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Dernières Infos - Drame migratoire dans la Manche

Paris et Londres appellent à une coopération internationale

Paris et Londres appellent à une coopération internationale

Des migrants secourus par un bateau britannique, le 24 novembre 2021 à Dungeness, sur la côte sud-est d'Angleterre. Photo Ben STANSALL / AFP

Après le choc face à la pire tragédie migratoire survenue en Manche, Paris et Londres vont tenter de taire leurs désaccords et d'améliorer la coordination internationale, pour lutter contre les gangs de passeurs organisant des traversées illégales.

La mort de 27 migrants qui tentaient de rejoindre l'Angleterre, mercredi soir, dans le naufrage de leur embarcation est le drame migratoire le plus meurtrier depuis la hausse en 2018 des traversées de la Manche, face au verrouillage croissant du port français de Calais (nord de la France) et du tunnel ferroviaire, empruntés jusque-là.

"La France est un pays de transit, nous nous battons contre ces réseaux de passeurs qui utilisent la détresse, mais nous devons pour cela améliorer la coopération européenne", a plaidé jeudi le chef de l'Etat français, Emmanuel Macron, en déplacement à Zagreb.

Semblant sur la même longueur d'ondes, la ministre britannique de l'Intérieur, Priti Patel a appelé à un "effort international coordonné", devant les députés britanniques.

Ainsi, la France a invité "les ministres en charge de l'immigration belge, allemand, néerlandais et britannique, ainsi que la Commission européenne, à une rencontre" dimanche à Calais. "Cette réunion devra permettre de définir les voies et moyens de renforcer la coopération policière, judiciaire et humanitaire" pour "mieux lutter contre les réseaux de passeurs", ont expliqué les services du Premier ministre français Jean Castex.

Cette volonté commune affiché laissait sceptiques certains observateurs tant les relations entre Paris et Londres sont exécrables. "Ils vont devoir travailler ensemble. Mais peuvent-il y arriver quand les relations sont si mauvaises, avec toujours le risque que l'un dise que l'autre n'en fait pas assez ?", s'interroge John Springford, expert au Center for European Reform (CER) à Londres.

La question des traversées, qui attise régulièrement les tensions bilatérales, est délicate pour le gouvernement conservateur britannique, qui a fait de la lutte contre l'immigration son cheval de bataille dans la foulée du Brexit.

Qu'importe les mesures ou les drames, sur place rien n'entamera la détermination des migrants à rejoindre l'Angleterre, à l'instar d'Emmanuel D'Mulbah. "C'est démoralisant, je suis effrayé, mais je continuerai" à tenter cette traversée risquée en "small boat", confesse auprès de l'AFP ce Libérien, en attente dans la ville portuaire de Calais. "C'est mon rêve."

"Kurdes, Iraniens et Afghans"

Le drame s'est déroulé sur un "long boat", un bateau gonflable fragile au fond souple dont l'utilisation par les passeurs s'est accru depuis l'été. Le bateau était parti de Dunkerque (nord), selon une source proche du dossier.

Parmi les victimes figurent 17 hommes, 7 femmes et 3 jeunes, ainsi que 2 survivants, selon la procureure de Lille (nord). Il y aurait un adolescent et trois enfants parmi les victimes, a précisé une source policière.

Les deux survivants, un Irakien et un Somalien, étaient en "grave hypothermie hier" mais "un peu mieux aujourd'hui", a indiqué jeudi le ministre français de l'Intérieur, Gérald Darmanin.

Environ 200 personnes, essentiellement des militants associatifs et quelques exilés, se sont réunies jeudi en début de soirée à Calais pour rendre hommage aux victimes.

Les circonstances du drame ne sont pas encore éclaircies, mais Mohamed, un Syrien de 22 ans, affirme, auprès de l'AFP, être l'un des derniers à les avoir côtoyés: "Ils étaient avec moi ici à Calais il y a trois jours encore".

"Ils étaient Kurdes irakiens, Iraniens et Afghans. On a vécu dans les campements, dans la rue, on a même dormi dans la gare de Calais. Il y a trois jours, le groupe nous a dit +on part en Angleterre+, et ils sont partis", assure-t-il, entouré de plusieurs compatriotes qui opinent du chef. "Hier, c'était très dangereux" de traverser, regrette-t-il. "Moi je n'essaierais pas dans ces conditions. En plus ils ont pris la mer sans équipement", dit-il.

L'épave a été saisie et sera examinée pour éclaircir les causes du naufrage, et cinq personnes, soupçonnées d'être des passeurs, ont été arrêtées, selon M. Darmanin.

Une enquête a été ouverte en France pour "aide à l'entrée et au séjour irréguliers en bande organisée", "homicide et blessures involontaires" et "association de malfaiteurs".

"Depuis le 1er janvier, nous avons arrêté 1.500 passeurs", a assuré M. Darmanin jeudi. Des passeurs qui fonctionnent comme des "organisations mafieuses" qui "relèvent du grand banditisme" avec l'utilisation notamment de "téléphones cryptés".

Les tentatives de traversées de la Manche à bord de petites embarcations ont doublé ces trois derniers mois, avait récemment mis en garde le préfet maritime de la Manche et de la mer du Nord, Philippe Dutrieux.

Au 20 novembre, 31.500 migrants avaient quitté les côtes depuis le début de l'année et 7.800 migrants avaient été sauvés. Une tendance qui n'a pas baissé malgré les températures hivernales.

Avant ce naufrage, le bilan humain depuis janvier s'élevait à trois morts et quatre disparus.

Après le choc face à la pire tragédie migratoire survenue en Manche, Paris et Londres vont tenter de taire leurs désaccords et d'améliorer la coordination internationale, pour lutter contre les gangs de passeurs organisant des traversées illégales.La mort de 27 migrants qui tentaient de rejoindre l'Angleterre, mercredi soir, dans le naufrage de leur embarcation est le drame migratoire le...