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Moyen-Orient - Éclairage

L’EI revient sur le devant de la scène en Syrie

Quinze soldats de l’armée régulière sont toujours portés disparus après une embuscade vendredi soir.

L’EI revient sur le devant de la scène en Syrie

Un soldat régulier de l’armée syrienne dans le désert de Deir ez-Zor où ont lieu de nombreuses attaques du groupe État islamique. Photo d’archives AFP

Le groupe jihadiste État islamique a multiplié les attaques sur le territoire syrien au cours des dernières semaines, faisant craindre une augmentation substantielle de sa capacité de nuisance. L’aviation russe continuait de frapper hier en journée des positions de l’EI dans la province de Hama, après 72 heures de raids intenses notamment dans la région de Raqqa et de Homs. Depuis le 1er janvier, Moscou a effectué près de 400 raids aériens en Syrie. Ces opérations s’inscrivent en représailles à plusieurs attaques, embuscades et explosions qui ont coûté la vie à des forces du régime de Damas. Au moins 19 soldats progouvernementaux auraient été tués lors des affrontements ces dernières 48 heures, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH). Samedi, sept miliciens affiliés au régime ont également péri dans la province de Deir ez-Zor, alors qu’ils étaient en opération à al-Chola pour tenter d’y débusquer des jihadistes. Quinze soldats de l’armée régulière sont en outre toujours portés disparus, alors qu’ils circulaient en direction de l’est de Hama dans un bus, retrouvé calciné vendredi soir. Ce scénario est le même que celui utilisé par l’EI le 30 décembre dernier. Trente-neuf soldats qui partaient en congé avaient alors été tués dans l’embuscade de leur bus vers Deir ez-Zor, ce qui a constitué l’une des attaques les plus meurtrières depuis la chute du califat en mars 2019. Le groupe État islamique a revendiqué l’attentat en déclarant que les soldats faisaient partie de la quatrième division de l’armée syrienne, dirigée par Maher el-Assad, qui prend part aux opérations des milices iraniennes notamment dans la région de Boukamal à la frontière irakienne. Cette attaque de grande envergure constitue « une preuve de plus de l’incapacité totale de Damas et de ses alliés russe et iranien de vaincre, ou du moins contenir l’État islamique », analyse dans un tweet Charles Lister, du Middle East Institute. Cette attaque a contraint le régime à annuler les célébrations du 31 décembre à la télévision d’État en solidarité avec les familles des victimes, dont certaines n’ont pas hésité à dénoncer publiquement la négligence du régime syrien à protéger ses soldats.

Coups durs

En frappant au cœur des zones d’influence loyalistes, le groupe jihadiste montre qu’il est en mesure de perpétuer le chaos, puisque les opérations s’intensifient et s’étendent à travers le territoire. Depuis mars 2019, l’OSDH a documenté la mort d’au moins 1 177 soldats loyalistes de nationalités syrienne et non syrienne, dont au moins deux Russes, et 145 miliciens non syriens soutenus par l’Iran. Tous ont été tués dans des attaques, des attentats à la bombe et des embuscades de l’EI, à l’ouest de l’Euphrate dans les déserts de Deir ez-Zor, Homs et de Soueida. 633 jihadistes auraient en outre été abattus.

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La perte de son territoire en Irak et en Syrie ainsi que la mort de son leader Abou Bakr el-Baghdadi en 2019 ont certes été des coups très durs pour le groupe terroriste mais n’ont pas signé sa mort pour autant. En devenant une organisation clandestine, l’EI a montré sa capacité à multiplier les attentats, certes moins spectaculaires, mais suffisamment importants pour terroriser les populations et mettre en déroute le régime et ses alliés dans les pans de territoire reconquis. L’EI profite notamment en Syrie d’une dynamique favorable, alors que le chaos politique se poursuit, tout comme le partage du gâteau entre les Turcs, les Russes, les Iraniens et le régime baassiste. Dans la riche province de Deir ez-Zor notamment, les attaques de l’EI qui se sont multipliées depuis le mois d’avril dernier constituent une épine dans le pied des milices iraniennes et russes affiliées au régime et stationnées sur place. En août dernier, un général russe avait notamment été tué par un engin explosif aux côtés d’un chef de la Défense nationale, une attaque revendiquée par le groupe jihadiste. Une chasse à l’homme est depuis lancée, et une augmentation des exécutions de civils soupçonnés par les milices chiites d’appartenir à l’EI a provoqué la gronde des tribus locales. Le groupe profite du fait que les populations locales à majorité sunnite ne supportent plus la présence des milices chiites. Elles voient également d’un mauvais œil le contrôle exercé par les Forces démocratiques syriennes (FDS, à majorité kurde) à Raqqa et Deir ez-Zor notamment. Un double contexte qui explique en partie l’escalade des opérations de l’EI dans ces régions. En décembre dernier, les États-Unis ont achevé le retrait de leurs troupes du nord-est de la Syrie, redéployé et réduit leur contingent militaire pour maintenir environ 600 soldats stationnés dans le reste du pays. L’administration sortante du président Donald Trump a en outre annoncé sa volonté de retirer 500 soldats mi-janvier pour n’en laisser que 2 500 en Irak. Le vide laissé par les forces américaines à la tête de la coalition anti-EI couplé à l’incompétence de Damas et ses alliés sont une aubaine pour le groupe État islamique. La ministre française des Armées Florence Parly s’est notamment inquiétée hier de la « résurgence » du groupe jihadiste en Irak et en Syrie, contre lequel les militaires français restent mobilisés au sein d’une coalition internationale conduite par Washington.

Cette situation pourrait notamment renforcer le discours de propagande du régime syrien qui lie son incapacité à contrer la résurgence de l’EI sur son territoire aux sanctions internationales qui pèsent au-dessus de sa tête, alors que ce sont ses ressources insuffisantes et des années de multiples crises structurelles qui l’empêchent en partie de sécuriser le pays. La menace de l’EI sert ainsi de prétexte au président syrien pour appeler à l’aide la communauté internationale pour en finir avec ce fléau.

Le groupe jihadiste État islamique a multiplié les attaques sur le territoire syrien au cours des dernières semaines, faisant craindre une augmentation substantielle de sa capacité de nuisance. L’aviation russe continuait de frapper hier en journée des positions de l’EI dans la province de Hama, après 72 heures de raids intenses notamment dans la région de Raqqa et de Homs. Depuis le...

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Cela fait dix ans maintenant que des ahuris nous rabâchent les oreilles en répétant en boucle que Bachar a gagné ! Petite précision : ce sont ces mêmes ahuris qui ont fêté en fanfare, il y a quelques années, l'avènement du Liban nouveau et fort avec Aoun, Nasrallah et autres hurluberlus. Mais où sont-ils ces ahuris ? On ne les entend plus. Que pensent-ils de la situation d'aujourd'hui dans ces pays modèles que sont la Syrie et le Liban ?

Robert Malek

01 h 59, le 12 janvier 2021

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  • Cela fait dix ans maintenant que des ahuris nous rabâchent les oreilles en répétant en boucle que Bachar a gagné ! Petite précision : ce sont ces mêmes ahuris qui ont fêté en fanfare, il y a quelques années, l'avènement du Liban nouveau et fort avec Aoun, Nasrallah et autres hurluberlus. Mais où sont-ils ces ahuris ? On ne les entend plus. Que pensent-ils de la situation d'aujourd'hui dans ces pays modèles que sont la Syrie et le Liban ?

    Robert Malek

    01 h 59, le 12 janvier 2021

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