Actualités - CHRONOLOGIE
La désinformation, arme des militaires et de la CIA(PHOTO)
le 21 février 2002 à 00h00
L’arme de la désinformation, évoquée au Pentagone, a déjà été utilisée avec plus ou moins de bonheur dans le passé par le gouvernement américain pour influencer l’opinion publique internationale ou américaine. «Tromper l’ennemi, notamment sur le plan tactique, est un outil classique des militaires, de même que les opérations psychologiques», mais les opérations clandestines de «propagande noire», la désinformation, sont plus associées aux services de renseignements comme la CIA ou le KGB soviétique, qu’au département (ministère de la Défense), note Steve Aftergood, expert à la Fédération des savants américains (FAS). M. Aftergood était interrogé par l’AFP sur la proposition par le Bureau de l’influence stratégique (OSI) militaire d’une campagne médiatique antiterroriste qui, selon des sources au Pentagone, pourrait inclure l’envoi aux médias étrangers de fausses informations. Le secrétaire à la Défense Donald Rumsfeld a cependant assuré mercredi que le Pentagone disait «la vérité» aux Américains et n’entendait pas «désinformer le public ou la presse» étrangère. En août 1964, le président Lyndon Johnson annonçait que des bateaux nord-vietnamiens avaient lancé sans provocation deux attaques répétées contre des navires américains dans le Golfe du Tonkin. Ces incidents furent largement inventés, selon les historiens. Mais Johnson obtint du Congrès une résolution pour intervenir et bombarder le Nord-Vietnam. L’affaire ne servit pas bien sûr à tromper les Nord-Vietnamiens, mais «plutôt le Congrès, et c’est une illustration de ce qui peut aller mal quand le gouvernement manipule l’information», estime Steve Aftergood. Historiquement, induire l’ennemi en erreur a beaucoup servi pendant la Seconde Guerre mondiale. Les Alliés anglo-américains firent ainsi croire à Hitler, par de fausses activités et de fausses fuites dans les journaux britanniques, que le débarquement de 1944 était prévu à Calais et non pas en Normandie afin de mobiliser les défenses allemandes au mauvais endroit. Plus récemment, rappelle Roy Godson, professeur à l’université de Georgetown à Washington, les Américains amenèrent les Irakiens à penser en 1990 qu’un débarquement amphibie était prévu au Koweït, alors que les plans réels étaient une avancée terrestre par le désert. Au nombre de campagnes de désinformation réussies, Clark Murdock, spécialiste de défense au Centre d’études stratégiques (CSIS), cite celle qui fit croire à tort aux Soviétiques que «l’US Navy était en mesure de projeter sa puissance navale» très près des côtes sur un champ de bataille, ce qu’elle ne pouvait pas faire. M. Murdock rappelle par ailleurs d’autres campagnes de propagande «dont il est difficile de mesurer le succès» comme les tracts lancés sur l’Irak et plus récemment l’Afghanistan, pour convaincre les soldats adverses de se rendre. S’il veut dire la vérité, M. Rumsfeld n’a pas exclu, en revanche, d’user de «manipulation tactique» dans le cadre de la guerre contre le terrorisme. Il a cité en exemple mercredi le cas de «forces spéciales américaines préparant une action contre un fief d’el-Qaëda» et faisant croire que les commandos viendront du nord alors qu’ils veulent venir de l’ouest. Nombre de «coups tordus» de la CIA ne seront jamais connus, selon les experts. Un ancien agent, Joseph Smith, a cependant raconté dans un livre Portrait of a Cold warrior que l’agence s’attacha à discréditer l’ancien président indonésien Ahmed Sukarno (renversé en 1966), jugé trop proche des communistes. Elle choisit un acteur lui ressemblant pour tourner un film porno. Selon Steve Aftergood, «le film fut bien réalisé, mais il n’est pas certain qu’il fut utilisé et les Indonésiens se moquaient des activités sexuelles de Sukarno».
L’arme de la désinformation, évoquée au Pentagone, a déjà été utilisée avec plus ou moins de bonheur dans le passé par le gouvernement américain pour influencer l’opinion publique internationale ou américaine. «Tromper l’ennemi, notamment sur le plan tactique, est un outil classique des militaires, de même que les opérations psychologiques», mais les opérations clandestines...
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