Rechercher
Rechercher

Liban - Audiovisuel

« Transmédia » : penser Web, écrire Web, filmer Web

De plus en plus les gens sont connectés à deux écrans en même temps : on regarde la télé en ayant son portable ou sa tablette en main. Ces habitudes ont ouvert le chemin au « transmédia », une nouvelle forme d'écriture qui consiste à travailler sur un projet quelconque en utilisant plusieurs médias en complémentarité. Des étudiants ont eu la chance de l'expérimenter dans le cadre du projet « Dia Sud Med ».

Table ronde à l’ALBA.

Ils sont jeunes, pleins d'énergie et de projets d'avenir. Ils sont les pionniers d'une prochaine école de transmédia méditerranéenne. Mohammad, Nour, Bassam, Joy et Nivine sont cinq étudiants libanais, chacun d'une discipline différente, mais le projet «Dia Sud Med» les a tous réunis autour d'une idée pionnière, le transmédia.

Le projet regroupe trois écoles de cinéma, de graphisme et de multimédia du sud de la Méditerranée (ALBA à Beyrouth, ISAMM à Tunis et ESAV à Marrakech). Cofinancé par l'Union européenne (UE), il vise le développement de l'industrie audiovisuelle sud-méditerranéenne par des formations d'excellence et des rencontres professionnelles.

«Ce projet vise principalement la formation de jeunes à cette nouvelle forme d'écriture qu'on appelle transmédia», affirme d'emblée Vincent Melilli, directeur du projet et de l'ESAV Marrakech. Le transmédia consiste « à travailler sur un projet – artistique, ludique ou d'information – en utilisant plusieurs médias en complémentarité, explique Alain Brenas, directeur de l'école de cinéma et de graphisme à l'ALBA. On peut ainsi produire un film, puis créer un jeu interactif relatif au film.» Il fait remarquer par ailleurs qu'il s'agit d'un domaine pionnier: «Même aux États-Unis et en Europe, ils sont toujours en train de fabriquer ce domaine.»

L'ALBA a ainsi intégré dans son cursus officiel un module sur les transmédias dans l'école de cinéma et celle du graphisme. Un diplôme universitaire dans cette production verra le jour prochainement. «Ce projet nous a permis de maîtriser notre besoin afin de mettre en place un vrai contenu pédagogique, avec l'ambition de créer à long terme une école de transmédia méditerranéenne. On est en train de précéder un peu le marché», dit fièrement Alain Brenas.

Une façon de contourner la censure
«Nous étions sceptiques quant à l'idée et au contenu du programme, étant donné que le transmédia, pour nous cinéastes, tue le grand écran» avoue pour sa part Mohammad Sabbah, 23 ans, étudiant en master réalisation cinéma. C'est d'ailleurs le cas de Joy Zeinoun, 24 ans, master en production: «J'ai également eu une appréhension au début du projet: qui est la cible? Le défi pour moi, c'est l'interaction et l'implication du spectateur.»

Abondant dans le même sens, Nivine Yakzan, 24 ans, master multimédia, avoue être attirée « par la nouveauté et l'originalité du transmédia, mais aussi par la coopération avec les cinéastes, un côté que je n'imaginais pas auparavant».

«Après, nous sommes devenus très intéressés en découvrant que c'est la nouvelle direction que prend l'audiovisuel, c'est un nouveau monde qui nous permet d'avoir une plateforme beaucoup plus large», admet Mohammad, en ajoutant malicieusement: «Le transmédia va nous permettre aussi d'aborder des sujets que la censure dans notre pays nous interdit sur le grand écran.» Selon Mohammad, du point de vue artistique «le transmédia nous pousse vers de défis encore plus grands, puisque nous associons ensemble plusieurs filières, entre les web designers, les cinéastes, le marketing. C'était une découverte formidable».

Même son de cloche chez Bassam Naous, 22 ans, master multimédia: «Avec le transmédia, on a appris à utiliser notre formation pour faire des documentaires web, des séries sur Internet, des fictions web, etc. Notre défi est de mélanger l'aspect design et interactivité avec le côté cinématographique pour faire sortir une œuvre utile et originale», ajoute-t-il.

Mélange de cultures
Une autre particularité du projet «Dia Sud Med» est la coopération et l'interaction entre les écoles et les étudiants libanais, tunisiens et marocains. «Ces écoles francophones qui se trouvent dans des pays arabophones ont la caractéristique d'avoir une double maîtrise des langues, une double culture. Ce qui permet des croisements très intéressants», estime ainsi Vincent Melilli.

Pour Alain Brenas, «l'intérêt a été de collaborer avec des écoles qui partagent les mêmes problématiques. Nous étions donc à la recherche des mêmes solutions. Et c'est ce que ce projet nous a justement donné, avec l'apport d'expertises venues d'Europe. Il y a un autre avantage qui concerne directement les étudiants, à savoir la découverte de talents dans la région du sud de la Méditerranée, et la création d'une sorte de synergie sur le plan humain et professionnel qui a été très important.»

Le projet «Dia Sud Med» a permis de mettre en place des pôles d'excellence complémentaires de sorte à créer une activité se développant dans une relation sud-sud plus que nord-sud, créant ainsi une autre circulation. On envisage donc qu'au Liban ces formations seraient plutôt autour de la production, en Tunisie de ce qui est contenu transmédia, et au Maroc de tout ce qui est postproduction numérique. Dans chacune des écoles, il y aurait des étudiants de ces trois pays, invités à des Salons professionnels pour créer des réseaux.

Vincent Melilla insiste sur la pérennité et le caractère complémentaire du projet. «Ceux qui ont suivi le programme "Dia Sud Med" vont continuer à se fréquenter, parce qu'ils ont vécu ensemble. On cherchera par exemple le producteur à Beyrouth, mais on va fabriquer et tourner les films au Maroc... C'est ainsi que naîtront des habitudes de fonctionnement transnationales. Et, forcément, ces gens-là travailleront sur des projets adaptés à la région et non plus en local. C'est un peu l'ambition du programme.»

Un des projets libanais a pour nom «The Tree of Forbidden Love», qui va collecter des histoires d'amours interdites, qu'ils s'agissent d'amours transconfessionnelles ou homosexuelles, etc., proposant des témoignages et des reconstitutions. «Ces histoires sont universelles, elles existent aussi bien au Maroc qu'au Liban.» Nour Tayeh est la réalisatrice du projet. Pour elle, «Dia Sud Med» a donné l'opportunité de découvrir de nouveaux horizons en faisant la connaissance d'autres pays. «Cela nous a permis de nous ouvrir à d'autres cultures, et je suis sûre que cela pourrait aussi nous ouvrir d'autres opportunités à l'avenir», confie-t-elle. «J'ai aussi réalisé l'importance de l'Internet dans mon travail: savoir utiliser ma formation de réalisatrice en fonction des besoins du Web. C'est toute une formation, pour penser Web, écrire Web et filmer Web! C'est le futur», conclut-elle.

 

Lire aussi
Les identités numériques au cœur du débat

La technologie au service des étudiants

Internet et le monde arabe : vers une révolution des mentalités ?

Ils sont jeunes, pleins d'énergie et de projets d'avenir. Ils sont les pionniers d'une prochaine école de transmédia méditerranéenne. Mohammad, Nour, Bassam, Joy et Nivine sont cinq étudiants libanais, chacun d'une discipline différente, mais le projet «Dia Sud Med» les a tous réunis autour d'une idée pionnière, le transmédia.
Le projet regroupe trois écoles de cinéma, de...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut