très faibles », reconnaît Khaled Daoud, figure de l'opposition. Ces formations ne présentent pas de listes, et seulement une centaine de candidats au scrutin uninominal.

Tony Gamal-Gabriel/AFP

Une foule dense en djellabas colorées et turbans blancs se presse pour écouter un candidat chanter les louanges du président Abdel Fattah al-Sissi : à Qena, comme ailleurs en Égypte, l'issue des législatives du 17 octobre ne fait guère de doute. L'homme fort de l'Égypte devrait en effet sortir renforcé de ce scrutin qui se déroulera sur un mois et demi, jusqu'au 2 décembre. Le...

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