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Culture - En librairie

« Devenir » Michelle Obama : bien ficelé, mais pas très marquant...

Les Mémoires de l’ex-First Lady d’Amérique ont bénéficié d’une sortie en librairie en grande fanfare, avec un réseau de 24 traductions, dont une version en langue arabe.


La biographie de Michelle Obama, traduite en 24 langues, dont l’arabe chez Hachette Antoine.

Qu’est-ce qu’on connaissait au juste de cette femme au beau sourire, à la taille élancée, à l’élégance discrète, aux propos mesurés ? Quelques déhanchements sur une musique hip hop, un refrain chantonné avec grâce (bonjour Beyoncé...), l’engouement pour le Thriller de Michael Jackson, un charmant pas de deux pour quelques pirouettes avec son président de mari sous les spots du monde entier, une empathie pour une vie saine et le refus de l’obésité ? Ce n’est certainement pas pour cela que Michelle Obama est devenue superstar et coqueluche du grand public aux États-Unis et ailleurs.

Pour cette avocate qui a le respect des gens de son métier, qui a marqué son temps et ne s’est pas contentée, avec son charisme, sa stature, son verbe parfois guère tendre, de rester à l’ombre de son époux Barack Obama, il y a quelque chose de plus. Et elle le révèle aujourd’hui, par-delà sa percutante interview avec Oprah Winfrey, aux lecteurs de la planète (avec un pharaonique droit d’auteur de 65 millions de dollars...) à travers ses confidences couchées sur papier dans Becoming, traduit en 24 langues dont l’arabe, Wa asbahtou (Antoine Hachette - traduction Abdel-Ahad, A. Salem et I. Khadra - 442 pages). Des confidences plutôt douces, avec des piques acérées parfois, mais pas amères, mettant ainsi à nu ce que le public a droit de savoir ou connaître d’une icône.

Sans talent littéraire tapageur, sans avoir l’ambition de plume d’une Toni Morrison ou de Joyce Carol Oates, mais avec le courage des mots, le discernement et la franche volonté de les dire, Michelle Obama a fait rêver le citoyen américain s’il lui arrivait de vouloir briguer la présidence. Rêve écarté par la grande dame qui confesse son désintérêt de la politique, surtout après les huit années d’un mandat où elle a dû frayer avec tous les sphères, les diktats, les controverses et les nuances mielleuses ou perfides du pouvoir.

Pour Michelle Obama, née La Vaughn Robinson il y a 54 ans, ce livre est divisé en trois parties (Devenir moi, Devenir nous, Devenir plus…), avec un avant-propos et un épilogue. Elle trace une enfance consacrée au labeur dans une famille soudée et aimante, ce qui la conduira à ses diplômes supérieurs du barreau à Princeton et Harvard pour des Mémoires consacrés à la discrimination raciale. Discrimination qu’elle affrontera au quotidien avant de rencontrer l’élu de son cœur Barack Obama qu’elle épouse en 1992.

Dans son opus, foisonnant de vie, on suit avec intérêt, tel un téléfilm américain bien ficelé mais qui ne marque pas, le parcours exceptionnel qui l’a menée d’un quartier populaire de South Side de Chicago à la Maison-Blanche.

Entre-temps, le voile est levé sur les fausses couches, les problèmes de grossesse, la naissance de ses deux filles Malia et Sasha, conçues in vitro, les crises de son couple qui suit une thérapie pour éviter le naufrage, la cage dorée d’une vie régie brusquement par les rigueurs du protocole, les coulisses d’une Maison-Blanche qui fait rêver plus d’un, les combats pour l’éducation bénévole des jeunes… Autant d’images où le sensationnel n’a rien à voir, mais demeure quand même le sens du témoignage.

Et pourtant, quelle victoire éclatante pour cette jeune fille qui a été propulsée au faîte de la société et appelée à rencontrer les grands de ce monde.

Qu’aurait pu en penser Martin Luther King, lui qui a dit « I have a dream » ? C’est même aller peut-être ici au-delà du rêve... Mais de ses propres aveux, Michelle Obama, toujours les pieds sur terre, notion qu’elle a inculquée à ses deux filles, écrit ces lignes en toute sage lucidité : « Je suis une personne ordinaire qui s’est embarquée dans une aventure extraordinaire… »


(Lire aussi : Michelle Obama, star à Londres pour présenter ses mémoires)


« Suis-je à la hauteur ? »

Bien sûr, par-delà le trémolo des sentiments, les combats pour une carrière et l’intimité féminine, mine de rien, la politique est omniprésente pour celle qui a vigoureusement soutenu la campagne électorale de sa moitié. Mais comme tout livre politicien, on n’en saura jamais davantage que ce que tout le monde sait déjà. Sauf ici, peut-être, la colère de la Première dame devant les vulgarités des tweets et les propos de Donald Trump, surtout en ce qui concerne les femmes (cette histoire de « tenir les femmes par la chatte » l’a littéralement révulsée). Elle ne lui pardonne pas non plus l’injure faite à son mari sur sa citoyenneté en disant qu’il est né au Kenya...

Constamment, depuis sa première jeunesse, Michelle Obama s’interrogeait, anxieuse : « Suis-je à la hauteur ? » Et elle a travaillé toujours dur pour être en harmonie avec-elle-même et répondre aux attentes des autres. À la lire aujourd’hui et en regardant sa photographie sur la couverture, épaules dénudées, ongles laqués de tigresse, cheveux noir de geai cascadant autour d’un visage radieux au sourire large, on réalise que Michelle Obama est de celles qui ne lâchent rien.

Elle s’est battue sur tous les fronts, femme noire dans un monde d’hommes blancs. Mais elle a le talent de faire passer avec tact et une pointe d’humour et d’ironie ses messages contre la ségrégation, l’intolérance, le refus des minorités, l’injustice, la vulgarité, le manque de liberté, avec le besoin de compréhension.

Mais devant ce vaste programme, plusieurs vies ne sont pas suffisantes…

Pour ce livre qui est en tête de vente depuis sa sortie en novembre dernier, le lecteur a droit non seulement à une voix particulière, mais est aussi invité à revisiter (ou redécouvrir) la Maison-Blanche pour réajuster ses lorgnettes sur la négritude, sa modernité, son ascension, son importance, son émancipation, sa détermination, sa force, sa libération, son évolution, sa place au soleil.


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Qu’est-ce qu’on connaissait au juste de cette femme au beau sourire, à la taille élancée, à l’élégance discrète, aux propos mesurés ? Quelques déhanchements sur une musique hip hop, un refrain chantonné avec grâce (bonjour Beyoncé...), l’engouement pour le Thriller de Michael Jackson, un charmant pas de deux pour quelques pirouettes avec son président de mari sous les spots...

commentaires (1)

Je n'ai pas encore lu ce livre. Avant la première élection de son mari sa langue avait fourché devant les caméras, quand elle a dit: "c'est la première fois que je suis fière de mon pays". Le candidat a redressé la chose assez habillement par la suite. ça en dit long sur la frustration dans laquelle elle avait vécu avant de devenir première Dame.

Shou fi

18 h 21, le 03 janvier 2019

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Commentaires (1)

  • Je n'ai pas encore lu ce livre. Avant la première élection de son mari sa langue avait fourché devant les caméras, quand elle a dit: "c'est la première fois que je suis fière de mon pays". Le candidat a redressé la chose assez habillement par la suite. ça en dit long sur la frustration dans laquelle elle avait vécu avant de devenir première Dame.

    Shou fi

    18 h 21, le 03 janvier 2019

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