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Culture - Rencontre

« Tatianic » Tatiana Primak-Khoury...

Depuis vingt ans, elle n'a jamais été absente du paysage musical libanais, mais seulement discrète. Entrevue en prévision de son concert* et de son nouveau CD dans les bacs, totalement dédié aux compositeurs libanais.

Tatiana Primak-Khoury est une pianiste ukrainienne haut de gamme, installée à Tripoli, libanaise de cœur et d’alliance.

Elle a l'allure et la grâce d'une héroïne des romans de Tourgueniev ou le regard d'une muse qui aurait sans doute nourri l'inspiration de la poésie de Lermontov. Cheveux lisses châtain clair longs jusqu'aux épaules, le regard vert-bleu, le teint d'albâtre, les articulations fines, la voix douce et bien posée. Chandail gris et chemisette à petits carreaux noirs pour une minuscule chaînette en or au cou. Et pour s'exprimer, en tout calme et toute sérénité, c'est un anglais légèrement métissé d'accent ukrainien ou même des phrases en arabe à la prononciation drôlement étrangère, mais parfaitement compréhensible !
Plus de 700 concerts au pays du Cèdre, en Europe et aux États-Unis, plus de huit CD dans les bacs, mère de deux filles (Paulina, 23 ans, et Yelena, 8 ans !), le parcours de Tatiana, formée au Conservatoire de Kiev, est riche et tissé aussi bien d'une culture occidentale que d'une active participation à la révélation du monde de la musique classique libanaise. Elle interprète avec un même brio Beethoven, Chopin, Rachmaninov, Scriabine, Lyatochinsky, Ovehinninkov (le compositeur des films de Tarkovsky) que Gelalian, Hourani, Flueihan, Baz, Succar et bien sûr Houtaf Khoury dont elle défend les couleurs avec becs, ongles et doigts...
Depuis 1997, date charnière où elle partage sa vie entre enseignement au Conservatoire national supérieur de musique et l'Université de Balamand où elle est artiste en résidence, la pianiste a sa vie complètement immergée dans l'actualité musicale libanaise.
Férue de lectures philosophiques (elle vient de terminer les Métamorphoses, non de Kafka mais d'Apulée !) et de poésie soufie, habitée selon les moments par Brahms (surtout le Requiem allemand, car elle a le goût de la combinaison chœur-orchestre), Bach (elle est transportée par sa Messe en si mineur), Chopin, Scriabine, Liatochinsky, admirant les géants du clavier d'autrefois, Rachmaninov, Richter et Horowitz, mais aussi Kissine à la maturité de plus en plus envoûtante, Tatiana Primak-Khoury reçoit compliment et critique avec une égale bonne humeur.
Le meilleur mot des fans ou critiques ? Quelqu'un lui aurait dit que son style est « tatianic », confie-t-elle en riant. Bien sûr par ce qu'il a de grandiose, de majestueux, de torrentiel et non de ce bateau qui coule... Un autre aurait lancé qu'elle est « claviator maximus » en allusion sans doute à « gladiator maximus » et à la force de ses accords rageusement plaqués... et bonjour à Russel Crowe !

Cadences
Pour ce qui est du persiflage, Houtaf, son mari, veillant sur le grain, affirme avoir recueilli parfois dans l'auditoire ces phrases : « Ce n'est pas du Chopin, ou du Schubert »... Qu'est-ce qu'on ne doit pas entendre de la bouche arrogante des snobinards...
Jailli de ses doigts parcourant les touches d'ivoire, dans les bacs vient d'être rangé, en première mondiale, ce CD de 70 minutes intitulé La musique libanaise pour piano. Un point marquant dans les annales de la musique classique pour clavier au Liban. Un point reflétant richesse sonore, originalité, audace, diversité et modernité des compositeurs du pays du Cèdre.
Et c'est bien la première fois que l'on voit sur la rondelle des sillons, en tout bonheur et toute harmonie, côte à côte, les pages pour clavier d'Anis Fuleihan, Boghos Gelalian, Houtaf Khoury, Georges Baz et Toufic Succar. Un édifiant travail (déjà vendu à plus de 400 exemplaires, un succès pour l'univers classique local), salué avec déférence par le rapport de la BBC et Musica. Mais aussi élogieusement cité et commenté par Naxos. Une belle conciliation entre les prosodies occidentales, certaines cadences et atmosphères orientales pour jeter un pont entre trois générations de musiciens libanais à l'inspiration différente, mais appartenant à une même terre et un même ciel. Et surtout, conciliation servie par le talent d'une interprète douée d'une sensibilité vive et dotée d'une incontestable technique pianistique.
Dans le sillage de cette musique et de cet esprit s'inscrit, comme une éloquente illustration, le concert de ce soir. Quelle est l'ambition de Tatiana Primak-Khoury ? Elle le dit en toute clarté : « Que les gens viennent à mes concerts, pour la musique et pour mieux me connaître... »

*Tatiana Primak-Khoury donne un concert de piano ce soir à l'église Saint-Joseph (USJ) à 20h30. Au menu, des pages de Mozart, Schubert, Lysenko, Chopin, Boghos Gelalian, Houtaf Khoury et Walid Hourani.

Elle a l'allure et la grâce d'une héroïne des romans de Tourgueniev ou le regard d'une muse qui aurait sans doute nourri l'inspiration de la poésie de Lermontov. Cheveux lisses châtain clair longs jusqu'aux épaules, le regard vert-bleu, le teint d'albâtre, les articulations fines, la voix douce et bien posée. Chandail gris et chemisette à petits carreaux noirs pour une minuscule...

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