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Culture - En librairie

Justice est rendue à la mémoire de Rose Antoun

Une femme de lettres, un peu restée dans l’ombre et ignorée du grand public, mais qui a largement contribué aux mouvements des militantismes féminins arabes, surtout à l’époque de la « Nahda ».

« Rose Antoun », un ouvrage luxueusement édité dédié au souvenir et au riche parcours de cette femme de lettres restée dans l’ombre.

On l’assimile à la trajectoire de May Ziadé, et comme l’épistolière de Gebran, elle fut une journaliste à la plume prolifique, acerbe et ardente. Rose Antoun (1882-1955) a vécu à l’ombre de deux géants de la pensée et du journalisme arabes qu’étaient son frère Farah Antoun et son époux Nicolas Haddad.

Aujourd’hui, avec la publication de Rose Antoun (313 pages), pavé luxueusement édité avec couverture cartonnée, dédié à son souvenir et son riche parcours (avec le concours d’Ahmad Asfahani pour la conception de l’ouvrage et sous la supervision de Hoda et Maria Fouad Haddad pour les textes et écrits), se redessinent les contours d’une carrière. Une carrière littéraire et journalistique qui a pris son envol en 1903 lorsque le frère de Rose l’a aidée à mettre à jour à Alexandrie le quotidien en langue arabe Al-sayidat wal-banat (« Les dames et les filles »). Un tremplin, une tribune pour s’exprimer et incarner la voix d’une multitude de voix de femmes qui n’avaient presque pas de voix au chapitre de la vie…

Malgré moult analyses, recherches et explorations littéraires, le nom de Rose Antoun est curieusement resté dans l’ombre, aussi bien du point de vue littéraire (pourtant son style avait du punch et restait attachant !) que dans le domaine de la pensée et de la société. Et cela en dépit de la grande étude sur La Cause de la femme (somme parue en trois tomes sous l’égide de Mohammad Kamel al-Khatib), qui n’a guère jeté la lumière sur une importante suffragette du féminisme de la Nahda qui avait pourtant fait du bruit et du tapage mais sans scandale retentissant. C’était comme une alerte, un son de cloche qu’il fallait faire résonner et écouter.

Féminisme naissant

De la cause de la femme à travers les lorgnettes des lettrés de la Nahda, au second quotidien en langue arabe qui a détonné (rien qu’avec son titre!), Al-sayidat wal-rijal (« Les dames et les hommes »), publiant éditoriaux et pamphlets retentissants, en passant par les commentaires concernant l’éducation, les traditions qui momifient les filles d’Ève ou les divertissements prétendument innocents (matinées avec café, soirées enfumées au poker, oiseuses parlotes vestimentaires, frivolités de salon), tout cela est passé par le tamis de la réflexion avant-gardiste de Rose Antoun qui a beaucoup voyagé entre le Liban, la Syrie, l’Égypte et outre-Atlantique.

Sans être une Simone de Beauvoir, Rose Antoun a passé en revue non seulement tous les états des lieux, mais aussi les attentes et les espérances de la femme. Avec des textes courageux pour l’époque et qui chatouillaient, à rebrousse-poil, bien des machistes…

Sans être en dehors des modes, dans un ton juste et de témoignage, ce livre réparateur vient juste à temps pour ressusciter une emblématique figure féminine d’un passé récent. Aujourd’hui, avec Colette Khoury, Joumana Haddad, Leila Baalbacki, Emily Nasrallah, Ghada el-Samman, Hoda Barakat (et on ne les a pas toutes nommées), les voix des femmes sont allées, en toute intrépidité, encore plus loin dans leur féminitude, dans leurs doléances, leurs contestations et leurs revendications.

Mais avec Rose Antoun, on retrouve un peu les embryons de cette lutte pour un féminisme naissant. Et pour ne rien gâcher au plaisir de lire, il y a cette subtilité et richesse dans l’emploi de la langue arabe que la journaliste chevronnée possédait à fond. Un atout de plus non négligeable…

On l’assimile à la trajectoire de May Ziadé, et comme l’épistolière de Gebran, elle fut une journaliste à la plume prolifique, acerbe et ardente. Rose Antoun (1882-1955) a vécu à l’ombre de deux géants de la pensée et du journalisme arabes qu’étaient son frère Farah Antoun et son époux Nicolas Haddad.Aujourd’hui, avec la publication de Rose Antoun (313 pages), pavé...

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