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Actualités - OPINION

Hommage Un autre nom pour la liberté

«...Je suis né pour te connaître, pour te nommer liberté». Sans doute, ces dernières lignes du poème d’Éluard résument-elles le mieux la vie du Amid. Nous avons voulu les citer, laissant à d’autres le soin de dresser la biographie de ce grand homme que ceux de notre génération ont mal connu. Pour nous, il suffirait, pour avoir une idée de ce qu’il est, de savoir que cet homme a vu le Liban d’aujourd’hui naître et grandir; ce qui lui a donné la possibilité de l’apprécier et de souffrir de le voir s’autodétruire. C’est cette souffrance qui l’a conduit au bannissement de lui-même, à l’exil. Et pourtant, Dieu seul sait si le Amid a jamais quitté le Liban, si au contraire ce n’était pas nous qui étions exilés dans notre propre pays, étouffés par la guerre et la peur des nuits sans lendemain. Car la patrie de Raymond Eddé, c’était finalement la liberté dans laquelle il a voulu vivre et pour laquelle il avait tant donné. Son pays dans son cœur et ses pensées, le Amid était devenu la démonstration vivante qu’à force d’authenticité et de ténacité, un chef pouvait toujours rester proche de son peuple, même quand la proximité faisait défaut. La recette pour ce faire : un patriotisme pur et dur et une volonté inébranlable d’atteindre le but qu’il s’était fixé, à savoir l’entente nationale et la libération du territoire de toute occupation. Ce patriotisme intransigeant, Raymond Eddé l’a acquis par lui-même et l’a forgé en lui-même. Il a compris qu’à partir du moment où l’ont avait choisi de vivre avec l’autre, il fallait arrêter de réfléchir comme minorité et s’atteler à créer cette nation libanaise, non plus sur le papier mais dans les faits et dans les positions de la vie politique et publique de tous les jours. C’est pourquoi il était devenu le chantre le plus talentueux d’un Liban souverain, libre et indépendant. Afin de réaliser ce but, il fallait une vision aiguë des choses, qu’il avait. Et s’il s’était exilé, c’est qu’il avait compris que les guerres dans son pays avec leur lot de destructions généraient quelque chose de pire que les carnages; elles contribuaient à rendre le Liban dépendant de son entourage. Pour notre génération, que le Amid qualifiait à juste titre de «génération souffrante», c’est l’essentiel de ce qu’il faut retenir de lui : surmonter nos peurs pour aller vers l’autre et former une nation avec lui. MacArthur a écrit un jour : «On devient vieux parce qu’on a déserté son idéal». Le Amid – qui disait de lui-même qu’il était un vieux rocher – était resté plus jeune que nous, plus jeune que cette génération «de sceptiques et de viveurs... sans armature, sans vertèbres» qui n’aurait, aux dires du grand Michel Chiha, pour seules lumières que celles de l’illusion et des plaisirs nocturnes. La mort du Amid doit être pour nous l’occasion de revoir les grands principes et les valeurs qu’il a incarnés; ce sera le meilleur moyen de lui rendre hommage et de perpétuer son souvenir. Adieu Raymond Eddé, vous auriez sans doute aimé entendre ces vers de Gabriel Vicaire : «Après avoir tant lutté et s’être fait tant de bile, c’est si bon d’être immobile Pour l’éternité...».
«...Je suis né pour te connaître, pour te nommer liberté». Sans doute, ces dernières lignes du poème d’Éluard résument-elles le mieux la vie du Amid. Nous avons voulu les citer, laissant à d’autres le soin de dresser la biographie de ce grand homme que ceux de notre génération ont mal connu. Pour nous, il suffirait, pour avoir une idée de ce qu’il est, de savoir que cet homme a...