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Économie - Focus

Les pays du Golfe doivent-ils garder la « parité » avec le dollar ?

Les Émirats arabes unis et le Qatar indexent leurs monnaies sur le billet vert. Tout comme l’Arabie saoudite, Oman et Bahreïn ; tandis que le Koweït lie la sienne à un panier de devises, dont le dollar. Paul Cowan/Bigstock

La chute des prix du pétrole met à rude à épreuve la politique d'indexation des monnaies des monarchies du Golfe sur le dollar américain, sans toutefois amener pour l'instant ces pays à abandonner cette pratique, constatent des analystes.


L'Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, le Qatar, Oman et Bahreïn indexent leurs monnaies sur le billet vert, tandis que le Koweït, le sixième membre du Conseil de coopération du Golfe (CCG), lie son dinar à un panier de devises, dont le dollar. Le doute s'est installé sur l'opportunité pour les pays du CCG, frappés de plein fouet par l'effondrement des cours du brut, de maintenir cette politique alors que la reprise de l'économie américaine et le relèvement des taux d'intérêt aux États-Unis ont renforcé le dollar.
Pour maintenir l'indexation de leurs monnaies, les monarchies du Golfe, à l'exception du Qatar, ont relevé leurs taux d'intérêt en décembre, suivant une mesure similaire de la Réserve fédérale, alors que leurs économies ont besoin exactement du contraire. Ces monarchies sont désormais confrontées à un dilemme : maintenir l'indexation ou adopter un système de change flexible, permettant de dévaluer leurs monnaies par rapport au billet vert.


« Maintenir l'indexation est coûteux. La Banque centrale doit être prête à acheter ou vendre sa monnaie sur le marché libre pour garder l'indexation, ce qui pourrait réduire ses réserves en devises étrangères », explique M. R. Raghu, responsable des recherches au Kuwait Financial Center. « Les recettes pétrolières, qui contribuent à hauteur de 80 % des revenus des gouvernements du CCG, ont chuté de 70 % depuis la mi-2014, rendant plus sujette aux critiques l'indexation de leurs monnaies, avec la baisse des réserves de change », souligne cet expert.
Les États du CCG, à l'exception de Bahreïn et Oman, disposent pour le moment d'énormes réserves leur permettant de maintenir l'indexation. Mais pour certains spéculateurs, ces pays, Arabie saoudite en tête, ne pourront pas maintenir indéfiniment l'indexation sur le dollar.

 

Divergence des politiques
Jan Randolph, responsable de l'analyse des risques souverains à IHS Global Insight, estime que les performances contrastées des économies des États-Unis et du CCG vont augmenter la pression sur le régime de taux de change fixe. Leurs politiques monétaires devraient aussi diverger, selon lui. Les États du CCG ont besoin de monnaies faibles et de taux d'intérêt bas pour soutenir leurs économies en difficulté, en développant notamment les secteurs non pétroliers, explique M. Randolph. Plus les politiques monétaires vont diverger, « plus il sera logique d'avancer vers un régime de change plus flexible ».
Mais le maintien des indexations sur le dollar favorise une stabilité financière et donne une assurance aux économies du CCG dans une région fragilisée par les tensions géopolitiques. Il contribue aussi à contenir l'inflation et à renforcer la confiance des investisseurs étrangers.


Des producteurs de pétrole, comme la Russie, le Kazakhstan, l'Azerbaïdjan et le Nigeria, ont déjà dévalué leurs monnaies, augmentant leurs recettes pétrolières en monnaies locales, ce qui a aidé à freiner leurs déficits budgétaires. Néanmoins cela a un prix. La dévaluation « provoque généralement une inflation plus élevée et se traduit souvent par une baisse du niveau de vie, ce qui peut nuire à la stabilité sociale », a noté Standard and Poor's dans une récente étude.


Selon des analystes, si les pays du CCG renoncent à l'indexation, certaines de leurs monnaies pourraient perdre 20 % ou plus de leur valeur. Cela consoliderait, en termes de monnaies locales, les recettes pétrolières et les réserves budgétaires des fonds souverains de ces pays, souligne Sebastian Henin, responsable de la gestion d'actifs chez The National Investor d'Abou Dhabi.
Le secteur de l'hôtellerie à Dubaï pourrait aussi en bénéficier car l'émirat deviendrait une destination touristique plus abordable et un centre plus attrayant pour les entreprises non pétrolières, explique-t-il. Des analystes s'attendent d'ailleurs à ce que les Émirats arabes unis soient le premier pays du Golfe à renoncer à la parité avec le dollar.
La fuite de capitaux est un autre risque pour les monarchies du Golfe en cas de dévaluation car « les investisseurs chercheraient à placer leurs actifs sur d'autres marchés », indique M. Raghu, estimant qu'un abandon de l'indexation sur le dollar serait « une mesure extrême. »

 

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