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Actualités - CHRONOLOGIE

Photographie Jocelyne Saab, regards croisés Colette KHALAF

« Sense, Icons and Sensitivity » est un travail photographique signé Jocelyne Saab, présenté, simultanément, à= la Planète de la découverte, à la galerie Agial* et au festival Imagini Donna, à Florence. L’Orient et l’Occident qui se séduisent et se rejettent. Tel est le thème de la journaliste, reporter et cinéaste Jocelyne Saab, qui a voulu marquer son come-back au Liban par cette exposition d’une centaine de photographies, Digital Laser C-print (75 cm x 100 cm). Pourquoi la photo après le cinéma et les images en action ? Parce que tout simplement « l’art plastique est pluridisciplinaire, dit Jocelyne Saab. D’ailleurs, je tenais à ce que cette grande installation ait d’abord lieu au Liban. » Un travail qui se nourrit du passé de l’artiste (études d’économie, formation de journaliste et de documentariste, voyages aux quatre coins du monde, entre autres), de son présent en devenir, ainsi que de son esprit épris de liberté pour « proposer une pensée d’artiste et prouver que ce dernier a droit de cité ». Une démarche qui a nécessité plus d’un an de travail articulé sur le thème des rapports de séduction et de rejet de l’Orient et de l’Occident. « L’orientalisme, c’est l’image déformée que l’Occident s’est fait de l’Orient pour pouvoir mieux se le représenter, se définir et le dominer », dit Edward Saïd. « De là cette propension à associer l’Orient à tous les clichés que l’on connaît, notamment l’irrationalité, le tribalisme, la danse du ventre, Ali Baba et Aladin. L’Orient est-il, de son côté, innocent de tout regard déformé par rapport à cet Occident qui le fascine et qu’il rejette aujourd’hui ? Ne compose-t-il pas lui aussi des représentations, clichés de l’Occident, comme l’a fait l’orientalisme ? » poursuit-il. C’est à partir de ce constat d’Edward Saïd que la photographe plasticienne (toujours aussi indépendante) a construit sa réflexion et fait déambuler son regard pour en tirer des images abstraites et épurées, d’une part, bouillonnantes malgré leur noirceur, de l’autre. Au service de la lumière C’est le grand espace de la Planète de la découverte (délibérément choisi par Jocelyne Saab) qui permet cette promenade et donc ces flâneries de l’esprit. Au départ, deux icônes: l’Arabe en djellabiah pour l’Orient et la poupée Barbie blondasse à souhait pour l’Occident. Deux protagonistes sur l’échiquier du monde et deux acteurs principaux sur l’aire de travail de Saab. Leurs jeux d’attraction et de répulsion, illustrés par de nombreux petits objets parsemés sur des espaces choisis, se déclinent en images sociopolitiques et souvent humoristiques. L’artiste a privilégié l’humour à la simple critique. C’est dans les ruelles poussiéreuses et les marchés aux puces des grandes capitales arabes que la photographe-cinéaste a choisi ses personnages. Après avoir fouillé, fouiné, sélectionné, elle a réussi à en extirper l’essence : Saddam Hussein et Nasser se mêlant à Coca-Cola et à Barbie ; des images populaires, religieuses, mises apparemment en vrac mais sous-tendues par une maîtrise efficace d’une pensée et, par ailleurs, un espace scénique, un décor naturel où se déploie une véritable narration, tout comme un story-board d’un film. Dans ce foisonnement de figurines où le réel se mêle à l’imaginaire et où le passé est recomposé dans un cadre artistique novateur, « du néo pop art », dira-t-elle, Jocelyne Saab remet la casquette de metteur en scène. C’est elle qui est aux commandes de cette formidable mise en scène vivante et dynamique. Sur fond de légendes et de contes populaires, elle réussit à suivre le fil (toujours présent dans ses photos comme un cordon ombilical), à le tordre et à le distordre sans jamais le rompre. Double regard Si, d’une part, « Sense, icons and Sensitivity » décrypte le regard de l’Orient sur lui-même et sur l’Occident après le 11-Septembre, tout en revisitant les icônes, le travail photographique s’articule également sur une quête naturelle de fond et de forme. Dans une autre série de photos semblables à de la peinture abstraite, Jocelyne Saab jette l’éclairage sur la sensualité de l’Orient. À travers les tissus et les toiles (matériaux vivants), l’artiste redessine à la fois les contours du désert et le grain de la peau. À l’ombre de cette lumière qu’elle magnifie à loisir, la photographe affûte son regard et capte l’indicible. Sous son objectif (et sans aucune mise en scène), la lumière est simple actrice. Elle s’impose pour mettre en évidence un Orient fait de contrastes, de tabous et d’errances. Cette lumière, Saab l’a puisée dans les toiles de la Renaissance, de Turner ou de l’Américain James Turrell. Dans ce regard qu’elle jette sur le monde, Jocelyne Saab traduit sa quête intime et personnelle de la place de l’homme dans l’univers. Une recherche en continuité de son travail. À la Planète de la découverte et à la galerie Agial jusqu’au 29 novembre 2008. Tél. : 01/345213.
« Sense, Icons and Sensitivity » est un travail photographique signé Jocelyne Saab, présenté, simultanément, à= la Planète de la découverte, à la galerie Agial* et au festival Imagini Donna, à Florence.
L’Orient et l’Occident qui se séduisent et se rejettent. Tel est le thème de la journaliste, reporter et cinéaste Jocelyne Saab, qui a voulu marquer son come-back au Liban par...