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Monde - MANIFESTATIONS

Journée noire en France contre une réforme des retraites décriée

Les manifestants ont battu le pavé dans de nombreuses villes françaises pour dire « non » au recul de l’âge légal de départ à la retraite.

Journée noire en France contre une réforme des retraites décriée

Des manifestants arborant les drapeaux de la CGT défilent en France contre le projet de réforme des retraites du président Emmanuel Macron, le 19 janvier 2023. Éric Gaillard/Reuters

Des centaines de milliers de manifestants défilant à travers le pays, des transports très perturbés sur le réseau ferroviaire et à Paris, des écoles fermées. La France avait hier un air de paralysie. Pour protester contre la mesure phare d’Emmanuel Macron : le report de l’âge de départ à 64 ans, contre 62 aujourd’hui. Son projet se heurte en effet à un front syndical uni et une large hostilité dans l’opinion d’après les sondages. Les syndicats ont salué dès l’après-midi une mobilisation « réussie ».

« Emmanuel Macron, il voudrait qu’on meure sur le terrain, qu’on travaille jusqu’à 64 ans », lance Hamidou, 43 ans, éboueur de la ville de Paris rencontré dans la manifestation. « On se lève très tôt. Il y a certains de mes collègues qui se lèvent à 3 heures. Travailler jusqu’à 64 ans, franchement c’est trop », lance-t-il. Plus loin, une jeune femme brandit une pancarte : « La retraite avant l’arthrite. » D’autres pancartes proclament « Métro, boulot, tombeau » ou « Métro, boulot, caveau ».

Les manifestants ont battu le pavé hier matin dans de nombreuses villes françaises pour dire « non » au recul de l’âge légal de départ à la retraite. Les premiers chiffres remontés par les autorités attestent d’une forte mobilisation : au moins 36 000 personnes ont défilé à Toulouse, 26 000 à Marseille, 25 000 à Nantes, 19 000 à Clermont-Ferrand, 15 000 à Montpellier, 14 000 à Tours, 13 600 à Pau, 12 000 à Perpignan... Selon un décompte diffusé par le ministère de l’Intérieur hier soir, plus d’un million de personnes (1,12 million) ont défilé dans les rues, dont 80 000 à Paris. Le secrétaire général du syndicat CGT, Philippe Martinez, a, lui, estimé à « plus de deux millions » le nombre manifestant dans toute la France. La CGT a avancé le chiffre de 400 000 manifestants à Paris.

Des heurts ont éclaté entre forces de l’ordre et manifestants autour de la place de la Bastille à Paris, avec jets de projectiles et usage de gaz lacrymogènes. Une source à la préfecture de police de Paris a indiqué qu’à 16h50, les forces de l’ordre avaient procédé à 30 interpellations pour port d’arme prohibé, outrage et rébellion, et jets de projectiles notamment.

Faire « réfléchir » le gouvernement

À Marseille, Jérôme Thevenin, cuisinier de 52 ans à la carrière « hachée », a longtemps travaillé comme saisonnier. « Je n’ose même pas faire le calcul pour savoir quand je pourrai partir. Mais je vois la retraite approcher et je me sens davantage concerné », dit-il, en espérant que la mobilisation « fera réfléchir le gouvernement ». Ancien pompier, Michel Liger, 65 ans, est venu du Val d’Oise pour rejoindre le cortège des manifestants à Paris. « Je suis en retraite, mais je pense à mes enfants, et je n’ai pas envie que mes enfants partent plus tard que moi à la retraite en travaillant plus », a-t-il déclaré.

Anticipant un « jeudi de galère », le ministre délégué aux Transports, Clément Beaune, avait appelé à différer les déplacements ou à télétravailler, une pratique qui s’est largement répandue en France depuis le confinement pour endiguer le Covid en 2020. Les agents de l’entreprise publique d’électricité EDF ont procédé à des baisses de production d’électricité, atteignant au moins l’équivalent de deux fois la consommation de Paris. Du côté des raffineries, la CGT TotalEnergies comptait entre 70 et 100 % de grévistes, sur la plupart des sites du groupe.

La grève était très suivie dans les transports avec quasiment aucun train régional, peu de trains grande vitesse (TGV), un métro tournant au ralenti à Paris et une grande banlieue très peu desservie. « C’est tout le temps les mêmes qui font grève, le réseau SNCF, RATP et nous, par contre, qui un jour allons être aussi à la retraite, dans le privé, on ne fait pas grève. On subit toujours », a déploré Virginie Pinto, une salariée du secteur immobilier croisée dans le métro parisien. Il n’y avait aucun trafic au port de Calais, premier de France pour les voyageurs, en raison d’une grève des officiers de port. De nombreux services publics font l’objet d’appels à la grève, en particulier l’éducation, où le principal syndicat, la FSU, dénombre 70 % d’enseignants grévistes dans les écoles et 65 % dans les collèges et lycées.

Test présidentiel

Emmanuel Macron, dont la réforme des retraites est un chantier crucial du second quinquennat, pour lequel il s’était engagé dès la campagne de son premier mandat, joue gros : son parti, qui ne dispose pas d’une majorité à l’Assemblée nationale, pourrait être fragilisé si le mouvement était profond et durable. En visite en Espagne, le président préfère rester en dehors de la mêlée et envoyer la Première ministre Élisabeth Borne en première ligne. Interrogé sur la mobilisation en marge du sommet avec le gouvernement espagnol, le chef de l’État a en outre défendu une réforme « juste et responsable ». Ce test politique pour Emmanuel Macron intervient dans un contexte économique et social tendu. Les Français subissent les effets d’une forte inflation, à 5,2 % en moyenne en 2022, dans un pays qui a été secoué lors du premier mandat d’Emmanuel Macron par les manifestations des « gilets jaunes » contre la vie chère.

La France est l’un des pays européens où l’âge légal de départ à la retraite est le plus bas, sans que les systèmes de retraite soient complètement comparables. Le gouvernement a fait le choix d’allonger la durée de travail, pour répondre à la dégradation financière des caisses de retraite et au vieillissement de la population. Il défend son projet en le présentant comme « porteur de progrès social », notamment en revalorisant les petites retraites.

Sources : agences

Des centaines de milliers de manifestants défilant à travers le pays, des transports très perturbés sur le réseau ferroviaire et à Paris, des écoles fermées. La France avait hier un air de paralysie. Pour protester contre la mesure phare d’Emmanuel Macron : le report de l’âge de départ à 64 ans, contre 62 aujourd’hui. Son projet se heurte en effet à un front syndical uni et...

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