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Le sort du militant libanais Georges Abdallah examiné au tribunal administratif


Manifestation à Lannemazan, dans le sud de la France, en octobre 2014, pour réclamer la libération du Libanais Georges Abdallah, incarcéré pour une série d'attentats dans les années 1980. Photo d'archives LAURENT DARD / AFP

La France peut-elle être contrainte d'expulser le Libanais Georges Ibrahim Abdallah, incarcéré pour une série d'attentats dans les années 1980 ? Le tribunal administratif de Paris s'est penché jeudi sur la requête de l'un des plus anciens détenus du pays. 

L'ex-chef de Fractions armées révolutionnaires libanaises, un groupuscule marxiste, a été condamné en 1987 pour complicité dans l'assassinat de deux diplomates américain et israélien. Ses partisans le présentent comme le "plus vieux prisonnier politique d'Europe", ses détracteurs comme un "terroriste".

Libérable depuis 1999, il a vu ses neuf demandes de libération conditionnelle rejetées, et est incarcéré depuis "trente-sept ans et trois mois", rappelle la rapporteure publique en début d'audience. La justice avait répondu favorablement à sa demande de libération en 2013, sous réserve qu'il fasse l'objet d'un arrêté d'expulsion du ministère français de l'Intérieur. Alors place Beauvau, Manuel Valls ne l'a jamais pris.

 En 2020, Georges Abdallah, aujourd'hui âgé de 70 ans, tente à nouveau sa chance avec Gérald Darmanin mais ses courriers restent sans réponse. Un "refus implicite", dit la rapporteure publique, qui conduit le militant libanais à saisir le tribunal administratif pour lui demander de contraindre le ministère à prendre cet arrêté - étape nécessaire à une nouvelle demande de libération.

Au terme d'une courte audience, la rapporteure publique, qui dit le droit et dont l'avis est généralement suivi, a recommandé le rejet de sa requête. Elle a argué qu'aucune loi ni règle de droit "n'impose au ministère de l'Intérieur de prendre une mesure d'expulsion pour un ressortissant étranger" qui, en détention, "ne constitue pas une menace immédiate à l'ordre public". A la défense de M. Abdallah, qui assure que les expulsions des étrangers condamnés "pour des faits assimilés à des faits de terrorisme" sont aujourd'hui "systématiques", elle rétorque que c'est au ministère "d'apprécier l'opportunité d'une telle mesure".
La rapporteure publique ne cache pourtant pas le fond de sa pensée : "Une telle solution n'est guère satisfaisante, mais aucune autre ne nous paraît envisageable dans le cadre juridique. Il faut espérer que la situation de Georges Ibrahim Abdallah puisse évoluer par d'autres voies", déclare-t-elle.

"Scandale d'Etat" 
Et de conclure à l'attention du tribunal : "Il est bien évidement que le maintien en détention de Georges Ibrahim Abdallah, depuis bientôt trente-huit ans, obéit à des considérations de nature extra-juridiques et qui vous échappe". 

Interrogé par l'AFP sur la position de la France, l'Elysée a répondu que "l'administration avisera selon la décision du juge".

Le maintien en détention de Georges Ibrahim Abdallah est un "scandale d'Etat", affirme de son côté devant le tribunal son avocat Jean-Louis Chalanset qui rappelle que les autorités libanaises sont favorables au retour dans son pays de celui qui y est vu comme un "héros" et un "résistant". "L'affaire est évidemment extra-judiciaire, mais il est certain que c'est sur le plan judiciaire qu'il sera libéré", argue-t-il, en soutenant que son client n'a d'autre choix qu'une "libération-expulsion". L'alternative, une mesure transitoire d'un an en semi-liberté ou sous bracelet électronique, n'est pas envisageable pour celui qui "craint pour sa sécurité" et "ne pourrait être libre sur le territoire français", avance Me Chalanset.

L'avocat voit la main du gouvernement américain derrière le maintien en détention de son client et rappelle que les Etats-Unis (partie civile au procès de Georges Abdallah en 1987) se sont depuis systématiquement opposés à ses demandes de libération par la voix de leur conseil.

Le ministère de l'Intérieur, qui estime que la requête est irrecevable, n'est pas venu étayer ses arguments à l'audience. La rapporteure publique les a développés en s'attardant sur l'un d'eux "qui ferait presque sourire si le sujet n'était pas si grave": refuser l'expulsion de quelqu'un ne peut être considéré comme une décision "défavorable", avait affirmé le ministère.

Une soixantaine de soutiens de Georges Ibrahim Abdallah étaient présents devant le tribunal pour dénoncer "l'acharnement de l'Etat" et réclamer sa libération.

Le tribunal rendra sa décision le 10 février.

La France peut-elle être contrainte d'expulser le Libanais Georges Ibrahim Abdallah, incarcéré pour une série d'attentats dans les années 1980 ? Le tribunal administratif de Paris s'est penché jeudi sur la requête de l'un des plus anciens détenus du pays. L'ex-chef de Fractions armées révolutionnaires libanaises, un groupuscule marxiste, a été condamné en 1987 pour complicité...