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Culture - Rétrospective

La sensualité de la terre, selon Dorothy Salhab Kazemi

Après le bronze, le bois, le fer et le recyclage, la céramique est à l'honneur cette année au Modern and Contemporary Art Museum (Macam) d'Alita, dans la région de Jbeil.

La rétrospective Kazemi au musée Macam.

Transformer la glaise en art, voilà l'œuvre de Dorothy Salhab Kazemi. Née en 1942 à Roumieh, elle a été la chef d'orchestre de la renaissance de la céramique libanaise. Après des études en arts appliqués et en littérature anglaise, elle s'est envolée pour le Danemark, où elle a étudié sous la direction de l'un des plus grands céramistes de l'époque, Gutte Eriksen. « C'est là qu'elle est devenue absorbée par la vie de l'argile », explique César Nammour, directeur du Macam et ami de la céramiste. En Écosse, où elle s'est rendue en 1968, Dorothy Salhab Kazemi a découvert le travail de Bernard Leach. « Elle a été exposée aux meilleurs céramistes, ça l'a considérablement enrichie. »
Et après avoir enseigné pendant deux ans à Glasgow, elle est rentrée à Beyrouth pour devenir la première professeure de céramique au Liban, métier qu'elle a exercé jusqu'en 1982. « C'était une artiste très dévouée, toute sa vie tournait autour de la céramique. Elle mettait de la vie dans ce qu'elle faisait, parce qu'elle était passionnée. »

Grès et porcelaine
Dorothy Salhab Kazemi est aujourd'hui célébrée pour avoir introduit le grès au pays du Cèdre, un matériau obtenu en augmentant la température de cuisson de l'argile jusqu'à 1 200 degrés, contre 900 pour la faïence. Elle est également la première céramiste libanaise à avoir combiné le travail du grès et de la porcelaine. Inspirée par l'artisanat libanais et la sculpture antique, son œuvre est également marquée par ses influences scandinaves, japonaises, et britanniques. « Elle combine la tradition et la modernité, l'artisanat et l'art, l'Orient et l'Occident, l'Est et l'Ouest », souligne César Nammour.
Kazemi utilisait une roue manuelle pour fabriquer ses céramiques, à la fois pour conférer à ses œuvres une identité singulière et pour conserver une certaine intimité avec son matériau. Le recours à cette technique confère à ses pièces fonctionnelles autant qu'à ses sculptures une grande finesse. À cheval entre objet du quotidien et œuvre d'art, ses pots, vases, bols et jarres frappent par leur délicatesse et leur originalité. La magie de son œuvre se trouve dans sa manière unique de tirer de la glaise des structures inspirées des formes végétales et humaines, souvent qualifiées de sensuelles, voire d'érotiques. Pots et sculptures adoptent des profils de fleurs ou de champignons, tandis que les courbes voluptueuses de ses vases évoquent l'anatomie humaine. Ses créations de terre semblent organiques, presque animées.

En rapport avec la vie
Le retour sur l'œuvre de cette artiste emblématique s'inscrit dans la volonté du Macam de préserver la mémoire artistique libanaise et d'en faire profiter la jeune génération. Il y a quatre ans, César Nammour et sa partenaire Gabriela Schaub ont décidé de reconvertir une ancienne usine perchée sur les hauteurs de Byblos en espace d'exposition d'art moderne et contemporain. Mission réussie : l'espace industriel est aujourd'hui un havre de verdure surplombant la vallée d'Adonis, dédié entièrement à la promotion des artistes libanais. Au détour de la rétrospective, on croise une collection impressionnante de sculptures et d'installations, données ou prêtées à l'organisation par les artistes. Les œuvres de Ghassan Christo Saba, Nada Sehnaoui ou encore Ghassan Ghazzal évoquent des sujets à forte résonance politique, comme la situation des femmes au Liban, la guerre civile ou encore l'immigration. « Nous exposons des choses qui sont en rapport avec la vie de tous les jours afin d'éduquer les jeunes aux problèmes contemporains. » À travers l'organisation de compétitions, d'ateliers, de conférences, mais aussi par la conservation d'archives sur l'art libanais, César Nammour et Gabriela Schaub s'efforcent de faire vivre un héritage fragilisé. Parmi leurs projets, on compte également une biennale internationale d'art contemporain, prévue pour septembre. Malgré vents et marées, le Macam compte bien continuer de faire fleurir les œuvres et les idées des artistes libanais.

Transformer la glaise en art, voilà l'œuvre de Dorothy Salhab Kazemi. Née en 1942 à Roumieh, elle a été la chef d'orchestre de la renaissance de la céramique libanaise. Après des études en arts appliqués et en littérature anglaise, elle s'est envolée pour le Danemark, où elle a étudié sous la direction de l'un des plus grands céramistes de l'époque, Gutte Eriksen. « C'est là...

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