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À La Une - Le point

À l’heure de l’examen de conscience

« Aucune nation ne peut sauvegarder sa liberté et se maintenir en état perpétuel de guerre. » La phrase n’est pas de Barack Obama, qui l’a reprise sans en citer l’auteur. Son « père » est James Madison, quatrième président des États-Unis (1809-1817). On doit à cet ardent défenseur des droits de l’homme la fameuse Bill of Rights qui représente les dix premiers amendements de la Constitution américaine adoptés le 21 août 1789 par la Chambre des représentants. Son lointain successeur a évoqué cette observation combien pertinente dans un discours prononcé la semaine dernière à Fort McNair, devant les cadets de la National Defense University, une vénérable institution créée en 1791 pour préparer les futurs responsables de la sécurité du pays.
L’Amérique est fatiguée de mener des guerres autrefois qualifiées de coloniales, un terme doublement obsolète d’abord parce qu’il remonte à une époque révolue, ensuite parce qu’il s’agit d’une nation n’ayant jamais eu à défendre des conquêtes qu’elle n’avait pas. La lassitude transparaissait à travers le discours présidentiel, tout comme l’indéfinissable gêne résultant d’un usage inconsidéré de drones, ces machines à tuer anonymes qui opèrent ces temps-ci en Afghanistan comme au Yémen, ou encore dans les montagnes du nord-ouest pakistanais.
Le ton est nouveau, la stratégie prônée aussi. Désormais, il ne sera plus question de « guerre globale contre la terreur », mais d’une campagne ciblée si l’on veut préserver le système démocratique en vigueur et sauver une image de l’Amérique dans le monde qui ne cesse de se détériorer. Depuis le 11 septembre 2001, des trillions de dollars ont été dépensés, et plus de 7 000 GI tués pour combattre el-Qaëda, abattre des régimes ennemis ou bien éviter des attentats. « Mais cette guerre, comme toutes les guerres, a dit Obama, doit cesser. Telle est la leçon de l’histoire, telles sont les exigences de la démocratie. »
Démocrates et républicains semblent avoir retenu les leçons des treize années passées : l’envoi massif de troupes sur le terrain n’a pas permis d’éviter, encore moins de réduire le nombre de réseaux terroristes. Au contraire, pourrait-on dire : l’ancien modèle de kamikaze prêt à se sacrifier pour tuer autant d’ « ennemis » que possible a cédé la place à des hommes jeunes, pour certains élevés en Amérique, capables de semer sur leur passage la mort et la destruction à l’aide de marmites à pression ou encore d’engins artisanaux fabriqués dans des arrière-cours ou des cuisines.
Autre point important du discours présidentiel : pour la première fois, l’actuel occupant de la Maison-Blanche a reconnu avoir donné l’ordre d’abattre un ressortissant US, Anouar el-Awlaki (né dans le Nouveau-Mexique), mais seulement après que les services compétents eurent désespéré de ne pouvoir le capturer vivant. Considéré comme l’un des personnages-clés d’el-Qaëda, l’ancien imam avait été victime, ainsi que son fils de 16 ans et trois autres personnes, d’un tir de roquette à partir d’un drone, en septembre 2011. Vingt-quatre heures avant la révélation faite par le président, l’attorney général, Eric Holder, avait fait parvenir à Patrick Leahy, président de la commission de la Justice de la Chambre des représentants, ainsi qu’à plusieurs figures éminentes du Congrès une note confirmant les rumeurs sur le sujet qui circulaient depuis longtemps dans la capitale fédérale.
La Central Intelligence Agency, qui avait jusqu’à présent la haute main sur les missions des drones, est supplantée par le département de la Défense et retrouve son rôle initial de « superespion », une tâche qui lui a valu un nombre incalculable de déboires et de critiques de la part des autorités, notamment depuis l’éclosion du « printemps arabe », un phénomène que ses agents n’ont pas réussi à prévoir. Soumis au tir nourri des membres de la commission ad hoc du Congrès, le directeur, John O. Brennan, a dû battre sa coulpe. « Avec des milliards de dollars investis ces dix dernières années, affirme-t-il dans une note adressée à la commission, notre capacité à anticiper les bouleversements survenus ces derniers temps aurait dû être beaucoup plus élevée. » On le voit, dans l’univers de l’ombre, le sens de « l’understatement » est une vertu cardinale.
Sur le plan pratique, il est clair que l’état de guerre perpétuelle prévalant depuis les attentats contre les tours jumelles de New York ne pouvait être maintenu. Barack Obama s’est porté garant d’une réforme attendue « dans un avenir pas trop lointain ». Est-ce à dire que la fermeture du centre de détention de Guantanamo est pour bientôt ? Ceci est une autre histoire, disait Rudyard Kipling.
« Aucune nation ne peut sauvegarder sa liberté et se maintenir en état perpétuel de guerre. » La phrase n’est pas de Barack Obama, qui l’a reprise sans en citer l’auteur. Son « père » est James Madison, quatrième président des États-Unis (1809-1817). On doit à cet ardent défenseur des droits de l’homme la fameuse Bill of Rights qui représente les dix premiers amendements...

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