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Moyen Orient et Monde - Analyse

La diplomatie russe cultive l’ambiguïté en Syrie

Moscou affirme rechercher la paix, mais livre des armes au pouvoir.
Si Bachar el-Assad réussit à se maintenir au pouvoir plus de deux ans après le début du conflit syrien, il le doit en grande partie au soutien diplomatique et militaire de la Russie dont l’ambiguïté suscite une défiance croissante chez les Occidentaux. La Russie travaille avec les États-Unis à la convocation d’une conférence de paix qui amènerait toutes les parties à la table des négociations. Mais, parallèlement, des informations concernant des contacts entre Moscou et l’opposition syrienne, la promesse de livrer à Damas des missiles pouvant changer la donne sur le terrain et les informations selon lesquelles la Russie entraîne l’armée syrienne brouillent le message.
« Notre plus grande crainte est de nous faire avoir par les Russes », dit un responsable français, sous le sceau de l’anonymat. La Russie affirme qu’elle est motivée par le désir de faire cesser les combats et non par celui de préserver les intérêts militaires et industriels d’un de ses derniers alliés au Proche-Orient. « Notre position à ce stade est de faire cesser le bain de sang et la souffrance, et c’est le fondement de tous les efforts liés à la résolution de la crise syrienne », dit un membre du ministère russe des Affaires étrangères ayant requis l’anonymat. « Nous ne sommes pas en train de choisir les candidats pour le futur gouvernement de transition. Nous ne soutenons aucune des forces qui le constituera », assure-t-il.
Si tant est que la diplomatie passée serve de référence, Moscou va sans doute chercher à mettre autour de la table des négociations des membres modérés de l’opposition qui font partie du système politique très contrôlé mis en place par Bachar el-Assad, tout en exploitant les divisions de ses opposants. « Tout doit être fait pour convaincre l’opposition de s’asseoir à la table des négociations sans préalable, puisque la pleine représentation de tous les groupes d’opposition syrienne, y compris l’opposition interne syrienne, est garantie », a déclaré la semaine dernière le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov.
Moscou a eu plusieurs séries de discussions avec Hassan Abdel Azim et sa Commission de coordination nationale pour le changement démocratique, que les rebelles considèrent comme plus ou moins acquis à Bachar el-Assad. Le représentant du groupe hors de la Syrie, Haïsam Manna, n’a pas souhaité commenter. Le Kremlin a également tenté de présenter le vice-Premier ministre Kadri Jamil, qui parle russe, comme un membre de l’opposition. Ce dernier s’est rendu plusieurs fois en Russie l’an dernier pour la conclusion d’un accord dans le domaine de l’énergie. « On est à un point où Moscou sait qu’Assad n’est plus un choix. Simplement, la Russie veut des gens qui conserveront quelque chose des liens anciens », dit Mahmoud al-Hamza, membre de l’Armée syrienne libre.
Tout en niant soutenir le régime baassiste, la Russie lui a fourni des radars, lui promet des missiles sol-air S-300 et dit vouloir respecter un contrat pour 12 chasseurs MiG-29MM2. Les informations sur les livraisons d’armes et les manœuvres maritimes, souvent contradictoires et ambiguës, visent sans doute à renforcer la position de la Russie dans ses négociations avec l’Occident. « Tout ce qui se passe autour de la Syrie est moins lié aux promesses faites à Assad personnellement qu’au jeu de pouvoir entre la Russie et l’Occident. Et, pour la Russie, ça veut dire maintenir les choses sur la voie diplomatique », estime Fiodor Loukianov, du magazine Russia in Global Affairs. Les S-300 ne devraient pas être livrés avant l’automne, mais les choses pourraient s’accélérer ou au contraire être gelées en fonction de ce que feront les puissances occidentales, dit-on de source proche de l’industrie de l’armement. « À ce stade, tout peut être exploité pour marchander », confirme Fiodor Loukianov.

©Reuters
Si Bachar el-Assad réussit à se maintenir au pouvoir plus de deux ans après le début du conflit syrien, il le doit en grande partie au soutien diplomatique et militaire de la Russie dont l’ambiguïté suscite une défiance croissante chez les Occidentaux. La Russie travaille avec les États-Unis à la convocation d’une conférence de paix qui amènerait toutes les parties à la table des...

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