Actualités - REPORTAGE
Guide des métiers - Quelle carrière ? Quelle université ? Quelles études ?
le 22 janvier 2004 à 00h00
Une des préoccupations majeures des élèves des classes secondaires concerne leur orientation professionnelle. Quelle carrière embrasser ? Quelles études entreprendre ? Quelle université choisir ? Quels débouchés espérer dans telle ou telle carrière ? Ont-ils réellement un avenir dans ce pays ? Quel sera leur salaire de départ ? La profession envisagée correspond-elle réellement à leur attente, à leur motivation, à leur profil personnel ? Quels sont les contraintes, les difficultés ou les aspects positifs des différentes carrières envisageables ? Les questions qu’ils se posent sur ce plan sont nombreuses et souvent sans réponses. Au terme de leur scolarisation, ceux qui ne partent pas poursuivre leurs études à l’étranger se lancent sur place dans des études, parfois par passion, souvent sans grande conviction, rien que pour avoir en poche un diplôme qui les mettra à l’abri du besoin. Mais une fois ce diplôme obtenu, les désillusions sont grandes : les emplois sont rares et les salaires dérisoires. Et pour cause, dans ce pays où le chômage va en s’accentuant, nombreuses sont les carrières saturées et les horizons bouchés. Les jeunes sont ainsi poussés à l’émigration ou à l’expatriation, à la recherche d’emplois plus gratifiants. Dans cette situation pour le moins pénible, non seulement pour une jeunesse désabusée mais aussi pour des parents à bout de souffle, certaines opportunités sont pourtant à saisir. Quelques nouveaux métiers semblent émerger dans un marché local en évolution qui cherche, tant bien que mal, à s’adapter à la crise. Désormais, il n’est plus question pour les étudiants de se limiter aux carrières traditionnelles de plus en plus saturées, notamment la médecine, le génie ou le droit, sans avoir réfléchi au préalable aux spécialisations, de préférence nouvelles, que le marché pourrait englober. Dans les écoles, l’orientation professionnelle prend forme et s’organise, afin de donner aux élèves la possibilité de choisir leur profession de manière rationnelle et réfléchie. On ne se contente plus de vouloir se lancer dans le génie civil, comme la tradition familiale l’exige, on se tourne plutôt vers le génie environnemental ou le génie informatique. On ne se limite plus à la gestion des entreprises, on préfère embrasser des études d’informatique de gestion. Aujourd’hui, certes, la spécialisation est un atout de taille, mais la polyvalence est de plus en plus recherchée. Une polyvalence qui permet à l’étudiant fraîchement diplômé de rechercher un emploi dans plus d’un domaine. Pour aider les élèves du secondaire à une meilleure orientation professionnelle, nous publions, à partir d’aujourd’hui, une rubrique hebdomadaire baptisée « Guide des métiers », dans laquelle nous parlerons chaque fois d’une profession, de la formation y relative dans les grandes universités du pays, ainsi que des débouchés au Liban. Pour ce faire, nous aurons recours non seulement aux différentes universités, mais aussi aux étudiants eux-mêmes ainsi qu’à des professionnels qui relateront leur propre expérience, tout en abordant les difficultés rencontrées dans l’exercice de leur métier mais aussi les satisfactions qu’ils en tirent. Nous espérons que cette rubrique profitera pleinement à nos jeunes lecteurs, à leurs parents et éducateurs, et les invitons à nous communiquer leurs commentaires, leurs attentes et leurs suggestions sur ce plan.
Des salaires mensuels moyens variant entre 500 et 3 000 dollars
L’informatique de gestion, une polyvalence
qui répond aux besoins du marché
Symbole de la polyvalence par excellence, l’informatique de gestion, formation universitaire importée de France, s’implante au Liban, dans les universités francophones aussi bien qu’anglophones. Menant à la fois aux métiers de l’informatique et de la gestion des entreprises, elle offre un large éventail d’emplois potentiels dans les banques, les sociétés commerciales, l’assurance, ainsi que dans les entreprises d’informatique. Emplois qui se présentent rapidement à l’étudiant, au terme d’une licence ou d’un mastère, parfois même avant la fin de ses études, tant sur le marché local que dans les pays arabes. Si les salaires de départ varient entre 500 et 800 dollars par mois, les possibilités d’avancement sont réelles et intéressantes, notamment au bout de quelques années d’expérience. Tour d’horizon d’une formation qui attire chaque année davantage d’adeptes caressant l’ambition de devenir cadres supérieurs.
La formation en informatique de gestion a vu le jour au Liban il y a une vingtaine d’années, à l’Institut de gestion des entreprises (IGE) de l’USJ. Inspirée d’un diplôme français baptisé Miage, elle consiste dans l’étude des méthodes informatiques appliquées à la gestion des entreprises. « C’est une formation polyvalente qui comporte autant d’informatique que de gestion et qui représente désormais un important créneau sur le marché de l’emploi. Car les débouchés sont nombreux dans les entreprises locales comme à l’étranger », explique Philippe Fattal, directeur de l’IGE. « Ainsi, précise-t-il, l’informatique, les statistiques et la programmation sont enseignées à l’étudiant au même titre que le management, le marketing, l’anglais ou la comptabilité. Les stages sont obligatoires et permettent d’appliquer les notions reçues ».
Un degré de satisfaction
élevé
Forte de son expérience, l’USJ est la seule université francophone du pays à proposer cette formation, délivrant, selon le système de crédits européen ECTS, une licence, un mastère et un doctorat. Mais depuis quatre ans, deux grands établissements anglophones, l’Université Notre-Dame de Louaïzé (NDU) et l’Université de Balamand, ont lancé ce cursus, pour répondre à la demande du marché. « Nous étions constamment sollicités par des entreprises qui nous demandaient de les mettre en contact avec des étudiants ayant à la fois une formation en informatique, en management, en comptabilité, en marketing et en gestion », indique Fawzi Baroud, directeur du département de sciences informatiques à la NDU. « Les élèves diplômés qui travaillent nous font d’ailleurs part de leur satisfaction quant à la solidité de leur formation », ajoute-t-il. De son côté, le directeur du département des sciences informatiques de l’Université de Balamand, Hanna Greige, précise que « cette polyvalence que donne l’informatique de gestion est d’autant plus recherchée au Liban que la technologie informatique y est peu développée ». Et d’ajouter : « Cette formation n’est pas seulement appréciée sur le marché local, mais aussi dans les pays arabes qui emploient une grande partie de nos étudiants fraîchement diplômés ».
Par ailleurs, d’autres universités, comme l’Université américaine de Beyrouth (AUB), la Lebanese American University (LAU) et l’Université Haïgazian, n’ayant pas encore adopté cette formation en tant que telle, semblent prendre conscience de l’importance de la polyvalence qu’elle donne. Elles insèrent, dans les facultés de gestion des entreprises, des options d’informatique, ou dans les facultés de sciences informatiques, des options de gestion des entreprises.
Qu’elle soit rattachée au département de gestion des entreprises ou à celui des sciences informatiques, l’informatique de gestion fait son chemin tant dans les universités du pays que sur le marché du travail.
Le bac ou son équivalent
Mais quels sont les critères d’admission dans ces différentes universités ? Le baccalauréat libanais, ou son équivalent reconnu par le gouvernement libanais (bac français ou international) option scientifique ou sciences économiques, est requis pour être admis en informatique de gestion dans l’une des universités précitées. « Il n’est pas indispensable d’être excellent en maths, mais il faut aimer la matière, car l’informatique implique une certaine maîtrise des mathématiques, précise Philippe Fattal. C’est la raison pour laquelle nous ne pouvons admettre les élèves porteurs d’un bac littéraire ».
Toutefois, dans les universités anglophones, les étudiants ayant une nationalité étrangère ou les Libanais dispensés du bac libanais sont admissibles en « freshman », classe préparatoire au cursus universitaire, même s’ils n’ont pas le bac libanais ou son équivalent.
Quoi qu’il en soit, dans l’ensemble des universités, francophones ou anglophones, la réussite au test d’entrée est indispensable pour être admis. Ce test englobe généralement un examen de langues mais aussi une épreuve de mathématiques et parfois de culture générale. Certes, le test linguistique peut représenter un frein pour certains étudiants faibles en langues, mais rares sont les étudiants qui sont refusés à cause de cette lacune. Il leur est généralement demandé de suivre des cours de mise à niveau, afin de faciliter leur admission. « Une grande partie de nos étudiants viennent des écoles francophones, observe à ce propos Faouzi Baroud, et la langue anglaise ne représente pour eux aucun obstacle ; bien au contraire, ils s’y adaptent sans problème. »
Programmeur ou commercial
Quant à la durée des études d’informatique de gestion, elle varie en fonction du rythme de chaque étudiant, et ce grâce au système de crédits adopté tant par les universités anglophones que, récemment, par l’USJ. La licence (BS dans les universités anglophones), mélange de cours théoriques et de stages pratiques en entreprises, peut ainsi s’obtenir en trois ans ou même en six ans, selon le nombre de crédits obtenus chaque semestre. « Les stages entrepris par les étudiants dans des entreprises font partie du cursus universitaire et sont donc obligatoires, explique Hanna Greige. Ils sont extrêmement utiles car ils leur permettent de découvrir le monde du travail et sont souvent l’occasion pour eux de trouver un emploi. Au terme du stage, bon nombre d’entre eux sont effectivement embauchés ». Quant au mastère (masters dans les universités anglophones), il est généralement d’une durée de deux ans et peut se faire directement après la licence ou au terme de quelques années d’expérience professionnelle.
Pour les grandes universités du pays, la reconnaissance du diplôme par les universités à l’étranger ne pose pas vraiment de problème. Si le diplôme délivré par l’USJ est reconnu par les universités européennes qui suivent le système de crédits ECTS, ceux délivrés par les universités anglophones déjà mentionnées sont généralement reconnus aux États-Unis et dans le monde anglophone, certaines étant même reconnues en Europe.
Les débouchés sont nombreux certes, mais quels sont-ils ?
Grandes entreprises commerciales, banques, fournisseurs de solutions informatiques ou éditeurs de logiciels... nombreuses sont les entreprises qui recherchent cette formation. D’autant plus qu’un informaticien de gestion peut tout aussi bien travailler dans la programmation que dans le domaine technico-commercial.
Mais il est important de réaliser que la lutte est âpre sur le marché de l’emploi. Aimer l’informatique, ne pas avoir peur de bûcher, accepter de démarrer au bas de l’échelle, prouver ses compétences techniques, mais aussi faire montre de curiosité intellectuelle en étant constamment à jour dans le domaine informatique : telles sont les conditions essentielles pour bien entamer sa carrière.
Car même si l’on est sollicité, les salaires de départ sont plutôt bas et varient de 500 à 800 dollars. Un poste de cadre à 3000 dollars par mois n’est cependant pas une utopie, au terme d’une dizaine d’années d’expérience et de travail acharné. Certes, il ne s’agit là que d’une fourchette moyenne de salaires, car les conditions varient d’une entreprise à une autre, d’un emploi à un autre.
Formation bâtarde pour certains, polyvalente pour d’autres, l’informatique de gestion n’en répond pas moins, aujourd’hui, avec succès à la demande du marché libanais.
Les professionnels racontent
leur expérience
Ils ont fait des études en informatique de gestion dans l’une des grandes universités qui délivrent la formation au Liban. Certains ont obtenu une licence, d’autres une maîtrise. Trouver du travail n’a pas constitué un obstacle pour eux, même s’ils ont dû souvent s’adapter à un marché en crise. Hommes et femmes débutants et expérimentés apportent leur témoignage et parlent des satisfactions mais aussi des difficultés de leur profession.
Le chômage, la majorité des étudiants en informatique de gestion ne l’ont jamais expérimenté. Et pour cause, au terme de leur formation, souvent même avant d’avoir terminé leurs études, durant un stage en entreprise ou par le biais de l’université, ils sont rapidement embauchés par telle ou telle société. Certes, les conditions de départ ne sont pas exceptionnelles et dépendent du marché, mais les possibilités d’avancement sont réelles.
« J’ai commencé à travailler à temps partiel durant l’année de ma licence, dans la société où j’ai effectué mon stage, raconte Marie-Michèle, qui a obtenu sa maîtrise en 1999 à l’IGE. Payée 400 dollars américains par mois au départ, je touchais 1000 dollars au bout de trois ans et demi d’expérience ». Travaillant dans la programmation, et gérant un portefeuille de clients, elle était insatisfaite de son salaire qui stagnait. Débauchée par la société L’Oréal, la jeune femme gère actuellement le stock de l’entreprise et touche un peu moins de 1 500 dollars mensuels. Son parcours, de nombreux étudiants l’ont vécu et continuent de le vivre. « L’ensemble de ma promotion a rapidement trouvé un emploi. Beaucoup d’entre nous ont même eu le choix entre plusieurs propositions », se souvient-elle. Satisfaite de sa situation actuelle ? Marie-Michèle hésite un peu avant de lancer que son salaire stagne un peu et que l’avancement est très lent au Liban. Mais son métier, sa polyvalence, les différents domaines auxquels elle a accès dans sa carrière, elle ne les échangerait pour rien au monde. « Si c’était à refaire, j’effectuerais le même parcours », dit-elle.
Salim a obtenu en juillet dernier un BS en Information System de l’Université de Balamand. Au mois d’août, après avoir présenté son CV, il était déjà engagé par la société Polaris en tant qu’analyste programmeur, pour 750 dollars par mois. Aujourd’hui, au bout de quelques mois, le salaire du jeune homme avoisine les 1 000 dollars. Satisfait, mais convaincu qu’il a encore un long chemin à parcourir, Salim espère acquérir davantage d’expérience et devenir de plus en plus performant, pour évoluer dans sa profession. Les difficultés de la programmation, les nombreuses heures passées devant l’ordinateur, la pression parfois trop forte, mais aussi le travail dans un contexte de crise ? Il s’avoue prêt à tout surmonter, car il est convaincu que le métier qu’il a choisi par passion est un métier d’avenir.
Contrairement à certains préjugés, l’avancement n’est pas aussi lent pour tous dans le domaine. Après avoir obtenu sa licence à l’IGE en 1992, Nidal a directement été engagée pour 300 dollars par mois dans une grande entreprise informatique. Débutant en tant que programmeur, elle a gravi les échelons un à un au fil des ans. Analyste programmeur, chef de projet, coordinateur, chef du développement de logiciels, consultante....Nidal est aujourd’hui, après une douzaine d’années d’expérience, responsable du département informatique chez Abou Adal et touche un salaire intéressant, « entre 2 000 et 3 000 dollars », dit-elle, sans plus de précision.
Mais un tel avancement ne peut s’obtenir qu’au prix d’un travail acharné, d’efforts individuels continuels, de frustrations de ne pas toujours être reconnu à sa vraie valeur, « comme dans tous les métiers d’ailleurs ».
Le travail acharné, Marcelle en sait quelque chose. Responsable de l’unité technique « Infrastructure et opérations » à la banque Audi, après dix années d’ancienneté, elle déclare travailler au minimum douze heures par jour. Son salaire ? Elle préfère ne pas le préciser. « Je suis satisfaite, bien plus que d’autres. Mais vu le nombre d’heures de travail supplémentaires que je fais, ce n’est pas assez. C’est un métier très fatiguant et il faut tout le temps être à la hauteur », remarque-t-elle, ajoutant qu’il est très important d’aimer son métier pour le faire correctement.
Certes, le parcours de nombreux étudiants fraîchement diplômés n’est pas toujours aussi rose qu’il l’a été pour ces professionnels. Avec la démocratisation de cette formation, davantage d’informaticiens de gestion se retrouvent chaque année sur le marché. Les offres d’emploi sont nombreuses et variées, mais les salaires de départ sont parfois assez bas, car il est important de faire ses preuves. Si Françoise n’a pas eu trop de mal à trouver un emploi dans l’entreprise Indevco, une fois diplômée de la NDU, son salaire de départ, lui, n’est que de 500 dollars. Mais ce n’est qu’un début, estime-t-elle, et elle entend bien aller de l’avant dans sa vie professionnelle, à l’instar de tous ceux qui ont réussi à percer.
À tous ces jeunes qui se lancent dans l’informatique de gestion, une professionnelle tient à donner un conseil : « Il est indispensable de faire son stage dans une bonne entreprise, car on peut avoir la chance d’y être engagé. De plus, il est indispensable d’être constamment à jour dans son domaine. »
Quelques informations pratiques
Licence ou BS Scolarité approximative en USD
Nombre de crédits pour la licence
USJ 180 15 400
NDU 90 18 000
Balamand 95 20 000
Une des préoccupations majeures des élèves des classes secondaires concerne leur orientation professionnelle. Quelle carrière embrasser ? Quelles études entreprendre ? Quelle université choisir ? Quels débouchés espérer dans telle ou telle carrière ? Ont-ils réellement un avenir dans ce pays ? Quel sera leur salaire de départ ? La profession envisagée correspond-elle réellement à leur attente, à leur motivation, à leur profil personnel ? Quels sont les contraintes, les difficultés ou les aspects positifs des différentes carrières envisageables ? Les questions qu’ils se posent sur ce plan sont nombreuses et souvent sans réponses. Au terme de leur scolarisation, ceux qui ne partent pas poursuivre leurs études à l’étranger se lancent sur place dans des études, parfois par passion, souvent sans grande conviction,...