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Culture - Exposition

Un journal sans verbe mais avec des couleurs et des dessins...

Une soixantaine d'huiles de Jamil Molaeb, grandes et petites dimensions confondues, tapissent les cimaises de la galerie Jeanine Rubeiz.

L’œuvre de Jamil Molaeb : confidences et révélations douces pour un univers tendre et un quotidien bercé par la nature, les traditions, les voyages et la chaleureuse présence des femmes.

Le béret gris vissé sur la tête et les cheveux aujourd'hui une touffe plus blanche que neige, le regard toujours intense quoique un peu fatigué, le jeans cool sur une chemise à grands carreaux verts, à 69 ans, pour sa trente-sixième expo solo, Jamil Molaeb est égal à lui-même et à son œuvre. Ces toiles, un journal aux multiples facettes ouvert comme un livre sur un lutrin aux pages offertes aux regards, parlent de son quotidien paisible, laborieux et inspiré. Ainsi que de ses nombreux voyages : de son point d'ancrage et d'origine, Baïssour (où se dresse son musée dans un cadre verdoyant), à New York en passant par Fès, Palmyre et d'autres points du monde qui l'ont marqué et intéressé.

Fervent lecteur de poésie (il a le compagnonnage des textes de Mohammad el-Maghout, Mahmoud Darwiche, Nizar Kabbani, Adonis, Talal Haïdar, Michel Trad et la prose d'Amine Nakhlé et de Saïd Takieddine), il ne se nourrit pas moins de la sagesse des écrits des souvenirs de Kazantzakis et de la libre spiritualité d'Osho.
Dans cette déambulation respirant le grand air, la liberté, la méditation et l'espace, l'on retrouve Molaeb tel qu'en lui-même, entre abstraction ciselée et patiemment architecturée et réalisme simple et souriant, sous influence pharaonique ou sumérienne, surtout pour ces dessins horizontaux ou verticaux, subtils hiéroglyphes qui se pressent pour traduire l'essence de l'être et de la nature. Avec cette virtuose profusion, en une file indienne, d'oiseaux, de coqs, de pigeons, de gargoulettes, de poissons. Et brusquement, petite surprise ou facétie d'artiste, un cellulaire ou une voiture...

 

Accro à la térébenthine
Pas de gravure, pas de gouache, pas d'aquarelle mais simplement des huiles sur toile ou sur bois car la xylographie est le dernier dada (depuis une bonne décade, dit-il, car il aime la tendresse, la texture, la couleur, l'odeur, le toucher du bois !) de ce vénérable vétéran du pinceau et de la palette. La peinture ici a les accents, par-delà bonheur de vivre et de créer, d'un témoignage vivant, tonique et coloré, sur le quotidien. Vécu comme un bonheur permanent. Il commente son indéfectible fidélité à la tâche en ces termes, chargés d'une pointe d'humour : « Mon sang est comme quelqu'un habitué à la cigarette ou à un verre. Moi je suis habitué à la térébenthine... ».

Pour cet homme calme et mesuré dans les propos, « la peinture justifie l'existence ». Et pour ceux qui seraient intrigués par une journée du maître du domaine de Baïssour, la réponse est claire : « Je me lève tous les matins à sept heures trente pile. Je prépare une toile. Je mets un drap sur le canapé. Je cherche un journal pour ne pas salir ma palette et à proximité de moi un bout de charbon et une règle. Je trace des lignes sur la toile. Deux heures au moins de travail et du "matté" que j'avale à petites gorgées... Ensuite, je quitte Baïssour pour Beyrouth où je m'installe au café Costa à Hamra. Deux journaux pour avoir les échos du monde : an-Nahar et al-Hayat. Puis je rencontre des amis, des journalistes, mes étudiants... Je ne déjeune pas dehors, je remonte chez moi. J'écoute de la musique, je lis à nouveau. Mon île et le prolongement de mes contemplations, c'est Baïssour avec sa vue sur le Barouk, Sannine et Niha... ».

Un secret, une cachotterie à révéler ? L'homme, qui eut les conseils avisés de Paul Guiragossian et de Chafic Abboud, par-delà maturité et sagesse de l'âge, est transparent et a gardé une âme d'enfant comme le montrent ses toiles. Petit sourire amusé, quand il déclare : « Par mesure de précaution, je ne montre pas de prime abord mon travail à tout le monde... ».

Après une carrière au sommet de plus d'un demi-siècle, quel rêve reste inassouvi, quelle ambition le dévore encore ? « J'ai encore trois mille mètres carrés dans mon jardin, précise-t-il, que je voudrais remplir de sculptures taillées dans le fer, le bronze, la pierre ou même coulées dans le béton... ». On en reparlera un jour, c'est sûr !

 

Galerie Janine Rubeiz
« Diaries » (Journal) de Jamil Molaeb. Jusqu'au 27 septembre.

 

Pour mémoire

Jamil Molaeb, son musée, la mer, les pinèdes et chênaies

Le béret gris vissé sur la tête et les cheveux aujourd'hui une touffe plus blanche que neige, le regard toujours intense quoique un peu fatigué, le jeans cool sur une chemise à grands carreaux verts, à 69 ans, pour sa trente-sixième expo solo, Jamil Molaeb est égal à lui-même et à son œuvre. Ces toiles, un journal aux multiples facettes ouvert comme un livre sur un lutrin aux pages...

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