Actualités - CHRONOLOGIE
Allemagne - Exposition permanente à Berlin La Stasi révèle son vrai visage
le 16 novembre 1998 à 00h00
La Stasi, «épée et bouclier» de la République démocratique allemande (RDA) pendant quarante ans, révèle son machiavélisme et l’implacable efficacité de ses services dans une exposition permanente ouverte neuf ans après la chute du Mur de Berlin. «Stasi, l’instrument du pouvoir» présente dans l’ancien ministère de l’Intérieur objets, fac-similés de documents et panneaux explicatifs montrant le vrai visage d’une organisation qui espionnait l’Allemagne de l’Est et ses seize millions d’habitants. Peu avant l’effondrement du régime, la Stasi, dirigée d’une main de fer par Erich Mielke, comptait 91 000 «soldats du parti», auxquels s’ajoutaient 173 000 «collaborateurs non officiels», des indicateurs immergés dans la société. En 1984, Monsieur S., employé des chemins de fer, retint l’attention de ses services pour avoir pris l’habitude de faire des promenades en forêt en sortant du travail. Ses moindres faits et gestes furent épiés, les sentiers qu’il empruntait, les arbres devant lesquels il s’arrêtait notés et photographiés, jusqu’à ce que l’enquête conclue à son innocence. La Stasi, qui se distinguait par une précision bureaucratique et une paranoïa aiguë, consignait toutes ses observations dans des dossiers. L’Allemagne réunifiée a ainsi hérité de 180 kilomètres linéaires d’archives qui en disent long sur le fonctionnement de la «pieuvre». Les «collaborateurs non officiels», pièce maîtresse du dispositif, étaient recrutés avec le plus grand soin. Simples citoyens, ils avaient pour mission de moucharder leurs collègues de travail, leurs voisins de palier ou leur entourage familial. Des échantillons d’odeurs d’opposants En 1973, le capitaine Radeke du département XX/3, chargé des fédérations sportives, repéra un jeune journaliste sportif qu’il engagea sous le nom de «Mathias» après six mois de contacts. «Mathias» s’avéra d’une fidélité à toute épreuve. «D’aspect agréable, plaisant aux femmes», selon un rapport de son officier traitant, il fut chargé d’espionner une collègue journaliste soupçonnée de vouloir quitter la RDA. La Stasi lui demanda d’aider la jeune femme à déménager, afin d’observer comment elle vivait, et d’établir avec elle «un rapport de confiance». En 1974 «Mathias» remit ses conclusions: «L’intention de fuir la République ne semble pas pour le moment très forte. Si toutefois une occasion favorable se présentait, elle pourrait la saisir». «Elle aspire à une relation stable avec un homme (avec moi). Un mariage la lierait à notre république», observait-il un peu plus tard. Une unité spéciale de «technique opérationnelle», comptant plus de 1 100 collaborateurs, mit au point toutes sortes de micros et d’objectifs photographiques dissimulés dans sac à main, le porte-documents ou le bleu de travail. Des milliers d’odeurs de personnes suspectes – opposants politiques, traîtres à la patrie présumés – furent prélevées sur des bouts de tissu et conservées dans des bocaux, des chiens étant entraînés à les reconnaître. «Lors de l’entretien, M. s’est montré ouvert (...). À la fin, un GK (échantillon d’odeur) a été prélevé sur la chaise où il était assis», relève un compte-rendu de la Stasi, qui affectionnait les sigles. Pour briser la résistance des opposants politiques, la police politique distillait de fausses informations, faisant croire qu’ils avaient trompé leur femme ou trahi un collègue. L’intéressé, coupé des siens, discrédité dans son travail, finissait souvent par craquer.
La Stasi, «épée et bouclier» de la République démocratique allemande (RDA) pendant quarante ans, révèle son machiavélisme et l’implacable efficacité de ses services dans une exposition permanente ouverte neuf ans après la chute du Mur de Berlin. «Stasi, l’instrument du pouvoir» présente dans l’ancien ministère de l’Intérieur objets, fac-similés de documents et panneaux explicatifs montrant le vrai visage d’une organisation qui espionnait l’Allemagne de l’Est et ses seize millions d’habitants. Peu avant l’effondrement du régime, la Stasi, dirigée d’une main de fer par Erich Mielke, comptait 91 000 «soldats du parti», auxquels s’ajoutaient 173 000 «collaborateurs non officiels», des indicateurs immergés dans la société. En 1984, Monsieur S., employé des chemins de fer, retint l’attention...