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Culture - Cinéma

Wassim Geagea veut parler des gens qu’on dit simples

Son court-métrage « Omé » a obtenu l’Étoile d’argent au Festival international du film d’el-Gouna en septembre 2019. Et depuis, il parcourt le monde, du festival du film francophone de Namur à Cinemed Montpellier ainsi qu’à Dubaï. L’œuvre du jeune cinéaste libanais est autant ancrée dans son Liban natal qu’universelle.


« Omé », la vie dans les yeux d’un enfant. Photos DR

Il ne se rappelle pas au juste quand sa passion pour le cinéma est née. Mais en revanche, il sait très bien pourquoi il a choisi ce médium, ce langage pour exprimer toutes ses pensées et les rendre accessibles. Wassim Geagea est né dans le village de Barqa, près de Deir el-Ahmar (Baalbeck). À l’âge de quatre ans, il perd sa mère. Cette tragédie va bouleverser sa vie, forger sa personnalité et faire de lui une personne aux multiples questionnements, sensible à tout ce qui l’entoure. « J’avais beaucoup d’interrogations qui grandissaient en moi sur la mort, la vie et l’existence. Et je cherchais toujours des réponses. De plus, comme le village où j’ai grandi n’avait pas de frontières et les paysages étaient à perte de vue, l’espace prêtait à la rêverie et à la contemplation. J’ai senti que j’avais beaucoup de rêves que je voulais exprimer. Mais pourquoi le cinéma, me demanderez-vous, alors qu’il y a d’autres médias disponibles ? Je vous réponds, sans hésiter, que c’était le plus adéquat et le plus convenable pour diffuser mes idées et qu’elles atteignent le plus de monde possible. »

Rêveur mais déterminé

C’est donc à l’âge de 15 ans que le jeune Wassim décide de la voie à suivre. Il fera du cinéma. Après la faculté des beaux-arts de l’Université libanaise où il obtient un diplôme en audiovisuel, il décroche une maîtrise de l’Institut des études scéniques et audiovisuelles (Iesav). Son projet de diplôme My Grandfather’s photo (La photo de mon grand-père) reçoit un très bon accueil et obtient le premier prix du Festival du cinéma européen à Beyrouth en 2012. Il sera également projeté à l’Institut du monde arabe. Wassim Geagea a beaucoup d’histoires à raconter et un tas d’images qui se bousculent dans sa tête. Son imaginaire s’envole vers des horizons toujours plus larges mais s’imprègne surtout du riche sol qu’il foule et se nourrit de ces personnages hauts en couleur qu’il rencontre tous les jours. Il veut parler de ces gens qu’on dit simples mais qui sont très riches de l’intérieur. « Quand on décide de faire un film, c’est une lourde responsabilité. Il faut bien connaître son sujet. Or moi, je connais toutes ces personnes simples avec lesquelles j’ai longtemps vécu et j’essaye de reproduire l’image la plus vraie et la plus authentique de cet environnement… Et surtout, pas de manière folklorique. Ces personnes ont une vision très profonde de la vie et une expérience plus riche que n’importe quel livre ou manuscrit. C’est une vision loin du vacarme de la ville. Je peux dire que j’ai tout appris d’elles. » Et le réalisateur d’ajouter : « Bien sûr, je me suis inspiré du cinéma international, mais surtout du vécu. J’ai donc adopté la technique cinématographique la plus simple et qui pourrait s’adresser à tout le monde. Le film que je réalise doit atteindre le plus de spectateurs possible pour que ce soit une plateforme de discussion. Si mon cinéma me ressemble, et parle de moi, il a cependant des influences du cinéma italien néoréaliste d’après-guerre ainsi que du cinéma iranien où l’épure et la simplicité de la forme contrastent avec la profondeur et la richesse du fond. »

Pour l’amour d’« Omé »

C’est ainsi que naît le second projet de court-métrage Omé (Maman), dans la même lignée que le premier et qui prendra un an et demi d’écriture, de tournage et de montage. Toujours le même cadre du village, les mêmes personnages qui sont riches en expériences et des propos qui abordent les thèmes de l’existence, de la vie et de la mort. Dans Omé – Étoile d’argent au Festival international du film d’el-Gouna en septembre 2019 et sélectionné dans de nombreux festivals dont celui de Namur et Cinemed Montpellier –, on suit l’histoire d’un petit garçon qui perd très tôt sa mère et qui tient Dieu responsable de la disparition de l’être le plus cher à son cœur. Il menace Jésus sur la Croix de lui voler la statue de sa mère qui se tient à ses côtés si le bon Dieu ne lui rend pas sa mère à lui. « La perte d’un papa ou d’une maman est très difficile à vivre, dit Wassim Geagea. C’était la première fois que je côtoyais la mort. À l’âge de quatre ans, on n’a pas beaucoup de mémoire, alors quand j’ai grandi, je suis allé à la recherche de cette mémoire. Je voulais comprendre toute cette colère et cette révolte enfouies. Je voulais aussi comprendre pourquoi on a recours à la religion pour avoir des réponses. Jusqu’à présent, je n’ai pas arrêté ma quête car je n’ai pas encore de réponse et je crois que je n’en aurai pas. De plus, si j’ai choisi l’angle de l’enfant, ce n’est pas pour le seul fait qu’il me représente, mais je suis convaincu qu’un gosse peut se permettre de poser toutes sortes de questions sans être aliéné par les tabous de la société. L’enfant est un pur et son imagination peut nous emporter loin. » Et Geagea de poursuivre : « Omé est un film personnel, certes, mais aussi universel. C’est une plateforme de questionnements. » Ce court-métrage à succès a été soutenu par le Doha Institute. « Il a été réalisé grâce à une poignée de personnes qui ont mis tout leur amour et d’une manière bénévole pour qu’il voie le jour. Les coproducteurs Gabriel Chamoun et Gaby Zarazir, Tony Élie Kanaan, le coscénariste ainsi que les techniciens de l’éclairage, du montage, du décor et le DOP. Ce sont eux qui ont porté le film à l’écran. J’espère que bientôt naîtra une véritable industrie du cinéma libanais et que ce dernier portera sa voix très haut et très loin et que ça ne se limitera pas à de simples initiatives personnelles », conclut Wassim Geagea.


Il ne se rappelle pas au juste quand sa passion pour le cinéma est née. Mais en revanche, il sait très bien pourquoi il a choisi ce médium, ce langage pour exprimer toutes ses pensées et les rendre accessibles. Wassim Geagea est né dans le village de Barqa, près de Deir el-Ahmar (Baalbeck). À l’âge de quatre ans, il perd sa mère. Cette tragédie va bouleverser sa vie, forger sa...

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