Actualités - CHRONOLOGIE
Afrique du sud Le procès Botha remet en cause la réconciliation blancs-noirs
le 28 avril 1998 à 00h00
La justice sud-africaine s’est penchée sur le douloureux passé du pays, à l’occasion du procès de l’ex-président Pieter Botha, avant de renvoyer les débats au 1er juin pour des raisons de procédure. Furieux d’avoir été mis en cause, celui qui dirigea le pays pendant onze ans, au plus dur de l’apartheid, a violemment attaqué la justice, le gouvernement et la Commission vérité et réconciliation (TRC) après avoir quitté le tribunal de George (sud-ouest). «Je suis profondément choqué que le pays soit aussi mal géré. Ce pays est terriblement mal gouverné. Ce pays a sombré dans la confusion», a-t-il dit aux journalistes en arrivant à sa résidence de Wilderness. «Nous avons besoin d’une meilleure administration, d’ordre et de justice, a-t-il ajouté. Demandez aux citoyens de ce pays et vous verrez qu’ils ne sont pas satisfaits de la façon dont ils sont gouvernés». M. Botha, 82 ans, a comparu pour son refus obstiné de témoigner devant la TRC qui voulait l’interroger sur ses responsabilités et sur le rôle de l’Etat sous l’apartheid. La TRC veut déterminer dans quelle mesure le sommet de l’Etat était au courant des assassinats et des tortures perpétrés par les services de sécurité dans les années 80: il s’agit de savoir s’il y a eu bavures ou pratique systématique, si des ordres ont été donnés — comme l’affirment les exécutants qui demandent aujourd’hui une amnistie politique — ou si certains ont outrepassé les consignes — comme l’assurent les anciens dirigeants. Le Parti national (NP, au pouvoir avant 1994) a toujours nié avoir avalisé des opérations illégales en rejetant toute responsabilité sur des «éléments incontrôlés» des forces de l’ordre. M. Botha affirme avoir largement explicité cette position en 1.700 pages de déposition écrite dans lesquelles il justifie la «guerre totale« lancée contre le communisme et les mouvements de libération par la nécessité de protéger la stabilité du pays. Pour lui, la convocation de la TRC relève de l’acharnement et de la «malveillance délibérée». Selon lui, les enquêteurs de la TRC veulent à tout prix le forcer à témoigner «parce qu’ils veulent détruire l’image de mon peuple et à travers moi, humilier les miens». Paradoxalement, l’impossible débat sur le passé s’est désormais déplacé devant la justice qui va devoir trancher sur la nécessité ou non d’entendre l’ex-président — et donc sur la validité des accusations présentées par la TRC. Le secrétaire général de la TRC, Paul Van Zyl, a affirmé que la commission détenait des archives officielles prouvant que le Conseil de Sécurité de l’Etat (CSS, organe exécutif suprême à l’époque) avait prôné la «neutralisation», l’«élimination» et la «destruction» de la résistance anti-apartheid. En outre, selon lui, les témoignages des victimes sur le caractère systématique des répressions ont été largement corroborés par les aveux des anciens membres de la sécurité. La TRC a répertorié plus de 2.000 cas de tortures perpétrés en 200 lieux différents dans les années 80. La période la pire, juillet 86, correspond à l’état d’urgence déclaré par l’ex-président Botha. L’avocat général (Chief Prosecutor) a obtenu un renvoi du procès en demandant à accéder aux documents officiels cités par la TRC et qui se trouvent actuellement archivés à Prétoria. Cet ajournement a suscité la colère de l’accusé, qui risque jusqu’à deux ans de prison. «C’est moi l’accusé, j’ai le droit d’être protégé par la cour, mais des accusations non vérifiées ont été lancées par un témoin qui n’a pas subi de contre-interrogatoire», a-t-il déclaré à Wilderness. Celui qui présida aux destinées du pays de 1978 à 1989 a refusé tout arrangement amiable de dernière minute avec la TRC, qui proposait de l’entendre à huis clos au cours d’une audition spéciale. Il a expliqué avoir demandé, mais en vain, à rencontrer M. Mandela et Mgr Desmond Tutu, le président de la TRC pour «dire ce qu’il a à dire». «Le président Mandela est prisonnier, il est captif de la cabale, il est captif d’intérêts auxquels il ne peut échapper», a-t-il ajouté. «C’est une colombe factice», un leurre, a-t-il lancé. De son côté, l’avocat général, Bruce Morrisson, a démenti toute motivation politique dans sa demande de renvoi. «C’est une affaire prioritaire pour nous ..., mais la date la plus proche qui convenait à tous était le 1er juin», a-t-il déclaré. La TRC, Mgr Tutu en tête, s’est efforcée jusqu’à la dernière minute d’éviter une bataille judiciaire qui a déjà catalysé les amertumes de la communauté blanche afrikaner et risque de faire éclater une réconciliation nationale fragile. (AFP)
La justice sud-africaine s’est penchée sur le douloureux passé du pays, à l’occasion du procès de l’ex-président Pieter Botha, avant de renvoyer les débats au 1er juin pour des raisons de procédure. Furieux d’avoir été mis en cause, celui qui dirigea le pays pendant onze ans, au plus dur de l’apartheid, a violemment attaqué la justice, le gouvernement et la Commission vérité et réconciliation (TRC) après avoir quitté le tribunal de George (sud-ouest). «Je suis profondément choqué que le pays soit aussi mal géré. Ce pays est terriblement mal gouverné. Ce pays a sombré dans la confusion», a-t-il dit aux journalistes en arrivant à sa résidence de Wilderness. «Nous avons besoin d’une meilleure administration, d’ordre et de justice, a-t-il ajouté. Demandez aux citoyens de ce pays et vous verrez ...
Les plus commentés
Aoun depuis le Caire : Le Liban veut revenir à une situation de « non-guerre » avec Israël
Municipales : le grand bond en arrière
Dans les prisons israéliennes, la torture généralisée des détenus palestiniens