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90 bougies, une même flamme

Où en est la liberté d'expression au Liban ? Les médias libanais sont-ils réellement indépendants ? Sont-ils seulement viables au plan purement économique? Continuerez-vous longtemps encore à feuilleter le journal en sirotant votre café du matin ou bien ne vous restera-t-il un jour à manipuler et parcourir que l'iPad ou ses variantes améliorées? Ces questions, et bien d'autres ayant trait à la profession, feront l'objet, ce samedi, d'un séminaire au centre Berytech de Beyrouth, et cela à l'initiative de deux institutions américaines, IREX et MSI, se dédiant à la promotion des sociétés démocratiques (*).

Convié à ces travaux, il me paraît normal – et juste – de réserver en peu de mots à nos lecteurs la primeur du témoignage que peut y apporter L'Orient-Le Jour, plus précisément en matière d'indépendance et de continuité. Le journal que vous tenez entre les mains célébrera dans quelques mois ses 90 ans, et tous ceux et celles qui ont contribué, ou continuent de contribuer à sa longue et prestigieuse existence en tirent un fort légitime orgueil. Dans un Liban où le gros des médias est gangrené par les passions politiques, idéologiques ou même bassement sectaires – et leur inévitable vecteur, l'argent, ce nerf de la guerre –, notre recette de longévité dans la dignité reste cependant d'une désarmante simplicité.
C'est par l'autonomie financière que commence toute indépendance. Nos seules et uniques ressources se résument à la constante fidélité de nos lecteurs et annonceurs. À maintes reprises durant la guerre de quinze ans, ce journal a été au bord de la ruine, en raison de la désorganisation forcée des réseaux de diffusion et des considérables frais d'opération; en ruine, de fait, les obus ont parfois réduit ses locaux, sans jamais entamer pour autant l'attachement de l'équipe à sa mission. C'est tout seul, par ses propres moyens, en recourant à d'incessantes reconstitutions de son capital, que s'est invariablement relevé L'Orient-Le Jour. Car celui-ci n'a jamais émargé au budget d'un parti, lobby ou ambassade étrangère ou bénéficié de quelque soutien occulte. Ce journal n'est pas davantage la propriété d'un quelconque puissant, mais d'une vaste fratrie d'actionnaires parmi lesquels nul n'a jamais songé à s'assurer une majorité absolue : cela afin que soit sauvegardée, jusque dans les formes statutaires, une garantie d'indépendance dont se félicite la rédaction, tout autant que le lectorat.

Continuité dans le renouveau, patine de la tradition et pari sur l'évolution : elle n'est pas si vieille après tout, la nonagénaire de la presse libanaise. Et vous n'y êtes pas pour peu.


Issa GORAIEB

igor@lorient-lejour.com.lb


(*) : Le MSI (Media Sustainability Index) est un outil d'évaluation de la viabilité des organes d'information de par le monde, qui relève de l'Agence américaine pour le développement international (Usaid). IREX est une organisation américaine à but non lucratif qui se voue notamment à l'éducation et à la liberté de la presse.

Où en est la liberté d'expression au Liban ? Les médias libanais sont-ils réellement indépendants ? Sont-ils seulement viables au plan purement économique? Continuerez-vous longtemps encore à feuilleter le journal en sirotant votre café du matin ou bien ne vous restera-t-il un jour à manipuler et parcourir que l'iPad ou ses variantes améliorées? Ces questions, et bien d'autres ayant...