Israël pilonne le Sud à deux jours des municipales

Israël a mené plusieurs frappes jeudi et dans la nuit de vendredi contre des cibles au Liban-Sud, où les élections locales doivent se tenir ce samedi malgré la menace sécuritaire.

Cette escalade soudaine pourrait être interprétée comme une façon de peser dans le scrutin, en démobilisant la base du Hezbollah.

Dans la nuit de jeudi à vendredi, l'armée israélienne a frappé plusieurs régions du Sud, notamment des préfabriqués installés à Aïtaroun (dans le caza de Bint Jbeil), la vallée de Aaziyé, à trois reprises et déjà bombardée jeudi soir. La zone dite de Jeb el-Soueid, à Majdel Zoun, dans le caza de Tyr, a, elle, été bombardée à partir d'un hélicoptère. Des avions de chasse israéliens ont également frappé Deir Antar et un hélicoptère a bombardé d'autres préfabriqués à Chamaa (Tyr). Ces frappes ont provoqué dans certaines zones des incendies. Jeudi soir, l’armée israélienne a émis un avis d’évacuation aux personnes se trouvant à proximité d’un bâtiment dans le village de Toul, situé au nord du Litani, dans la périphérie de Nabatiyé. Peu après, un raid aérien a visé le bâtiment menacé, après une première frappe d’avertissement, le détruisant et causant d’importants dégâts aux immeubles voisins. L’aviation israélienne a ensuite mené un raid sans avertissement ciblant les environs du village de Touline (caza de Marjeyoun), avec deux missiles. Selon les informations de notre correspondant Mounstasser Abdallah, ce raid a visé une zone proche d’une école publique où devait se rendre l’armée libanaise vendredi matin pour en faire un centre électoral. L’aviation israélienne a ensuite frappé les hauteurs de Rihane (caza de Jezzine) et de Borghoz (caza de Hasbaya).

Plus tôt dans la journée, un drone israélien a également mené un raid sur une zone située entre Rab el-Thalathine et Markaba dans le caza de Marjeyoun, faisant un mort. En parallèle, une personne originaire de Wazzani (Marjeyoun) a été blessée par des tirs de soldats israéliens postés en face du village. L’armée israélienne a aussi bombardé les environs de Bouday, un village de la Békaa situé à une quinzaine de kilomètres à l’ouest de Baalbeck au Liban, selon les informations de notre correspondante Sarah Abdallah.

Des contacts pour « mettre fin à l’agression israélienne »

Sur le plan politique, le Premier ministre Nawaf Salam a souligné, lors d’une réunion jeudi avec le mufti de la République, Abdellatif Deriane, que « le gouvernement mène des contacts, des initiatives diplomatiques et politiques, tant arabes qu’internationales, pour mettre fin à l’agression israélienne continue ». M. Salam a également affirmé que « le gouvernement a fait des progrès significatifs dans les réformes tangibles qui affectent directement les citoyens dans divers domaines, et poursuit ses efforts de réforme aux niveaux économique et social, notamment en activant les institutions de l’État qui englobent tout le monde, en se basant sur l’accord de Taëf et la Constitution ». Le Premier ministre a, par ailleurs, souligné que « les relations du Liban avec ses frères arabes ont commencé à revenir à la normale et sont maintenant à un stade avancé de coopération et de soutien pour le bien du pays ». Pour sa part, le mufti Deriane a exprimé sa volonté de « soutenir le gouvernement et son chef dans le travail national inclusif et les réformes mises en œuvre », appelant à « davantage de réalisations que les Libanais attendent, en particulier la résolution rapide de la question des détenus libanais et étrangers, notamment islamistes, qui ont été détenus pendant longtemps sans procès équitable ».

L’ordre du jour de Haykal

De son côté, le commandant en chef de l’armée, le général Rodolphe Haykal, a estimé jeudi que les violations israéliennes quotidiennes au

Liban-Sud « entravent le déploiement complet de l’armée » au sud du Litani. Il s’exprimait à l’occasion du 25e anniversaire du retrait de l’armée israélienne du Sud le 25 mai 2000, après des années d’occupation de cette région depuis la guerre civile libanaise (1975-1990). Le général Haykal a félicité la troupe pour « sa résistance qui est l’une des raisons les plus importantes de la survie du Liban, de l’unité des Libanais et de leur sécurité », ainsi que pour son « travail intensif pour étendre l’autorité de l’État ». La commémoration du 25 mai intervient cette année alors que l’armée israélienne continue d’occuper cinq positions qu’elle considère comme « stratégiques » dans le sud du Liban, bien qu’elle devait totalement s’en retirer après son offensive terrestre lancée en septembre 2024, dans le cadre de l’escalade du conflit avec le Hezbollah. « Cette commémoration intervient dans le cadre d’une phase lourde et dangereuse, à la suite d’une agression globale lancée par l’ennemi israélien contre le Liban, en particulier dans le sud du pays, qui a fait des milliers de martyrs et de blessés et causé une destruction généralisée des biens et des infrastructures », a ajouté le général Haykal. S’adressant à la troupe, le général Haykal a loué son « travail intensif pour étendre l’autorité de l’État sur tout le territoire libanais, mettre en œuvre les résolutions internationales en étroite coordination avec la Force intérimaire des Nations unies au Liban (Finul) et le comité de supervision du cessez-le-feu, assurer le déploiement de l’armée dans le Sud et accompagner le retour des populations dans leurs villages ».

Le Hezbollah reste attaché au « choix de la résistance »

Le Hezbollah a, quant à lui, insisté sur l’importance du « choix de la résistance (...) qui a permis de libérer la terre (libanaise) », dans un communiqué publié jeudi à l’issue de sa réunion hebdomadaire. « Aujourd’hui, des parties du pays sont occupées après la dernière agression sioniste. Au vu des manquements de la communauté internationale (...) pour obliger l’ennemi à respecter la résolution 1701 (de l’ONU) alors que le Liban s’y conforme, le Liban et les Libanais ont le droit de se défendre et de défendre leur souveraineté et leurs terres. Ce qui prouve la nécessité et l’efficacité de la résistance », a indiqué le parti. Le Hezbollah a, par ailleurs, appelé à « refuser les projets de normalisation avec l’occupation » israélienne et pressé les responsables libanais de « s’armer de sagesse et de courage pour servir les intérêts du pays, loin des pressions de l’administration américaine qui servent les intérêts de l’ennemi israélien ». « Nous insistons sur la nécessité que le gouvernement mette l’administration (américaine) face à ses responsabilités quant au respect du cessez-le-feu et la poursuite de l’occupation et les attentats quotidiens qui empêchent les Libanais de reconstruire leurs maisons », ajoute la formation chiite.