Les menaces des uns, les exigences des autres et les coups bas entre membres d’une même coalition n’y changeront rien, le gouvernement Mikati reste en place et rien n’indique que sa chute est proche. Le suspense maintenu au cours des derniers jours par le bloc du Changement et de la Réforme au sujet de la participation de ses ministres à la réunion d’hier après-midi, a été levé dans la journée par le général Michel Aoun lui-même qui a déclaré espérer que le projet de réajustement des salaires présenté par le ministre Charbel Nahas soit le cadeau de Noël des Libanais. C’est en tout cas un cadeau empoisonné qui lui a été fait, mais il ne le savait pas encore...
En fait, Aoun a pris la parole à l’issue d’une réunion entre lui et ses alliés au sein du bloc du Changement et de la réforme, notamment le chef du courant des Maradas Sleiman Frangié, le secrétaire général du parti Tachnag Hovig Mékhitarian et le président du parti démocratique libanais Talal Arslane. Si le message transmis par cette réunion était certes de montrer la cohésion du bloc face aux rumeurs sur son éclatement, les différents protagonistes ont aussi laissé entendre qu’il existe des divergences dans leurs points de vue respectifs, mais celles-ci ne signifient en rien qu’ils sont en conflit. En d’autres termes, les partenaires au sein du bloc du Changement et de la Réforme ne sont pas d’accord entre eux pour se retirer du gouvernement à ce stade. La décision a donc été prise de participer au Conseil des ministres dans un signe dit de bonne volonté et pour tester les intentions réelles du Premier ministre... Commencé vers 17h, après une réunion préparatoire entre les ministres du bloc du Changement et de la Réforme dans un salon du palais de Baabda, le Conseil des ministres s’est empressé d’adopter en moins de deux heures, les 71 premiers points de son ordre du jour pour entamer ensuite le débat au sujet du réajustement des salaires. En dépit des explications sur écran géant du ministre Nahas, ce projet n’a visiblement pas convaincu une partie des ministres. Il a été soumis au vote mais a été rejeté. Aussitôt, le ministre de l’Economie Nicolas Nahas a sorti de son dossier un projet de rechange qui avait été discrètement concocté avec les instances économiques avec l’aval du Premier ministre, visiblement à l’insu du ministre du Travail. Ce second projet a été adopté par une majorité de 23 voix. Autrement dit, sept ministres du bloc du Changement et de la réforme ont voté contre (les cinq du CPL-Chakib Cortbawi ayant du se retirer avant le vote, plus Fayez Ghosn des Maradas- Sélim Karam étant absent- et le ministre Panos Manjian), alors que le ministre de l’Industrie Vreij Sabounjian a voté en faveur du projet soucieux de respecter la position de l’association des Industriels dont il fait partie, mais aussi ceux d’Amal (ce qui est compréhensible, car Ali Hassan Khalil a le ministre Charbel Nahas dans son collimateur depuis que ce dernier a proposé une couverture médicale sans le consulter) et ceux du Hezbollah qui voulaient reporter le débat (ce qui est moins compréhensible après l’appui déclaré de sayed Nasrallah aux revendications de Aoun). Toutefois dans une volonté de ne pas heurter Charbel Nahas, Ali Hassan Khalil a renoncé à prendre la parole, laissant Adnane Mansour, plus diplomate, le faire. Ce sont donc les ministres du CPL qui ont insisté pour le vote, tout en respectant son issue. Même si, selon Charbel Nahas, le décret adopté est moins favorable aux salariés et aux patrons et il est en deçà du premier décret adopté par le Conseil des ministres et contesté par le ministre du Travail lui-même.
S’il faut désormais attendre la réaction des syndicats ( la CGTL et les autres), il est clair que sur le plan politique, un coup a été porté au bloc du changement et de la réforme et à son chef Michel Aoun. De même que sur le plan procédural, la méthode peut être contestée, puisque le décret sur les salaires relève en principe des prérogatives du ministre du Travail,et qu’il doit en tout cas porter sa signature. Quelle sera l’attitude du général Aoun ? La question reste posée, même si le Premier ministre a annoncé de nouvelles réunions du Conseil des ministres vendredi et la semaine prochaine, après le retour du chef de l’État de son voyage en Arménie.
Mais si les Libanais avaient les yeux tournés vers le Conseil des ministres, les milieux politiques étaient surtout intéressés par la visite à Beyrouth du secrétaire d’État adjoint américain Jeffrey Feltman. Ce dernier a donc entamé ses contacts libanais par une réunion loin des médias avec l’ancien député Nassib Lahoud, avant de rencontrer le Premier ministre Nagib Mikati. Les informations du Sérail précisent que l’entretien a essentiellement porté sur la situation en Syrie et sur la nécessité pour le Liban de coopérer avec l’Occident et la Ligue arabe en ouvrant un couloir humanitaire pour les réfugiés syriens au Nord et en assurant leur protection. Les milieux politiques attendent surtout la rencontre entre Feltman et le président de la Chambre Nabih Berry prévue aujourd’hui, d’autant que Berry avait argué de sa présence à Msaïleh pour éviter de rencontrer Feltman au cours de sa précédente visite au Liban au cours de l’été écoulé.
Feltman a remis au Premier ministre un message de la part de la secrétaire d’État américaine Hillary Clinton, dans lequel elle le félicite d’avoir versé la part du Liban dans le financement du TSL. C’est aussi pour remercier Mikati de cette démarche qu’une délégation du TSL est attendue incessamment à Beyrouth. Mais les sources du 14 mars estiment que le but de cette visite de membres du TSL est aussi de maintenir la pression sur le gouvernement et de le presser de lui remettre les quatre suspects...
Marie Joe, je t'ai bien compris. T'as bien raison. Anastase Tsiris
11 h 33, le 08 décembre 2011