La photo de Pascal Sleiman sur l'église de Mayfouk, dans la région de Jbeil, pendant ses funérailles, le 12 avril 2024. Photo Matthieu Karam/L'Orient-Le Jour
L'armée libanaise a annoncé samedi que Damas avait remis l’un des principaux suspects dans l’assassinat de Pascal Sleiman, un responsable au sein des Forces libanaises à Jbeil qui avait été kidnappé et tué par un gang présumé de Syriens en avril 2024.
Pascal Sleiman avait été enlevé le 7 avril 2024 dans la localité de Kharbé par des individus armés au moment du vol présumé de sa voiture. Son corps avait été retrouvé en Syrie le lendemain et des suspects syriens avaient par la suite été arrêtés au Liban. L'annonce de la disparition de M. Sleiman avait d'abord fait craindre des tensions entre les FL et leurs opposants politiques, principalement le Hezbollah, sur fond d'autres affaires obscures visant des responsables des FL, notamment la mort d'un cadre du parti à Aïn Ebel, au Liban-Sud. Les FL avaient directement pointé du doigt le Hezbollah, qui avait démenti toute implication. Puis, les informations ayant filtré de l'enquête concernant l'implication d'un gang syrien avaient ensuite provoqué plusieurs agressions contre des réfugiés et migrants syriens et l'adoption par le parti de Samir Geagea d'une position encore plus ferme concernant leur présence et la nécessité, selon lui, de les rapatrier en Syrie.
Chef présumé d'un « gang spécialisé dans les enlèvements »
« À la suite d’une série de contacts menés par le Bureau de coopération et de coordination de l’armée avec les autorités syriennes, le bureau a réceptionné A.N., l’une des principales personnes impliquées dans l'enlèvement et le meurtre de Pascal Sleiman le 7 avril 2024 », rapporte un communiqué de l'institution militaire. « Le détenu a été remis aux services de renseignement de l’armée », ajoute le texte, qui précise qu'il est « le chef d’un gang spécialisé dans les enlèvements, les vols et les falsifications de documents et qu'il fait l’objet d’un grand nombre de mandats d’arrêt ».
Le 14 mai 2024, le premier juge d'instruction du Mont-Liban, Nicolas Mansour, avait délivré des mandats d'arrêt à l'encontre de deux suspects placés en détention et interrogés. Cinq mandats par contumace avaient en outre été émis à l’encontre d'autres personnes ayant fui en Syrie.
Un « développement majeur », selon les FL
Commentant cette remise du suspect aux autorités libanaises, le porte-parole des FL Charles Jabbour a affirmé à L'Orient-Le Jour qu’il s’agissait d’un « développement majeur » dans l'affaire, qui allait permettre de faire la lumière sur « les motivations derrière l’enlèvement et l’assassinat ». « Nous devons maintenant attendre les résultats de l’enquête », a-t-il ajouté.
L'affaire Sleiman était survenue sous l'ancien régime syrien du président Bachar el-Assad. Ce dernier a été renversé le 8 décembre 2024 par une coalition de groupes rebelles, dirigée par la faction désormais dissoute de Hay'at Tahrir el-Cham, emmenée par Ahmad el-Chareh, devenu entre-temps président intérimaire de la Syrie. Depuis l'arrivée au pouvoir de M. Chareh, Beyrouth coordonne sur plusieurs dossiers avec les autorités syriennes, notamment les questions sécuritaires le long de la frontière commune entre les deux pays.
En août 2024, Samir Geagea avait dénoncé le « refus » du régime Assad de livrer des suspects dans l'affaire Pascal Sleiman. Les noms de deux personnes supposément impliquées dans le meurtre, dont celui du chef présumé de la bande, avaient été mentionnés par M. Geagea, mais ils ne correspondent pas aux initiales de l'homme remis samedi par Damas à l'armée libanaise.