Rechercher
Rechercher

Liban - Rencontre

Hester Somsen connaît le Liban mieux qu’une enfant du pays

Positive et pleine d'énergie, Hester Somsen, ambassadrice des Pays-Bas à Beyrouth, pourrait être la meilleure ambassadrice pour la promotion d'une belle image du Liban à l'étranger.

L’ambassadrice des Pays-Bas, Hester Somsen, est une femme positive, volontaire et travailleuse.

Hester Somsen remplit son premier mandat de chef de mission diplomatique au Liban. «On réalise qu'on est à la place du pilote; il faut remplir certaines tâches, mais on peut aussi ajouter sa touche personnelle. J'aimerais faire connaître davantage les Pays-Bas aux Libanais, développer la coopération entre les deux pays, et aussi plancher avec l'ambassade du Liban aux Pays-Bas pour promouvoir l'image du Liban, encourager par exemple les Néerlandais à découvrir le pays», indique-t-elle.

La jeune femme, qui a suivi des études en sciences politiques et affaires internationales, a rempli des missions dans divers pays avant de venir au Liban. Elle avait notamment travaillé en Yougoslavie, en Hongrie et en Tanzanie. Elle a aussi été responsable, de 2009 et jusqu'à sa nomination d'ambassadrice au Liban, de la division de la gestion des crises et des missions de maintien de la paix au département de la politique sécuritaire au sein du ministère néerlandais des Affaires étrangères.
Notons que les missions de paix néerlandaises incluent des militaires et des civils, dans divers coins du monde, notamment en Afghanistan, à Kunduz, en Somalie, dans les Balkans et au Moyen-Orient. Dans ce cadre, l'ONUST (Organisme des Nations unies chargé de la surveillance de la trêve) compte des observateurs néerlandais, dont le chef de la mission au Liban.

Somsen est arrivée à Beyrouth l'été dernier, avec la vague d'attentats-suicides dans la banlieue sud et à Tripoli. Mais cela ne l'a pas découragée pour autant. C'est elle qui avait opté de venir au Liban.
«J'ai travaillé au début sur les dossiers de sécurité, en assurant celle de nos ressortissants au Liban. Ils sont environ 700 Néerlandais, mais tout le monde n'est pas encore enregistré auprès de l'ambassade», indique-t-elle.

Pour elle, malgré l'instabilité, le Liban est un «pays fascinant, qui assemble beaucoup de contradictions. C'est aussi l'un des rares pays du Moyen-Orient présentant toutes les institutions démocratiques et qui respecte les codes et les relations entre ses diverses communautés religieuses. L'histoire du pays est très importante, sa situation géopolitique aussi. Cela représente pour moi plusieurs défis à relever», poursuit-elle.
«Il fait bon vivre au Liban. Pour cela, je sens que ma mission consiste également à encourager le tourisme vers le pays, à lui donner une belle image. Il faut que les gens sachent que le Liban n'est pas uniquement un pays instable, voisin de la Syrie et qui accueille généreusement et admirablement un énorme nombre de réfugiés. Il offre de très belles choses, que ce soit sur le plan des paysages ou des habitants; les Libanais ont un esprit très ouvert et un bon sens de l'humour», ajoute-t-elle.
«Le Liban présente des paysages et des atmosphères variés, un brassage culturel, sur un espace réduit. C'est une destination touristique très intéressante malgré l'insécurité», dit-elle.

Des peuples de voyageurs et d'innovateurs
Volontaire et travailleuse, Hester Somsen souligne: «Je suis réaliste, mais aussi optimiste et je pense que le Liban a toutes les chances actuellement d'améliorer la situation. Un gouvernement a finalement été formé. Vous élirez prochainement un chef d'État. Il faut que ça continue, et aller jusqu'aux élections législatives en novembre. Il existe certes des limites, selon chaque personne ou chaque situation, mais les choses peuvent changer pour le meilleur.»

Hester Somsen tient à trouver des points communs entre le Liban et les Pays-Bas, tous les deux de petits pays entourés d'importants voisins. «Vous savez que vous ne pouvez pas imposer votre volonté à vos voisins. Vous êtes donc obligés de faire preuve de créativité et avoir une meilleure performance que les autres pour rester sur la carte», dit-elle. Et d'ajouter: «Comme les Libanais, les Néerlandais sont une population innovatrice et créative. Notre pays a une superficie réduite, mais nous avons exercé le commerce depuis des siècles. Comme les Libanais, nos ancêtres ont sillonné le monde en bateau et cela donne à leurs descendants une sorte d'esprit explorateur; on rentre au pays avec de l'argent, certes, mais aussi avec de nouvelles idées.»
Invitée à énumérer les points négatifs du Liban, elle cite, non sans humour, «la théorie du complot». «C'est toujours un complot tissé par une puissance étrangère... Je peux comprendre cela, mais jusqu'à une certaine limite. Les Libanais peuvent accomplir beaucoup de choses sans une influence extérieure», affirme-t-elle.

La diplomate révèle qu'elle a été aussi très surprise de voir les disparités économiques et sociales, surtout qu'elle est originaire d'un pays qui prône la redistribution des revenus pour une équité sociale. «J'ai appris que presque 30% de la population vit au-dessous du seuil de pauvreté et c'est ce que j'aime le moins au Liban. Quand il s'agit de l'inégalité des revenus, la Russie vient en tête de liste, elle est suivie de l'Ukraine; le Liban occupe la troisième place et les États-Unis la quatrième. L'inégalité est un choix de politique sociale, mais le rapport entre l'inégalité des revenus et la mobilité sociale réduite limite les possibilités pour les jeunes», dit-elle.
Elle souhaite aussi que les jeunes Libanais puissent trouver plus d'opportunités de travail dans leur propre pays.


L'ambassadrice des Pays-Bas est par ailleurs au courant – mieux que nombre de Libanais – des chiffres et des lois concernant beaucoup de dossiers, notamment ceux qui sont discriminatoires à l'envers des femmes. Les Pays-Bas ont dépassé cette phase depuis bien longtemps et, à l'instar des pays nordiques, sont devenus champions en matière d'égalité homme/femme.
Et pourtant, Mme Somsen souligne: «Contrairement aux idées reçues, quand il s'agit des femmes diplomates aux Pays-Bas, le ministère des Affaires étrangères ne compte actuellement que 20% de femmes ambassadrices seulement. Jusqu'aux années quatre-vingts, un règlement intérieur obligeait les femmes qui travaillaient au ministère des Affaires étrangères, qu'elles fussent diplomates ou secrétaires, de quitter leur poste si elles épousaient un homme d'une autre nationalité. Mais, avec le temps, les choses ont évolué. Ma promotion comptait déjà autant de femmes que d'hommes.»

L'importance du choix personnel
Elle note également que le choix d'une carrière diplomatique n'est pas facile pour une femme, elle doit toujours demander à son partenaire d'être flexible. «Mais chaque couple trouve sa propre solution», confie l'ambassadrice néerlandaise dont le mari est dentiste et exerce toujours son métier aux Pays-Bas.
«Nous voyageons tout le temps pour nous voir. Nous avons fait ça également quand j'étais en poste en Tanzanie et en Hongrie. Mon mari me soutient. Il est compréhensif parce qu'il sait que j'aime mon travail. Ce qui nous aide aussi c'est que nous n'avons pas d'enfants ; nous pouvons donc vivre chacun dans un pays», confie-t-elle.

Elle met aussi l'accent sur l'importance du choix personnel de chacun, comme celui des femmes qui décident de ne pas voyager et de quitter la carrière diplomatique. «Il faut toujours donner le choix aux femmes. Si elles veulent faire carrière ou rester à la maison à s'occuper des enfants. Il faut que la société et leurs proches les soutiennent, leur facilitant la tâche quel que soit leur choix», dit-elle.
Citant une étude sur l'égalité des sexes en matière de postes, de salaires et de lois, elle relève que les Pays-Bas occupent la première position dans ce cadre et le Liban la 78e. «Cela m'a vraiment surpris de voir à quel point la participation des femmes à la vie active est réduite au Liban. Elles constituent uniquement 22,6% de la force active. Le Liban occupe ainsi la dixième place dans ce cadre, parmi les pays arabes», dit-elle, parlant de la situation des Libanaises, mieux qu'une femme du pays.
«Au premier abord, on a l'impression que les femmes libanaises – qui savent parler et se présenter en société, qui ont une très bonne éducation et ont confiance en elles-mêmes – sont plus présentes dans la vie active, qu'elles occupent des postes élevés dans les entreprises. Au Liban, nombre de femmes sont cadres moyens, mais très peu deviennent cadres supérieurs. Il faut que les hommes aident les femmes afin qu'elles accèdent à des postes élevés. Au travail, une équipe mixte assure de meilleurs résultats», dit-elle.

Laisser de l'espace à l'autre
Se penchant sur sa propre carrière, elle note qu'elle n'a jamais subi de discrimination en tant que femme et qu'elle a toujours été prise au sérieux, ajoutant cependant: «Peut-être aussi que je ne détecte pas les signes.» Elle estime néanmoins qu'il existe certains avantages à être une femme diplomate, surtout dans le monde arabe. «Il m'est plus facile par exemple de parler aux femmes dans certains contextes, comme dans les camps de réfugiés, l'accès est plus facile. En Afghanistan, cela ne posait aucun problème non plus; une Occidentale a un statut différent de celui des Afghanes et elle est acceptée comme interlocuteur», note-t-elle.
Et d'ajouter: «Il est parfois plus facile pour une femme de rapporter un message difficile. Elle peut adoucir les choses, mettre du charme dedans. En fait, je pense qu'il s'agit des capacités de chacun, homme ou femme. Il faut que chacun connaisse ses capacités, ses points forts et faibles, développer et miser sur les points forts et essayer d'améliorer les points faibles.»

Hester Somsen apprécie les détails de son quotidien au Liban. «Quand je sors de chez moi pour venir au bureau, je salue au moins cinq personnes sur mon chemin et cela change ma journée. C'est aussi un pays qui offre tous les jours une variété de choix entre Orient et Occident», note-t-elle.
Elle aime marcher dans la nature, jouer au golf, lire, discuter avec les amis et les connaissances, et bien manger. «Pour la bonne chair, je suis bien servie au Liban», s'exclame-t-elle. Qu'est-ce qui lui manque le plus? «Mon mari. Nous sommes ensemble depuis plus de 20 ans. Et pour le moment nous nous voyons uniquement durant les congés.»
Et la bonne formule pour faire tenir un couple vingt ans? «Donner de l'espace à l'autre pour lui permettre de se développer, le stimuler et l'encourager à accomplir les choses qu'il aime faire. En vingt ans, il y a certes des frictions. Mais parfois les frictions rehaussent la teneur d'une relation et la font évoluer», conclut-elle.

 

Pour mémoire
Tom Fletcher, ambassadeur du Royaume-Uni, vante le Liban mieux qu'un Libanais

L'ambassadrice d'Espagne : des livres, de la musique, de l'énergie et... une volonté d'aider les femmes libanaises à accéder au pouvoir (réservé aux abonnés)

L'ambassadrice de Belgique, une travailleuse qui aime la randonnée et le yoga (réservé aux abonnés)

Hester Somsen remplit son premier mandat de chef de mission diplomatique au Liban. «On réalise qu'on est à la place du pilote; il faut remplir certaines tâches, mais on peut aussi ajouter sa touche personnelle. J'aimerais faire connaître davantage les Pays-Bas aux Libanais, développer la coopération entre les deux pays, et aussi plancher avec l'ambassade du Liban aux Pays-Bas pour...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut