Rechercher
Rechercher

Liban - Onu-Liban

Le dossier des personnes disparues au Liban piétine, par manque de volonté politique

La directrice de la Commission internationale, Kathryne Bomberger, à « L'OLJ » : « Dans de nombreux cas, ceux qui ont commis ces crimes sont au gouvernement. »

Kathryne Bomberger est née à Beyrouth et connaît bien le Liban.

Depuis le début de la guerre civile, plus de 70 000 personnes ont été portées disparues au Liban. Les nombreuses initiatives pour résoudre cette question sont restées sans suite. « Nous avons essayé d'aider le Liban dans ce sens. Malheureusement, le pays n'est pas vraiment préparé à faire quelque chose pour ces disparus », affirme à L'Orient-Le Jour Kathryne Bomberger, directrice générale de la Commission internationale pour les personnes disparues (CIPD), venue à New York pour prendre part à la réunion en formule arria (réunions confidentielles et informelles) du Conseil de sécurité de l'Onu, qui s'est tenue le 27 janvier au Palais de Verre.

La réunion, qui s'est ouverte le même jour que les pourparlers de Genève sur la Syrie, a porté sur la responsabilité des personnes lors d'un conflit, les violations des droits de l'homme, les catastrophes, la criminalité organisée, la migration et d'autres causes d'absence involontaire. La séance d'information a été organisée par la CIPD et présidée par le représentant du Royaume-Uni auprès de l'Onu, l'ambassadeur Matthew Rycroft. Elle a mis en exergue le « grand nombre » de personnes disparues, une question « qui prolonge le traumatisme des conflits, exacerbe la fragilité de la paix et fait obstacle au développement de la société démocratique ».

Ont pris tour à tour la parole la représentante permanente des États-Unis à l'Onu, Samantha Power, le haut-commissaire des Nations unies pour les Droits de l'homme, le prince Zeid Raad al-Hussein, le président de la CIPD, Thomas Miller, le président du Centre international pour la justice transitionnelle, David Tolbert, la représentante de l'organisation de la société civile mexicaine Cadhac, Consuelo Morales, et Kathryne Bomberger, qui porte une affection particulière au pays du Cèdre. « Je suis née à Beyrouth où j'ai grandi. Je connais très bien le Liban. Ma grand-mère est libanaise et mon père a travaillé avec la Banque mondiale », confie-t-elle.


(Lire aussi : « Fus'hat amal », une plateforme numérique pour garder vivante la mémoire des disparus)

 

Échec de l'initiative au Liban
« Les tentatives de créer au Liban une commission pour les personnes disparues ont échoué. L'initiative prise par une organisation non gouvernementale dans ce sens n'a pas abouti. Nous avons offert notre aide à maintes occasions, mais sans succès », déplore Kathryne Bomberger. Et de poursuivre : « Nous serions très heureux de pouvoir aider. Mais le Liban doit encore manifester la volonté politique d'avancer dans cette direction. C'est le problème que nous avons rencontré avec de nombreux pays. C'est difficile, parce que les disparitions sont liées à des crimes, et dans de nombreux cas, ceux qui ont commis ces crimes sont au gouvernement », note-t-elle.
« Il est essentiel de pouvoir coordonner notre travail avec les gouvernements et de créer cette volonté politique absente. Les ONG avec lesquelles nous travaillons y contribuent », poursuit Kathryne Bomberger, tout en ajoutant que la présence sur le terrain d'organismes et agences de l'Onu représente « une grande aide pour nous ».

Au sujet du financement de cet effort, la responsable onusienne affirme : « Nous avons des fonds volontaires. Notre organisation est fondée sur un traité. Son siège a été déplacé de Sarajevo à La Haye afin que nous puissions travailler directement avec la Cour pénale internationale (CPI), indique-t-elle. Pour aider le Liban, nous avons besoin d'un programme de financement d'un montant de 100 000 euros pour mettre en place un mécanisme en ligne, et établir la liste des personnes disparues. Mais il est difficile de le faire à ce stade. »

« Le Liban se trouve dans une situation très difficile avec le conflit en Syrie, et la présence sur son sol d'un grand nombre de réfugiés », constate aussi Kathryne Bomberger. « Nous sommes toujours prêts à l'aider. Nous n'avons pas encore réussi à le faire, note-t-elle. Le pays est divisé, et ces questions sont politisées. Il est difficile d'avoir une réponse unifiée. »
Mais Mme Bomberger espère qu'une présence de son organisation au Liban permettrait « de vraiment travailler avec les acteurs politiques et de réunir les ONG pour trouver une stratégie sur cette question ». Et de réaffirmer que « la volonté politique est absente non seulement au Liban, mais aussi dans d'autres pays qui n'ont pas osé faire face à ce problème ».

---

 

La CIPD
La Commission internationale pour les personnes disparues est une organisation non gouvernementale, créée en 1996 à la demande du président américain Bill Clinton, lors du sommet du G7 à Lyon, pour affronter la question des personnes portées disparues à la suite des différents conflits dans l'ex-Yougoslavie de 1991-1995. Cette organisation traite de la question des personnes portées disparues à la suite de conflits armés, de violations des droits de l'homme et de catastrophes naturelles.
Basée à La Haye, cette organisation, qui est présidée par Thomas Miller, aide les gouvernements à l'exhumation de charniers et à l'identification d'ADN des personnes disparues, fournit un soutien aux associations de familles de personnes disparues et contribue à créer des stratégies et des institutions pour rechercher des personnes disparues. L'organisation est actuellement engagée dans une zone large d'opérations au Moyen-Orient, notamment en Syrie, ainsi qu'au Burundi, en Libye, au Sud-Soudan et au Yémen, pays qui comptent « un grand nombre de personnes disparues. »
En outre, la CIPD aide les gouvernements à s'acquitter de leurs obligations en matière de droits de l'homme envers les victimes et les membres survivants de leurs familles. L'organisation assure aussi le renforcement des capacités institutionnelles qui favorise à long terme la confiance du public.

 

Témoignages fictifs, pour préserver l'espoir
« Quelque part entre Beyrouth et Saïda, j'ai été enlevée »

« J'ai disparu lors de l'une de mes escapades chez mes grands-parents »

 

Pour mémoire
HRW demande au Liban une commission d'enquête sur les disparitions forcées

Détenus en Syrie et disparus : un premier pas « concret » vers la vérité ?

Les lieux et bâtiments devenus des symboles de l'implantation des SR syriens au Liban

Détenus en Syrie : la faillite des responsables de tous bords...

Depuis le début de la guerre civile, plus de 70 000 personnes ont été portées disparues au Liban. Les nombreuses initiatives pour résoudre cette question sont restées sans suite. « Nous avons essayé d'aider le Liban dans ce sens. Malheureusement, le pays n'est pas vraiment préparé à faire quelque chose pour ces disparus », affirme à L'Orient-Le Jour Kathryne Bomberger, directrice...

commentaires (1)

Bravo Sylviane

SATURNE

15 h 01, le 05 février 2016

Tous les commentaires

Commentaires (1)

  • Bravo Sylviane

    SATURNE

    15 h 01, le 05 février 2016

Retour en haut