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Le bras de fer se durcit après la réélection controversée de Ouattara


Le bras de fer se durcit après la réélection controversée de Ouattara

Un homme vêtu d'un t-shirt avec la photo du président Alassane Ouattara à Abidjan, le 31 octobre 2020. AFP / Issouf SANOGO

Le bras de fer s'est durci mardi en Côte d'Ivoire après la réélection d'Alassane Ouattara pour un troisième mandat controversé, le gouvernement ayant bloqué chez eux des leaders de l'opposition, accusée de "complot", car voulant former un "gouvernement de transition".

M. Ouattara, 78 ans, a été réélu sur le score fleuve de 94,27% des voix au premier tour, selon les résultats provisoires de la présidentielle de samedi proclamés par la Commission électorale indépendante (CEI) mardi à l'aube. L'opposition, qui a boycotté le scrutin, juge son troisième mandat "anticonstitutionnel" et avait appelé ses partisans à une campagne de "désobéissance civile". Une quarantaine de personnes ont été tuées depuis le mois d'août dans le pays dans des violences électorales, ayant tourné parfois à des affrontements interethniques, dont neuf après le scrutin.

Blocus des opposants

La situation s'est tendue mardi après-midi entre le pouvoir et l'opposition. Les forces de l'ordre ont investi la résidence à Abidjan du leader de l'opposition Henri Konan Bédié, que l'opposition a proclamé président d'un "Conseil national de transition", empêchant une conférence de presse.

L'ancien chef de l'Etat, 86 ans, n'a pas été inquiété, selon une source diplomatique. Mais son numéro deux, Maurice Kakou Guikahue, a été emmené par la police, selon plusieurs journalistes présents à proximité de la résidence. Selon des sources proches du gouvernement, M. Guikahue n'a cependant pas été arrêté, mais reconduit à son domicile. Deux autres responsables de l'opposition ont indiqué à l'AFP être bloqués à leur domicile par les forces de l'ordre.

"Je suis chez moi", "ils (les forces de l'ordre) ont bouclé toutes les sorties de mon domicile", a déclaré Assoa Adou, secrétaire général d'une branche du Front populaire ivoirien (FPI) proche de l'ancien président Laurent Gbagbo. "Je vais bien, mais c'est le blocus", a déclaré de son côté Abdallah Albert Mabri Toikeusse, ancien ministre qui a rejoint l'opposition avant l'élection présidentielle.

Quant au porte-parole de l'opposition, Pascal Affi N'Guessan, président d'une autre branche du FPI, "je ne crois pas qu'il ait été arrêté", a affirmé à l'AFP son propre porte-parole Issiaka Sangaré, faisant état également d'un "blocus devant chez lui".

"Préserver les vies humaines"

Excédé par l'attitude de l'opposition, le gouvernement ivoirien l'a accusé de "complot contre l'autorité de l'Etat", et indiqué avoir saisi la justice contre ses responsables, n'excluant "aucune option" pour les faire plier.

La Cédéao (Communauté des Etats d'Afrique de l'Ouest), l'Union africaine et les Nations unies ont appelé dans un communiqué commun à la "retenue pour préserver les vies humaines", et l'opposition à "respecter l'ordre constitutionnel" et "privilégier la voie du dialogue". L'Union européenne a exprimé "sa vive préoccupation concernant les tensions, les provocations et les incitations à la haine qui ont prévalu et continuent de subsister dans le pays autour de ce scrutin".

L'ONU s'est inquiétée mardi de l'afflux de quelque 3.200 ressortissants de Côte d'Ivoire dans les pays voisins (Liberia, Ghana et Togo), pour fuir les violences dix ans après la crise qui avait suivi la présidentielle de 2010, faisant 3.000 morts. Elu en 2010, réélu en 2015, Ouattara avait annoncé en mars qu'il renonçait à une nouvelle candidature, avant de changer d'avis en août, à la suite du décès de son dauphin désigné, le Premier ministre Amadou Gon Coulibaly.

La constitution ivoirienne prévoit un maximum de deux mandats, mais le Conseil constitutionnel a estimé qu'avec la nouvelle Loi fondamentale adoptée en 2016, le compteur des mandats présidentiels a été remis à zéro. Ce que l'opposition conteste.

La CEI a fait état d'une participation de 53,9% à l'élection présidentielle, chiffre contesté par l'opposition. Ce taux de participation constituait un enjeu important du scrutin du fait du boycott de l'opposition, seul le candidat indépendant Kouadio Konan Bertin ayant fait campagne contre le président sortant. Arrivé deuxième avec 1,99% des voix, "KKB" a "félicité" M. Ouattara pour sa victoire.

La mission d'observation de l'Union africaine a estimé que "l'élection s'est déroulée de manière globalement satisfaisante", mais le Centre Carter a lui jugé que "le contexte politique et sécuritaire n'a pas permis d'organiser une élection compétitive et crédible".

Chez les électeurs, les avis étaient tranchés. Hamed Dioma, ferrailleur du quartier populaire d'Adjamé à Abidjan, se disait "très heureux" que "ADO" (Alassane Dramane Ouattara) puisse "continuer" à "bien travailler pour le pays". Tandis qu'à Daoukro (centre), le fief de Bédié, Firmin, un jeune sur un barrage érigé depuis samedi, qualifiait l'élection de "mascarade". A l'instar de beaucoup d'Ivoiriens, une coiffeuse d'Abidjan qui n'a pas voté se disait elle "fatiguée de la politique: Tout ce qu'on veut c'est que ça s'arrête".

Le bras de fer s'est durci mardi en Côte d'Ivoire après la réélection d'Alassane Ouattara pour un troisième mandat controversé, le gouvernement ayant bloqué chez eux des leaders de l'opposition, accusée de "complot", car voulant former un "gouvernement de transition".M. Ouattara, 78 ans, a été réélu sur le score fleuve de 94,27% des voix au premier tour, selon les résultats...