"L'art et la célébration de la vie sont également une forme de résistance": en plein bras de fer entre le Hezbollah et Israël, des milliers de Libanais ont choisi la fête, dans un pays divisé face au risque de contagion de la guerre à Gaza.
"Je suis triste de voir des gens mourir dans le sud du Liban et à Gaza, mais la résistance ne consiste pas seulement à porter une arme et à se battre", raconte à l'AFP Olga Farhat, une militante des droits humains de 45 ans.
Avec quelque 8.000 personnes, elle est venue jeudi soir sur le front de mer de Beyrouth assister à un spectacle de la troupe de danse Mayyas intitulé "Lève-toi", en hommage aux souffrances de la capitale libanaise soufflée par une gigantesque explosion en 2020.
"La joie, l'art et la célébration de la vie sont également une forme de résistance", affirme Olga Farhat.
"Je fais partie d'une génération qui a grandi dans la guerre au Liban et dans une famille qui croit en la cause palestinienne, mais aujourd'hui, je dis +le Liban d'abord+", souligne-t-elle.
Dès le début de la guerre à Gaza, le puissant mouvement pro-iranien Hezbollah a ouvert un "front de soutien" au Hamas palestinien dans le sud du Liban, échangeant des tirs quotidiens avec Israël.
Jeudi, dans la banlieue sud de Beyrouth, des milliers de ses partisans ont scandé "Mort à l'Amérique" et "Mort à Israël" lors des funérailles d'un haut responsable militaire.
Fouad Choukr a été tué mardi par une frappe israélienne --à laquelle le Hezbollah a juré de riposter-- sur cette banlieue, bastion du Hezbollah, au cours de laquelle cinq civils dont deux enfants ont aussi trouvé la mort.
Dix mois de violences à la frontière entre Israël et le Liban ont fait au moins 542 tués du côté libanais et déplacé près de 100.000 personnes.
Quelques heures plus tard, des milliers de spectateurs du show des Mayyas chantaient pour la paix, pour Beyrouth et pour le sud du Liban.
- "Le pays divisé en deux" -
"Le pays est divisé entre deux groupes, l'un qui ne s'estime pas concerné par la guerre et considère que le Hezbollah lui impose son identité, et l'autre qui fait la guerre pour prouver son existence", met en avant Mme Farhat.
"Nous ne sommes pas des partisans de la culture de la mort (..), mais si la guerre contre Israël nous est imposée, le martyre est notre devoir", lance de son côté Hussein Nassreddine, 36 ans, vendeur de vêtements de la banlieue sud.
Il fustige ceux de ses compatriotes qui préfèrent la fête, alors que "notre peuple dans le sud est déplacé et nos enfants tués".
En juin déjà, le chef du bloc parlementaire du Hezbollah, Mohammed Raad, critiquait ceux qui "ne se soucient que de fréquenter des boîtes de nuit et d'aller à la plage".
"La réponse la plus forte à Israël est la culture de la vie et de la beauté", a posté jeudi soir sur X le député Mark Daou, issu du mouvement de contestation populaire de 2019 et opposant au Hezbollah, en commentant le spectacle des Mayyas.
"La lutte contre l'ennemi israélien est multiforme", argumente M. Daou auprès de l'AFP, affirmant son refus de "réduire l'idée du Liban à une arène de guerre" en oubliant "la culture, la diversité et l'ouverture".
- "Prisonniers de leurs positions" -
La décision du Hezbollah d'entraîner le pays dans le conflit ne fait pas l'unanimité, et la crainte d'un embrasement généralisé nourrit les critiques de plusieurs forces politiques, notamment des principaux partis chrétiens et indépendants.
Cette division n'est pas nouvelle dans le pays multiconfessionnel qui ne dispose même pas d'un livre d'histoire unifié.
Selon la chercheuse Sonia Nakad, "chaque partie est prisonnière de sa position", "les Libanais n'ont pas encore décidé de ne pas recourir à la violence les uns contre les autres".
Malgré la situation de plus en plus tendue, beaucoup d'expatriés Libanais continuent d'affluer à l'aéroport, faisant fi des mises en garde des chancelleries occidentales.
Mais d'autres ont décidé d'interrompre leurs vacances, comme Rabab Abou Hamdane, "très stressée ces derniers jours", qui va finalement retourner dans un pays du Golfe où elle réside.
lar/jos/at/cab/hme
© Agence France-Presse
"L'art et la célébration de la vie sont également une forme de résistance": en plein bras de fer entre le Hezbollah et Israël, des milliers de Libanais ont choisi la fête, dans un pays divisé face au risque de contagion de la guerre à Gaza.
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